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Tarik ou la conquête d'Allah

Tarik ou la conquête d'Allah

Titel: Tarik ou la conquête d'Allah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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caisses du royaume et les miennes seront bientôt vides. »
Ce témoignage, bien que suspect, avait causé la perte du dignitaire chrétien à
l’exécution duquel une foule en liesse s’était pressée. Ses propres
coreligionnaires, les premiers qu’il pressurait fiscalement, s’étaient réjouis
de sa chute, sans se rendre compte que celle-ci signait une diminution de leur
influence à la cour.
    Abd al-Rahman n’entendait pas pour
autant alléger les taxes levées sur ses sujets. Lors de son accession au trône,
il avait reçu des délégations venues de toutes les villes du royaume et avait
rejeté avec dédain la pétition des habitants d’Ilbira lui demandant l’abrogation
de toutes les taxes instituées par al-Hakam. Furieux de la réponse de l’émir,
les délégués s’étaient regroupés devant le Dar al-Imara et le hadjib avait dû
envoyer un contingent de Muets pour les disperser.
    Les victimes de cet incident avaient
bien vite été oubliées. Les chefs religieux musulmans s’étaient bien gardés de
prendre leur défense car le souverain avait su gagner leurs faveurs en
affichant sa piété et en faisant détruire la halle aux vins établie sur la rive
gauche du fleuve, là où s’élevait jadis le Faubourg. Cet entrepôt avait été
affermé à un Musulman, Haiyun, qui, en dépit de ses engagements, ne se
contentait pas de vendre, à des prix prohibitifs, ses vins et son hydromel aux
dhimmis, mais comptait parmi ses clients assidus nombre d’aristocrates arabes
et berbères, fort peu respectueux des lois coraniques. Le fqih Yahya Ibn Yahya
al-Laithi s’était réjoui de la destruction de cet « antre du démon »,
tandis que Juifs et Chrétiens se voyaient désormais contraints de faire venir
les boissons prohibées d’Ishbiliya ou d’Ifrandja.
    Assigné à résidence dans son fief de
Balansiya, Abdallah, le seul fils survivant d’Abd al-Rahman I er ,
avait tenté de profiter de la mort de son neveu al-Hakam pour agrandir ses
domaines en annexant le pays de Tudmir [87] administré jusque-là par les descendants du comte wisigoth Théodomir. Il
s’était emparé d’Ello [88] ,
la principale localité de cette province, mais n’avait guère profité de sa
nouvelle acquisition. La fatigue de l’expédition, ajoutée à son grand âge,
avait eu raison de sa santé et il avait été frappé d’une attaque de paralysie
générale dans laquelle certains virent un châtiment divin. Jugeant qu’il ne
représentait plus aucun danger, l’émir n’avait pas envoyé d’armée contre son
grand-oncle, dont les partisans ne tardèrent pas à s’entredéchirer. Arabes
mudarites et yéménites en vinrent aux mains sous un prétexte futile. Un
Mudarite s’était introduit clandestinement dans une vigne appartenant à un chef
yéménite, et avait saccagé celle-ci. Furieux, ce dernier avait aussitôt
incendié les villages mudarites voisins pendant que ses soldats,
reconnaissables à la feuille de vigne qu’ils portaient sur leurs manteaux,
faisaient régner la terreur dans la région. Informé de cette situation, l’émir
interdit à Marwan Ibn Amr d’intervenir. Il lui expliqua que cette stupide
querelle affaiblissait le camp de ses adversaires et qu’il n’était pas
mécontent de voir ceux-ci s’entretuer.
    Dès la première année de son règne,
Abd al-Rahman II renoua avec la tradition de la saifa estivale. Il lança
une expédition contre les Chrétiens de la Djillikiya [89] , une province située
au-delà d ’al-Taghr al-adra, « la Marche inférieure », sur
laquelle veillait le wali de Marida. Les troupes de l’émir franchirent le col
de Djarnik [90] et firent plusieurs milliers de prisonniers. Deux ans plus tard, en
rabi II 210 [91] ,
Abd al-Karim Ibn Mughit remporta, au pied du Djebel al-Madjus [92] , une éclatante
victoire contre une armée chrétienne cependant que Faradj Ibn Massara
s’emparait du château fort d’al-Kula’ia [93] .
Kurtuba fit fête aux généraux vainqueurs de cette expédition qu’un poète de
cour qualifia de façon grandiloquente de ghazwat al-fath, « expédition de la victoire », dans un poème qu’il tint à réciter
devant l’émir et ses conseillers. Ces différents succès attirèrent vers
l’Ishbaniyah des aventuriers de tout acabit, prêts à offrir pour de l’argent
leurs services à un souverain auquel la fortune des armes semblait sourire.
Emprisonné à Aix-la-Chapelle pour avoir assassiné plusieurs

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