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Thalie et les âmes d'élite

Thalie et les âmes d'élite

Titel: Thalie et les âmes d'élite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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décrépit, une salle voisine accueillait un appareil
    de
    radiographie,
    équipement
    essentiel
    pour
    diagnostiquer la maladie de la misère que les journaux désignait sous le nom de «peste blanche».
    L’énorme machine ajouta encore un peu au désarroi de la malade.
    — Vous allez devoir découvrir votre poitrine, dit Thalie en cherchant son stéthoscope dans son petit sac noir.
    Si le docteur Pouliot avait été là, il aurait pu apprécier combien une présence féminine devenait importante pour certaines patientes. Celle-là serait morte de honte à l’idée de se dévêtir devant un homme. Le médecin promena longuement son stéthoscope sur la poitrine juvénile, émue par la maigreur et la fragilité de sa cliente. Sans surprise, elle capta le chuintement caractéristique de son état. Puis, des yeux, elle interrogea la religieuse.
    — Nous pouvons y aller, déclara celle-ci en glissant les plaques sensibles dans l’appareil.

    — Je vais passer à côté, murmura Thalie. Tout à l’heure je n’ai pas bien compris votre nom.
    — Jeannette...
    — Eh bien, Jeannette, nous nous reverrons dans une minute.
    Le docteur Picard se dissimula derrière une cloison pendant que la religieuse plaçait la jeune fille devant un appareil rappelant vaguement un gros canon. Délicate, nue jusqu’à la taille, elle réprimait un frisson malgré la chaleur de la soirée qui commençait. Dans la pièce attenante, adossée contre le mur et les yeux fermés, la thérapeute entendit le bruit de la prise du premier cliché, puis du second.
    A son retour dans la pièce, sœur Sainte-Sophie reposait le lourd tablier en plomb sur une table. Elle prit la camisole abandonnée sur une chaise, aida la jeune fille à l’enfiler et fit la même chose avec le chemisier.
    — Nous avons toujours une chambre de disponible?
    demanda Thalie à l’intention de la religieuse.
    — Oui, répondit-elle.
    Le dispensaire comptait trois chambres individuelles, un luxe inouï, alors que les vrais hôpitaux entassaient les malades dans de grands dortoirs, à moins d’appartenir à une classe de privilégiés. Cela tenait encore à la vocation première de la bâtisse. Les box des chevaux ne fournissaient pas seulement des bureaux d’une taille acceptable; un lit, une table de chevet et une chaise y logeaient parfaitement.
    — Venez avec moi, dit Thalie. Vous pourrez vous étendre en attendant le développement des films. Ce sera plus confortable que la salle d’attente.
    Elle la soutint jusque dans une petite pièce voisine, blanchie à la chaux elle aussi. La jeune femme fixa les yeux sur le grand crucifix noir où figurait un Christ en bronze, pendu juste en face du lit étroit. Cet élément du décor paraissait infiniment morbide à l’omnipraticienne, un avis qu’elle gardait soigneusement pour elle.
    — C’est la consomption, bredouilla Jeannette en s’étendant sur la couchette.
    Comme le médecin ne desserrait pas les lèvres, elle insista :
    — C’est ça, n’est-ce pas ?
    — ... Il faut attendre le développement des films.
    Mal à l’aise, debout près du lit, l’autre posait des yeux fiévreux sur elle. Quand les paupières se fermèrent enfin, Thalie dit dans un souffle :
    — Je vais être à côté, à deux pas.
    La malade hocha très légèrement la tête. Ce geste valait une autorisation à prendre la fuite. Alors que le médecin se réfugiait dans son bureau, une nouvelle religieuse entra dans le couloir donnant accès aux box.
    — Ma consœur m’a avertie. Je vais lui tenir compagnie.
    Ses yeux examinèrent le visage défait de la jeune femme, puis elle précisa :
    — Je ferme votre porte. Je vais aller demander au docteur Courchesne de la rencontrer tout à l’heure.
    Incapable d’émettre un son, Thalie abdiqua. Lorsque le pêne claqua dans son logement, elle éclata en sanglots.

    *****
    Une heure plus tard, elle occupait toujours son bureau.
    Sœur Sainte-Sophie était venue lui dire un mot avant de rentrer au couvent. A cette heure, une nouvelle équipe de religieuses prenait le relais. La sœur avait pris la gentille initiative de téléphoner à l’appartement de la rue de la Fabrique pour avertir la mère du retard de sa fille. Marie s’inquiétait au moindre délai.
    Un peu avant sept heures, trois petits coups se firent entendre à la porte. Le docteur Courchesne entra dans le bureau, referma derrière lui puis vint s’asseoir sur la chaise réservée aux patients.
    — Je viens de le lui

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