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Tarik ou la conquête d'Allah

Tarik ou la conquête d'Allah

Titel: Tarik ou la conquête d'Allah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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retrouver la liberté, tiendront
les villes pour toi. Marche sans t’arrêter vers Toletum, qui regorge de
richesses inouïes. Qui est maître de la capitale contrôle l’ensemble du pays.
Si tu mènes ces opérations avec célérité, tu en auras fini à l’arrivée de la
mauvaise saison. La mer ne sera plus navigable et Moussa Ibn Nosayr ne pourra
rien faire contre toi pendant plusieurs mois. Tu seras alors en position de
force pour discuter avec lui.
    — Juif, tu es diablement
intelligent, je n’aimerais pas compter au nombre de tes ennemis.
    — Et moi, je m’honore d’être
ton ami. Sache toutefois que j’agis de la sorte pour le bien de mes frères. Je
crois sincèrement que le Dieu d’Israël vous a envoyés vers nous pour mettre fin
à nos souffrances. J’espère que tu tiendras tes promesses car, sans notre aide,
jamais tu ne parviendras à tes fins. Souviens-toi de cela lors de ton entrée à
Toletum.
    — Je te répondrai par un verset
de notre saint Coran : « Les Musulmans, les Juifs, les Sabéens et les
Chrétiens – ceux qui croient en Allah et au Dernier Jour et accomplissent
œuvre pie –, mille bénédictions sur eux et ils ne seront point
attristés. »
    — L’un de nos prophètes a
dit : «  Nahamou, nahamou et ami ! » Ce qui veut
dire : « Consolez, consolez mon peuple ! » Nous récitons ce
verset dans nos synagogues chaque année lorsque nous célébrons le triste
anniversaire de la destruction du Temple. Jamais il ne m’a paru plus actuel. Je
prie donc le Rocher d’Israël pour que tout se passe selon mes vœux.
    — N’aie aucune crainte, mon
cher et fidèle Isaac. Les miens ont le respect scrupuleux de la parole donnée
et, dans l’Ishbaniyah musulmane, je puis t’assurer que vous vivrez tranquilles
et en paix.
    Par une nuit sombre, Isaac
s’embarqua à bord d’un frêle esquif. Son complice, Samuel, l’avait averti qu’il
avait des informations capitales à lui transmettre. La traversée fut éprouvante.
Le vent s’était levé et, à plusieurs reprises, des vagues faillirent faire
chavirer le bateau. Transi de froid, l’émissaire juif crut sa dernière heure
venue. Il marmonnait des prières sous l’œil plutôt goguenard des marins
habitués à ces sautes d’humeur de la Grande Mer. Quand il aborda dans une
crique isolée, il lui fallut beaucoup de temps pour retrouver ses esprits.
    Samuel l’accueillit dans le domaine
déserté d’Akhila et le laissa se reposer. Il mesurait les risques encourus par
son ami. En bon paysan, il avait peur de la mer. L’idée de s’enfuir de l’autre
côté du détroit ne l’avait jamais effleuré. C’est qu’il caressait toujours le
fol espoir de retrouver ses enfants que des moines fanatiques avaient enlevés.
Quelques semaines auparavant, la chance lui avait souri. Le hasard lui avait
fait rencontrer son fils aîné, Obadiah. Il gardait de cette entrevue un goût
amer. Le garçon, endoctriné par les prêtres, était resté sourd aux objurgations
de son père et avait même menacé de le dénoncer aux autorités. Devenu un
chrétien fanatique, il ne jurait plus que par les saints auxquels croyaient les
minim. Quand son père avait tenté de l’attendrir en lui psalmodiant les prières
qui avaient bercé ses jeunes années, il s’était signé, le visage révulsé d’horreur :
    — Je n’ai plus rien à voir avec
toi et les tiens. Mes protecteurs m’ont ouvert les yeux sur vos abominables
superstitions et sur vos crimes. Je n’ai qu’une seule ambition : entrer
dans les ordres pour expier les péchés de mes ancêtres et leur participation à
la mort de Notre Sauveur.
    — Tu me brises le cœur, avait
rétorqué Samuel. Tu ne peux trahir notre foi. Tes geôliers – car tu es bel
et bien un prisonnier – t’inculquent des stupidités. Si leur Dieu était
véritablement un Dieu d’amour, pourquoi autoriserait-Il qu’on arrache des
enfants à leurs parents ? Je ne connais pas de crime plus grand.
    — Tu parles comme mes frères et
mes sœurs, avait grommelé Obadiah.
    Samuel, en entendant cette phrase,
avait tressailli de joie.
    Son aîné était perdu pour Israël mais
les autres, en dépit des châtiments qui s’abattaient sur eux, n’avaient pas
renié leurs origines. Bientôt il les retrouverait si les Ismaélites se
décidaient enfin à envahir l’Hispanie. Pour cette raison, il avait demandé à
Isaac de traverser le détroit. Il voulait être définitivement fixé sur la

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