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Terra incognita

Terra incognita

Titel: Terra incognita Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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cheville. Les élancements n’auguraient rien de bon. Il le vérifia au toucher. Le pourtour était gonflé. Il desserra les lacets de son soulier pour soulager la pression, des larmes au coin des yeux. Quand bien même il y mettrait tout son courage, il n’irait plus bien loin.
    Comme pour entériner ce constat, et malgré la distance qu’ils avaient déjà couverte, un bruit sourd emplit le tunnel. Suivi aussitôt d’un autre. Puis d’un autre.
    Jean se mordit la lèvre d’angoisse, leva les yeux vers Briseur qui, lui, venait d’accrocher ceux de Celma.
    — Ils attaquent le mur, constata le colosse.
    Celma hocha la tête d’un air entendu. Ils ne pouvaient se permettre d’attendre. Et, tout à la fois, il lui était impossible d’interrompre le flux magique. Jean perçut leur angoisse. Elle répondait à la sienne. Il se racla la gorge. Il fallait qu’il les prévienne pour sa cheville.
    — Me suis fait mal…
    Celma s’accroupit, posa la lanterne à côté de lui, repoussa la tête de Noiraud qui s’était mis à lécher l’oreille de son maître et fit bouger le pied, arrachant à Jean un gémissement de douleur.
    Le visage de Celma reflétait la gravité du moment, pourtant elle eut un sourire rassurant à l’instant où elle lui tapota la joue.
    — Rien de sérieux, fils. Juste une petite entorse. Briseur va te porter.
    Elle se releva. Devant eux, Bertille venait de tressaillir, à l’instar d’un bourgeon qui, soudain, voit sa coque se fissurer. Celma se précipita pour la prendre aux épaules, anticipant le vertige qui suivait chacune de ses visions. Jean s’agrippa à la main tendue de Briseur. Il ne pourrait pas se jucher sur son dos, la voûte du plafond était bien trop basse, déjà le colosse devait avancer courbé. L’idée d’être ballotté comme un enfançon rebuta Jean, mais il n’avait d’autre solution. Le simple fait de reposer le pied par terre lui vrilla le mollet.
    En arrière, les coups redoublaient. Les soldats de Luirieux ne seraient plus très longs à ouvrir une brèche et à se précipiter.
    Bertille respirait de nouveau normalement. Le bruit acheva de la ramener au présent. Elle se retourna vers Jean que les mains puissantes de Briseur venaient d’enlever du sol.
    — Il est vivant, murmura-t-elle, un franc sourire aux lèvres. Tu entends, Jean, Petit Pierre est vivant !
    Le garçonnet fut traversé par une bouffée intense de chaleur.
    — Vrai ?
    — Vrai, affirma-t-elle. Je l’ai capté. Il est passé par là.
    — Quand ? demanda Celma.
    — Il y a quelques mois. Mais je l’ai vu, mère. En compagnie d’un autre de son âge. Bossu.
    Celma sentit revenir en elle une bouffée d’espoir.
    — Alors, nous savons où mène ce souterrain.
    — Où ? demanda Jean, assis sur l’avant-bras replié de Briseur comme sur une branche basse. La musculature de l’homme était d’un bois plus solide encore.
    — Au château de Bressieux. Souvenez-vous de ce que nous a raconté Algonde. Le petit bossu est le compagnon d’Elora. Pressons-nous, ajouta-t-elle en allongeant le pas, la route est encore longue et Mathieu ne devrait pas tarder là-bas.

27
     
    Vivante ! Ma fille est vivante ! ne cessait de se répéter Mathieu tout en cinglant l’encolure de son cheval. Il ne voulait entendre que cette certitude, et ne pas penser à Petit Pierre, sans doute condamné au moment même de la trahison du prévôt. Depuis le premier jour il s’était douté du mensonge, mais il n’avait pas trouvé en lui la force de l’affronter. Il ne voulait pas croire que son fils soit passé. Malgré la rumeur qui circulait dans les rangs des soldats. Peu de temps avant son arrivée, dans les bois qui ceinturaient Romans et qu’il avait traversés ventre à terre, on avait retrouvé le corps d’un garçonnet, visiblement pris par le froid et achevé par les loups. Briseur et La Malice avaient tordu le nez, accablés de fatalité, Celma avait fait rouler ses runes, puis, haussant les épaules, s’était accordée à sa fille pour affirmer que Petit Pierre ne s’était jamais mieux porté. Pour ne pas laisser le doute le ronger, Mathieu avait, servilement, accepté le contrat de Luirieux. Ne voulait-il pas se venger des Sassenage ? N’en avait-il pas rêvé dix années durant ? Hugues de Luirieux avait su cultiver sa part d’ombre, et utiliser à ses fins l’amour qu’il portait aux siens. Savoir Bertille, Jean et Celma en sécurité, Briseur et La Malice

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