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Thalie et les âmes d'élite

Thalie et les âmes d'élite

Titel: Thalie et les âmes d'élite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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mot.
    Arthur Rousseau se consacrait aux soins des tuberculeux depuis des années. Cet hôpital avait été créé grâce à ses efforts assidus.
    — Le docteur a certainement mieux à faire que de perdre son temps avec moi. Je souhaite seulement voir l’un de mes patients.
    L’autre feignit de ne rien entendre. Peinant pour garder son calme, Thalie attendit devant le comptoir. Un homme à la mi-cinquantaine élégante arriva bientôt.
    — Docteur Rousseau, je suis désolée. Je veux juste...
    — Venez avec moi, chère collègue.
    La voix très douce et les mots employés la calmèrent un peu. Elle n’avait d’autre choix que de le suivre, de toute façon. Dans son bureau, elle accepta de s’asseoir. L’homme retrouva son siège, puis commença, un peu embarrassé:
    — Ce matin, nous avons bien admis Raymond Lavallée.
    Il est arrivé en ambulance, accompagné de sa mère, ce qui est plutôt habituel, et du curé de sa paroisse, ce qui l’est moins.
    — Monseigneur Buteau.
    — Vous le connaissez? Je veux dire, sur une base personnelle.
    — C’est mon oncle.
    Son interlocuteur leva les sourcils, surpris. Cette histoire prenait une curieuse tournure.
    — A voir votre réaction, ricana Thalie, je devine que mon oncle Emile n’a pas montré toute la délicatesse habituelle dans les rapports entre membres d’une même famille.
    — En réalité, je ne lui ai pas dit un mot. Il s’est adressé à sœur Marie-Auxiliatrice. Celle-ci m’a fait part de son désir... de prévenir les contacts entre vous et notre nouveau patient.
    — Grands Dieux ! Et pour quelle raison ?
    — Elle ne paraissait pas encline à s’expliquer. D’après ce que j’ai compris, à votre contact, Raymond Lavallée pourrait devenir... mentalement instable.
    Thalie eut envie de lui demander si la religieuse n’avait pas plutôt prononcé «moralement dépravé». Mais tenter d’extirper des informations à cet homme serait indélicat.
    Il était pris dans une histoire à laquelle il ne comprenait rien.
    — Sœur... Marie-Auxiliatrice, avez-vous dit, obéissait à une directive du prélat domestique, je suppose.
    — Elle n’a rien dit de cela, mais je crois que vous avez raison.
    — Comme cette sainte femme a fait vœu d’obéissance, la vue d’une soutane violette l’a sans doute transformée en un chien de garde féroce.
    L’homme se raidit un peu devant le choix des termes, mais intérieurement, il lui donnait raison. Cette histoire lui paraissait
    bien
    mystérieuse.
    Pareille
    méfiance
    à
    l’égard de la charmante jeune femme devant lui le laissait perplexe.
    — Pouvez-vous me dire ce dont il s’agit? demanda-t-il.
    Je m’y perds un peu.
    — Avez-vous examiné vous-même ce garçon ?
    Le changement abrupt de sujet le dérouta.
    — Oui, je l’ai vu dans l’heure suivant son arrivée.
    — Avez-vous remarqué quelque chose en haut de la cuisse droite ?
    Le visage de son interlocuteur exprima une certaine surprise, puis il acquiesça, songeur.
    — Si je vous demande maintenant ce que Raymond Lavallée, sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et Dominique Savio ont en commun, que diriez-vous ?
    Le docteur Rousseau la contempla un long moment.
    — En fait, il y a deux points communs entre eux, l’aida-t-elle.
    — La tuberculose ?
    — Voilà le premier. Ces trois personnes ont aussi été identifiées très tôt comme étant des candidats à la sainteté. Et je pourrais ajouter que les trois mourront jeunes.
    Le médecin comprit alors toute la signification du cilice en haut de la cuisse du garçon.
    — Je prédis donc que mon oncle viendra ici avec régularité afin de le préparer à une bonne mort. Le bonhomme ne veut pas perdre son saint enfant. Il entend me priver de le voir afin que je ne ruine pas son projet. A ses yeux, je représente une très mauvaise influence.
    Les événements de la journée prirent tout leur sens pour Rousseau. L’entêtement de la directrice à interdire les lieux à cette jeune femme aussi. À contrecœur, la religieuse avait accepté qu’il lui explique la situation de vive voix. Son premier mouvement à elle aurait été de lui fermer la porte au nez.
    — Je devine que vous n’irez pas à l’encontre des directives de monseigneur Buteau, remarqua Thalie.
    — Je n’irai pas à l’encontre des directives de ma directrice.
    Ce professionnel réputé, âgé de cinquante-quatre ans, ne souhaitait pas irriter les ecclésiastiques de la province.
    La moindre insubordination

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