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Thalie et les âmes d'élite

Thalie et les âmes d'élite

Titel: Thalie et les âmes d'élite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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heures en soirée, ce cabinet permet d’occuper trois médecins. Mais si je devais réduire ce nombre à deux, je garderais avec moi le plus compétent de mes collaborateurs actuels. Sachez, en toute honnêteté, que ce ne serait pas vous.
    Pouliot accusa difficilement le coup, même s’il avait déjà remarqué la nette préférence du docteur Caron pour sa consœur. Depuis quelques semaines, c’était avec elle que le vieux praticien prenait plaisir à discuter de ses cas les plus difficiles.
    — Je veux bien oublier que nous avons eu cette conversation, conclut le patron. Je vais maintenant aller manger un peu. Et si la situation ici vous paraît intenable, je vous rappelle que
    nous
    pouvons
    tous
    les
    deux
    rompre
    notre
    association avec un préavis de quatre semaines. Je vous souhaite une bonne journée.
    Le jeune médecin resta quelque peu figé puis il se leva et marcha vers la porte. En sortant, il répondit d’une voix soumise :
    — Bonne journée à vous aussi, docteur Caron.
    Après tout, son aîné jouissait d’une bonne réputation dans la profession. S’en faire un ennemi pourrait lui nuire.

Chapitre 8

    La journée s’achevait au dispensaire des pauvres. Entre deux patients, enfermée dans son box, Thalie avait avalé le sandwich préparé par Gertrude. Un peu avant cinq heures, elle se rendit à l’accueil et reconnut sa première patiente du matin dans la salle d’attente.
    — Je peux vous aider? demanda-t-elle.
    — ... Non, non merci.
    Les joues en feu, la jeune femme détourna les yeux, affecta de se passionner pour le jeu des mouches sur le mur blanc. Celles-là rappelaient toujours la vocation première de l’édifice. Elles s’entêtaient à rester, malgré tous les nettoyages en profondeur.
    Le médecin interrogea sœur Sainte-Sophie du regard.
    Discrètement, la religieuse pointa l’index vers le box du second médecin œuvrant dans le dispensaire. Thalie secoua la tête de dépit.
    — Nous avons assez à faire, et en plus il faut perdre son temps.
    La responsable de son mouvement d’humeur ne broncha pas. — Comme les choses sont entre de bonnes mains, continua-t-elle d’un ton plus amène, je vais rentrer à la maison.
    — Je vous souhaite donc une bonne soirée, lui dit sœur Sainte-Sophie.

    — De votre côté, allez vous reposer un peu.
    La religieuse répondit d’un sourire à tant de sollicitude.
    La quarantaine à peine entamée, son uniforme ingrat ne suffisait pas à faire oublier qu’elle avait été, et demeurait toujours, une très jolie femme.
    Thalie passa la grande porte et s’engagea dans la rue Simard. Bientôt, elle aperçut une jeune fille de dix-huit ans à peine appuyée contre un poteau de téléphone, secouée par une quinte de toux.
    — Je vais vous aider, dit-elle en la prenant par les épaules.
    — Je vais là, répondit l’autre en pointant le dispensaire.
    Thalie remarqua un mouchoir roulé en boule dans la main de la malade. Le début du mois d’août infligeait à plusieurs un vilain rhume.
    — Je vais vous guider.
    En la tenant sous le coude, elle l’accompagna jusqu’au bureau de la réception.
    — Vous n’avez pas été longtemps partie, remarqua la religieuse, un sourire en coin sur les lèvres.
    — Voici une nouvelle patiente. Je lui ai proposé de la conduire jusqu’à vous.
    Sœur Sainte-Sophie prit une fiche dans une petite boîte en bois et la posa devant elle en remarquant :
    — Votre soupe sera froide.
    Thalie haussa les épaules, les yeux sur les traits pâles de la nouvelle venue.
    — Votre nom ? demanda la réceptionniste en trempant sa plume dans l’encrier.
    — Jean...
    Les syllabes suivantes se perdirent dans une nouvelle quinte de toux. Dans la salle, les autres malades fixèrent sur elle un regard inquiet.
    — Oh ! Je vous demande pardon, balbutia la jeune fille.
    Elle n’avait pas eu le temps de porter son mouchoir devant sa bouche.
    Une
    goutte
    d’un
    vermillon
    clair
    tachait
    maintenant la fiche.
    — Ce n’est rien, répondit sœur Sainte-Sophie en regardant Thalie.
    La jeune omnipraticienne examinait les lèvres exsangues de la malade. Un peu de sang les colorait maintenant.
    — Nous allons remettre l’inscription à plus tard, décida Thalie. Passons tout de suite à la radiographie.
    Des yeux, elle sollicita l’aide de la religieuse. Celle-ci fit disparaître la fiche souillée dans une poubelle, puis quitta son siège pour les accompagner. Luxe bien improbable dans un endroit aussi

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