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Tarik ou la conquête d'Allah

Tarik ou la conquête d'Allah

Titel: Tarik ou la conquête d'Allah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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châtiment suffisant
pour ces êtres cupides. J’ordonne qu’ils soient épargnés. Qu’on leur assigne un
travail de scribe dans les services du fisc. Qu’ils ne se méprennent pas sur
mon geste. Ils seront étroitement surveillés et, à la moindre faute, châtiés
comme il se doit.
     

Chapitre VI
    À peine avait-il pris les rênes du
pouvoir que l’émir Abd al-Rahman se consacra à une tâche qui lui tenait à cœur.
Il voulait rassembler autour de lui tous les membres de sa famille ayant
survécu à l’horrible tragédie qui avait décimé leurs rangs. Il convoqua le cadi
le plus réputé de Kurtuba, Mawiya Ibn Saleh al-Hadrami, connu pour sa piété et
son intransigeance, et lui demanda de se rendre à Damas, muni d’une forte somme
d’argent, afin de payer la rançon de ses deux sœurs qu’il s’imaginait croupir
en prison. Plusieurs mois après, le cadi se présenta devant lui et lui remit
l’argent qu’il lui avait confié :
    — Le calife aurait-il refusé de
libérer mes sœurs ? C’est une insulte qu’il me paiera cher !
    — Tu te trompes. Il aurait
volontiers accepté, mais tes parentes sont libres. Elles ont épousé des
officiers et refusent de te rejoindre. Cela dit, elles se réjouissent de te
savoir en vie et à la tête d’un royaume prospère.
    — Que t’a dit le calife à mon
sujet ?
    — Rien. Il affecte de t’ignorer
pour cacher le chagrin que lui cause la perte de l’Ishbaniyah. À ta place, je
me méfierais. Tôt ou tard, il se vengera et trouvera ici-même des complices
pour fomenter contre toi des révoltes. Fais en sorte qu’aucune de tes décisions
ne crée de mécontents. Ils n’hésiteraient pas à se regrouper sous la bannière
noire des Abbassides.
    Abd al-Rahman eut toutefois la
consolation de voir arriver à Kurtuba ses cousins Abd al-Malik : Ibn Omar,
Abd al-Malik Ibn Bishr et Habib ainsi qu’une foule d’escrocs prétendant être de
lointains parents et dont il fit vérifier soigneusement la généalogie. Tous
ceux qui furent reconnus comme des Omeyyades reçurent domaines et pensions,
suffisamment éloignés de la capitale afin de ne pas y former une coterie dont
l’influence aurait irrité les Arabes et les Berbères locaux.
    Neuf mois après leur mariage, Fatima
donna à l’émir un fils, Suleïman, puis, les années suivantes, deux autres
garçons, Hisham et Abdallah. Assuré de l’avenir de sa dynastie, Abd al-Rahman
se consacra avec une énergie inlassable à l’organisation de son royaume. La
fuite d’al-Fihri l’obligea dans un premier temps à partir en campagne. L’ancien
wali, dont l’un des fils était mort lors des affrontements devant Kurtuba,
avait juré de se venger. Il soudoya les espions chargés de le surveiller et
gagna Marida [45] où s’étaient retirés bon nombre de ses partisans. Il se lança dans une série
d’attaques meurtrières contre les villages proches de la capitale et occupa
quelques jours Ishbiliya dont les habitants furent massacrés ou vendus comme
esclaves. Furieux, Abd al-Rahman ordonna qu’al-Sumayl, qui s’était abstenu de
suivre son ancien maître, soit arrêté et mis aux fers. Il envoya une armée marcher
contre le rebelle, défait et tué en l’an 142 de l’Hégire. Dans la bataille,
Azim Ibn Zyad, qui commandait les troupes loyalistes, trouva une mort
glorieuse. Son fils aîné, Moussa, qui était loin de posséder toutes ses
qualités, lui succéda à la tête des Berbères. Avide d’argent, il monnayait
chèrement sa fidélité, contrairement à ses frères, Amr et Zyad, dévoués
serviteurs de l’émir.
    À peine en avait-il terminé avec
al-Fihri qu’Abd al-Rahman dut guerroyer contre les Nazaréens réfugiés dans les
montagnes du Nord. Ses propres sujets chrétiens n’avaient pourtant pas à se
plaindre de leur sort. Il les protégeait et respectait leurs droits. Mieux, il
avait recruté près de quarante mille d’entre eux pour servir dans sa garde
personnelle. Ces mercenaires, grassement payés, étaient de valeureux
combattants. L’émir les employait pour sa protection et pour réprimer les
Révoltes des Arabes. Avec le kumis [46] Pedro et l’évêque de Kurtuba, l’émir entretenait des relations courtoises.
Considérés comme des dignitaires de la cour, ils avaient leurs entrées au
palais et exécutaient scrupuleusement la mission qui était la leur : la
collecte auprès de leurs coreligionnaires de la djizziya et du kharadj. Les
deux hommes s’exprimaient dans

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