Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Thalie et les âmes d'élite

Thalie et les âmes d'élite

Titel: Thalie et les âmes d'élite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
Vom Netzwerk:
la salua pour se rendre à son travail. Elisabeth ajusta sa toque en vison, contempla encore un peu le vaste incendie. Tous les pompiers de la ville s’étaient rassemblés là pour limiter les dégâts.
    Très bientôt, ses plus beaux logis trouveraient preneur.
    Cet été, elle augmenterait ses prix. Les touristes ne sourcilleraient pas
    trop.
    Ses
    chambres
    demeureraient
    toujours
    moins chères que celles du Château Frontenac.
    Un peu plus tard, le froid la ramena chez elle, un sourire sur les lèvres.

    *****
    Alors que les habitants de la pension Sainte-Geneviève s’inquiétaient du grand incendie à proximité de chez eux, une demi-douzaine de travailleurs continuaient les travaux de réaménagement. Comme à son habitude, Jeanne s’occupa de les recevoir. Si Elisabeth
    Picard avait promis de les
    tenir à l’œil, elle ne se privait pas de confier la tâche à sa domestique. L’embauche récente d’une jeune bonne lui donnait le temps de jouer à la contremaîtresse.
    — Les jeunes logés dans ces pièces ont-ils été jetés dehors ? lui demanda un ouvrier occupé à condamner une porte.
    — Mais non, vous le savez, ils habitent à côté.
    Bien sûr, l’homme connaissait bien la nature de tous ces réaménagements. Mais depuis décembre, quand la jolie brune passait à portée de voix, il en profitait pour engager la conversation.

    — C’est étrange, tout de même. De l’autre côté, on a divisé des pièces en deux et on a percé de nouvelles portes.
    Ici on défonce des murs entre des chambres et on condamne des portes.
    — Dans la rue Saint-Denis, les locataires auront de petits logis. Ici, ce seront des suites de deux pièces, dont quelques-unes avec leur propre salle de bain.
    — Là-bas, ce seront des bourgeois qui fréquentent l’université.
    Habitant dans le quartier Saint-Sauveur, pour ce menuisier, seuls les notables traînaient encore à l’école après l’âge de vingt ans.
    — Pas nécessairement. Si des travailleurs de la ville veulent payer une chambre de dix pieds par dix et utiliser une toilette commune, ils seront les bienvenus.
    — Des travailleurs qui prennent un repas avec une veste et une cravate... Ça ne court pas les rues.
    — Ce sont les règles de la maison.
    L’autre lui adressa une grimace. Le beau monde lui donnait des démangeaisons.
    — Mais personne n’est obligé de venir vivre ici, dit Jeanne avec un sourire moqueur.
    — Encore heureux. Et dans cette maison, la patronne veut-elle faire quelque chose comme un club libéral ?
    — Pourquoi dites-vous cela ?
    — Les vieux messieurs, ce sont des députés, non ?
    Devant son acquiescement, il continua :
    — Elle souhaite augmenter le nombre de grands appartements pour en recevoir d’autres.
    — Encore une fois, des personnes capables de se payer deux pièces seront les bienvenues, députés ou pas, libéraux ou pas.

    Au total, huit hommes trouveraient là un logis confortable, et dix-huit, une chambre plus modeste dans la rue Saint-Denis.
    — Ma patronne ne vous paie pas pour me faire la conversation, dit la domestique en tournant les talons, et moi non plus d’ailleurs.
    L’homme à genoux, un rabot entre les mains, contempla la jeune femme qui s’éloignait, séduisante dans son uniforme noir.
    — Mademoiselle..
    Elle se retourna et posa les yeux sur le menuisier dans la fin trentaine. Il paraissait robuste, bon vivant, volontiers rieur.
    — Oui?
    — Nous en avons pour quelques jours encore ici, puis ce sera fini. J’aimerais vous revoir, ensuite.
    La jeune femme ressentit un pincement au cœur, le souvenir de Fernand lui traversa l’esprit. Le notaire ne s’était plus présenté à la porte de la pension depuis sa conversation avec Elisabeth. Aucune journée ne passait sans qu’elle pense longuement à lui. Mais maintenant, la douleur faisait peu à peu place à une certaine sérénité.
    — Mais je ne possède aucune maison où faire des travaux.
    — Ne vous moquez pas de moi. Nous pourrions aller
    « aux vues », un de ces soirs.
    — Si vous me dites le titre de la «vue » et le jour choisi, je verrai si je suis libre.
    L’autre ne se soucia pas trop de la réplique ou du ton chargé d’ironie. Il savait représenter un bon parti pour elle.
    — Ce soir, je regarderai l’horaire dans Le Soleil. Demain, j’aurai tous les renseignements.
    — Alors, demain, je vous répondrai.

    Elle fit mine de s’éloigner, puis s’arrêta pour demander :
    -— Vous avez un

Weitere Kostenlose Bücher