Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Thalie et les âmes d'élite

Thalie et les âmes d'élite

Titel: Thalie et les âmes d'élite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
Vom Netzwerk:
dire, souffla-t-il.
    — Tuberculose.
    L’homme acquiesça d’un signe de la tête.
    — Les deux poumons ?
    De nouveau, un hochement fit office de réponse.
    — Le bruit dans le stéthoscope ne faisait pas l’ombre d’un doute.
    L’homme observait attentivement sa collègue. Jolie, la petite brunette offrait un visage tout chiffonné, des yeux rougis par une heure de pleurs. Elle portait une robe foncée et sobre, un peu plus longue que la mode l’autorisait pour une personne de son âge.
    — J’ai lamentablement échoué, glissa-t-elle en fixant le bout de ses chaussures.
    Elle ressemblait à une élève prise en faute, contrainte de confesser un forfait.
    — Tu sais établir le bon diagnostic, répondit-il. Nous en avons la preuve.
    Riche de ses cinq ans de pratique professionnelle, Georges-Henri Courchesne assumait volontiers le rôle de mentor auprès d’elle. Pas très grand et replet, le visage orné d’une grosse moustache, il s’agissait d’un homme attachant.
    — Je me suis enfuie de sa chambre, je l’ai abandonnée à l’horreur de cette affreuse nouvelle. Elle est restée là, à côté, sans personne pour lui tenir la main.

    — Une religieuse est restée près d’elle. C’est le travail de nos infirmières, pas le nôtre.
    — Mais je me suis sauvée pour me cacher ici et brailler comme une Madeleine.
    — Cela se voit. Tu devrais moucher ton nez.
    Elle écarquilla les yeux, puis fit comme on lui disait.
    — Tu as même dû aller lui parler à ma place, grommela Thalie. J’ai complètement failli à ma tâche.
    — Tu as pensé à t’arracher les cheveux, à te fouetter un peu comme le font les pénitents ?
    L’homme mima le geste de se donner un grand coup dans le dos avec des lanières plombées.
    — Je ne peux pas me dérober à mon devoir, tout de même.
    Annoncer ce genre de nouvelle fait partie de notre travail.
    — Tu as raison. La prochaine fois, et crois-moi les occasions ne manquent pas ici, tu y feras face. Je suis même certain que tu trouveras tout naturellement les mots.
    — Tu l’as regardée ? Une enfant. En plus, elle est venue toute seule ici.
    — Elle travaille dans un atelier de la Basse-Ville depuis juin. Ses parents vivent à la campagne. Les religieuses contacteront le curé ce soir. Il leur annoncera la nouvelle.
    Elle hocha la tête, appréciant son efficacité et celle du personnel infirmier.
    — Je ne peux accepter de voir une fille si jeune dans cet état... Elle va mourir, n’est-ce pas ?
    — Sans doute. Les poumons étaient totalement voilés sur les clichés. D’un autre côté, on ne sait jamais. Nos pronostics ne sont pas infaillibles.
    — Si je suis totalement anéantie à chaque fois qu’une telle situation se présente, je ne durerai pas un an dans ce métier.

    Depuis une heure, la jeune femme se demandait si ses années d’efforts ne constituaient pas un misérable gaspillage.
    Toutes ses grandes phrases magnifiant la vocation de soigner lui paraissaient soudainement très creuses.
    — De mon point de vue, remarqua Courchesne, je suis plutôt heureux de partager ce travail avec une personne compatissante au malheur des autres. Vous êtes humaine, docteur Picard. Bienvenue parmi nous.
    Il ne la vouvoyait que sous la mention de son titre. Leurs rapports étaient bien vite devenus familiers. La répartie força Thalie à lui adresser un premier véritable sourire depuis le début de leur entretien.
    — Tu me fais du bien, confessa-t-elle, mais je me sens un peu nulle ce soir.
    — Voilà le syndrome de la première de classe.
    — Pardon ?
    — Une première de classe souhaite toujours incarner la perfection. Cela finit par être paralysant. De mon côté, comme je n’ai jamais été premier, je n’exige qu’une chose de moi: faire de mon mieux. Cela me donne le droit à l’erreur.
    Lui aussi, constata la jeune femme, savait poser un diagnostic exact.
    — La prochaine fois, chuchota-t-elle, je risque de nouveau de rester muette devant un malade condamné.
    — Si cela se produit, prends-lui la main et ferme-la.
    — Et si je me remets à pleurer?
    — Si les nouvelles sont franchement mauvaises, vous serez deux à le faire.
    Cette fois, elle éclata de rire. Dans une certaine mesure, cet homme lui rappelait son grand frère. Si certains tentaient de lui
    nuire
    professionnellement,
    plusieurs
    autres

    adoptaient une attitude protectrice.
    — Merci de tes bons mots. Je me sens un peu mieux...
    beaucoup mieux même.
    — Au

Weitere Kostenlose Bücher