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Thalie et les âmes d'élite

Thalie et les âmes d'élite

Titel: Thalie et les âmes d'élite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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blancs. Je me suis imaginé en Afrique, parmi les Nègres...
    Le garçon laissa échapper un rire bref, chargé d’ironie.
    — Ce projet tenait aux tentations de Chariot, bien sûr, au péché d’orgueil auquel je cède si souvent. Je suis bien trop lâche, bien trop impressionnable pour ce projet.
    — Et le sacerdoce ?
    — Je veux suivre l’exemple de sainte Thérèse. Elle a fait naître en moi de grands désirs de petitesse. Je rêve maintenant de vivre caché dans un cloître, aimant Jésus et n’opposant plus d’obstacles au flot de son amour, ne m’appartenant plus, laissant Jésus jouer avec moi, me caresser ou me repousser. Je veux abdiquer complètement ma volonté entre les mains de mes supérieurs, les représentants de Dieu.
    Cette insistance à s’effacer, à renoncer à son identité, revenait sans cesse dans sa bouche, sous sa plume. Une fois de plus, Thalie songea à la façon dont les religieuses décrivaient leur relation avec le Christ. Raymond ne pouvait se présenter comme son épouse sans provoquer des fous rires.
    Il empruntait donc cette formule un peu étrange, se faire son jouet. C’était à la fois semblable et différent.
    Minuit sonnerait bientôt. Comme le garçon paraissait serein, le médecin se garda bien de relancer la conversation.
    Elle se cala sur le dossier de sa chaise, ferma les yeux afin de se reposer un peu. Une heure plus tard, comme son patient semblait dormir, elle quitta la pièce pour s’étendre dans la chambre voisine, tout habillée.

    *****
    À sept heures, une main sur son épaule et le ton d’une voix attentionnée la tirèrent du sommeil.
    — Docteur Picard, si vous ne voulez pas être en retard au travail...
    Il lui fallut quelques minutes pour comprendre où elle se trouvait et reconnaître la religieuse. Sœur Sainte-Sophie était déjà à la tâche.
    — Comment se porte-t-il ?
    — Il dort encore paisiblement.
    — Je vais aller le voir...
    La religieuse secoua la tête de droite à gauche.
    — Je ne vous le recommande pas. Ma consœur m’a dit que vous étiez restée ici toute la nuit à sa demande. S’il désire maintenant que vous passiez la journée...
    Elle avait raison. Se laisser accaparer par un seul malade, c’était négliger tous les autres.
    — Aujourd’hui, vous serez au Jeffrey Hall, n’est-ce pas ?
    — Oui. Je dois y être à neuf heures.
    — Vous aurez le temps de vous changer, peut-être de prendre un bain.
    Le médecin s’était assis sur le lit. Ses chaussures se trouvaient sur le sol, elle les enfila en réprimant un bâillement.
    Devant
    son
    hésitation,
    sœur
    Sainte-Sophie
    plaida
    encore :
    — Vous pouvez me faire confiance, vous savez. Je ne suis pas inexpérimentée dans ce genre de situation.
    — Vous êtes plus expérimentée que moi. Alors, je vais suivre vos conseils.

Chapitre 24

    Peu après, Thalie marchait dans la rue Saint-Jean. Elle se planta près de l’arrêt de tramway, attendit une minute ou deux, puis renonça à se rendre à l’appartement de sa mère.
    Elle emprunta plutôt une rue perpendiculaire, lui permettant d’atteindre Saint-Cyrille. Quand elle sonna à la porte de son frère, à huit heures moins le quart, Mathieu leva les yeux vers sa femme.
    — Nous attendions quelqu’un ?
    — Même le laitier ne passe pas aussi tôt.
    L’homme se leva pour rejoindre le petit hall, ouvrit pour découvrir sa sœur.
    — Un peu plus tôt et tu me trouvais en sous-vêtements, du savon à raser sur tout le visage.
    — Cela n’aurait pas été la première fois. Je peux entrer ?
    Il s’effaça pour la laisser passer. Une fois dans la cuisine, elle embrassa Flavie, puis elle s’assit sur ses talons devant le berceau de l’enfant.
    — Toi, mon bel Alfred, ne laisse jamais personne te raconter des sottises. Ce qui se passe là vient avant tous les discours des hommes en noir.
    En disant cela, du bout des doigts elle le chatouilla à la hauteur du cœur. Le gazouillis et les mouvements mal coordonnés pouvaient passer pour un acquiescement.
    — Toi, tu as besoin d’un café, dit Mathieu. As-tu des difficultés au dispensaire ? Maman m’a dit hier soir que tu ne rentrerais pas.

    — Si un jour je découche pour un autre motif que le travail, grommela la jeune femme, toute la rue de la Fabrique sera sans doute alertée, sans compter l’archevêché et la police.
    — Elle est simplement un peu inquiète, et moi aussi, depuis que je vois ton visage défait.
    Sur ces mots, Mathieu posa une

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