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Talleyrand, les beautés du diable

Talleyrand, les beautés du diable

Titel: Talleyrand, les beautés du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Decker
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qu’il a appris qu’un petit animal blessé était venu secrètement s’y terrer pour lécher ses plaies.
    Au vrai, cet animal aux grands yeux fiévreux était une brebis qui rentrait au bercail et dont il ne rêvait que de devenir le pasteur.
    Une brebis qui avait déjà vu le loup !
    — Votre fille est de retour, avait-il annoncé à Dorothée I, je vais la chercher, je la ramène à Paris.
    On imagine l’effet catastrophique que cette nouvelle produisit sur la duchesse de Courlande qui se rongeait de jalousie.
    — Elle est à Valençay ? D’où revient-elle et depuis quand est-elle revenue ? demanda-t-elle le rouge aux joues.
    La femme d’Edmond avait en effet repris le chemin de la France. Parce que là-bas, à Vienne, elle avait été humiliée et meurtrie. Clam l’y avait odieusement trompée, il était donc devenu haïssable. Et puis, malgré sa fougue et sa jeunesse il n’était jamais parvenu à lui faire oublier son vieil oncle, l’enchanteur de ces dames.
    — Nous sommes faits pour vivre ensemble, lui murmura alors Talleyrand sans aucun lyrisme. Avouez avec moi que nous aurions grand tort de nous passer l’un de l’autre car je perdrais mon mouvement et vous votre repos.
    Dorothée en convint. Plus tard, elle l’écrira :
    — Mon long commerce avec monsieur de Talleyrand m’a rendue difficile pour celui de tout le reste du monde. Les esprits que je rencontre me semblent lents, diffus, arrêtés par de petits à-côtés...
    — Je vais m’occuper de votre chambre, faire ôter le tapis, nettoyer toutes choses pour que, quand nous reviendrons à Valençay, vous soyez passablement bien, s’empresse-t-il encore. Si vous le voulez, chère amie, nous passerons désormais notre vie dans les mêmes lieux, dans les mêmes occupations, dans toute la même manière de vivre. Ah ! je ne sais rien de comparable au bonheur de passer ces jours avec vous...
    Tout cela était bel et beau mais c’était faire peu de cas de Kelly, l’épouse légitime, d’Edmond, le mari officiel, et de Dorothée I, la mère et la vieille maîtresse qui avait maintenant ses habitudes auprès de lui !
    Allons ! Celui qui avait réussi à imposer sa géographie de l’Europe à toutes les majestés réunies à Vienne, qui avait su négocier avec les Metternich, Castlereagh, Nesselrode, Hardenberg et les autres, celui-là n’était pas homme à se laisser impressionner par quelques accès de mauvaise humeur familiale. Surtout quand il s’agissait de délimiter les douces frontières de sa « carte du Tendre » !
     
    Pour Kelly, princesse de Talleyrand en titre, la cause fut entendue en deux temps et trois mouvements. Sèchement priée de ne jamais remettre les pieds en la rue Saint-Florentin ni à Valençay, elle ne rechigna pas.
    Son mari lui proposa simplement d’aller se changer les idées en Angleterre avant de venir s’installer villa Beauséjour, à la Muette, où elle ne manquerait jamais de rien.
    Mais sans plus !
    Plus tard, elle se transportera rue de Lille et elle s’y ridera dans le souvenir de la grande époque où elle était princesse de Talleyrand.
    — Là, tout en sa demeure lui rappelait le grand homme, raconte un visiteur. Les tapis devant la cheminée, la pendule, les coussins brodés qu’elle plaçait sous ses pieds, une tabatière qu’elle caressait avec nostalgie...
    Un jour, en 1825, la reine d’Espagne lui fera remettre le grand cordon de l’ordre de Marie-Louise en remerciement « des égards qu’elle avait eus pour adoucir la position de Sa Majesté le roi Ferdinand pendant sa captivité au château de Valençay ».
    Or, on sait qu’elle y avait plutôt « adouci la position » du duc de San Carlos...
     
    Edmond ? Il allait bien falloir qu’il se fît une raison, celui-là. Soit, s’il n’avait pas délaissé son épouse pour aller faire le joli coeur de droite et de gauche, il aurait légitimement pu manifester sa jalousie, mais il était vraiment trop mal placé pour donner la plus petite leçon de morale à qui que ce fût. Il avait pourtant osé jouer les offensés, un jour, quand il avait appris que sa femme (la mère de ses fils Napoléon Louis et Alexandre Edmond) avait eu l’outrecuidance de lui préférer Clam-Martinitz !
    Alors, il avait été jusqu’à provoquer le suborneur en duel. Bien mal lui en avait pris, hélas, car il ne s’était pas sorti indemne de ce lame à lame. Un grand coup de sabre était en effet venu lui strier le visage.

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