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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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pour le nahtamats.
    Ce qu’elle lut alors sur mes traits la poussa à
préciser :
    —  Ja, nous consommons toujours nos sœurs
disparues. Un jour, mon tour viendra… tout comme le tien. C’est notre façon de
hâter le chemin des Walis-karja vers leur bienheureuse existence dans
l’au-delà, en compagnie de Tabiti et d’Argimpasa. Il est évident que plus vite
leurs restes seront dissous, plus rapide sera leur voyage vers l’immortalité.
Rien de tel pour cela que de les ingérer, plutôt que d’attendre leur lente
décomposition après inhumation. Et ainsi, il n’y a aucun risque qu’un homme
vienne déterrer le corps d’une de nos sœurs pour la violer.
    Nulle horreur, me direz-vous, ne pouvait plus désormais
m’étonner de ce que me révélaient les Walis-karja. Mais après tout,
elles n’avaient pas été les premières à pratiquer l’anthropophagie. Le vieux
Wyrd ne m’avait-il pas raconté que les Scythes la pratiquaient eux aussi ?
Ils avaient sans doute transmis cette coutume aux aïeules de ces femmes. Et nul
n’ignorait l’histoire d’Achille, héros de la guerre de Troie, qui non content d’avoir
vaincu et tué Penthésilée, la reine des Amazones, l’avait déshonorée post
mortem d’une relation charnelle avec son cadavre. Cela dit, j’avais dans
l’idée que même morte, Penthésilée avait été plus attirante que Roshan bien
vivante.
    — Tu devrais te mettre au travail sans délai, Veleda,
m’enjoignit Mère Amour. Crois-en mon expérience, un tel plat est assez long à
préparer. Vois de quel œil affamé les enfants lorgnent déjà dessus. Dès que tu
en auras fini avec la tête, Shirin, aide Veleda à découper le corps et à en
attendrir la chair.
    Je ne m’étendrai pas sur les détails de la préparation
culinaire qui fut nécessaire. On m’avait au moins épargné la peine de séparer
la tête du corps. Mais lorsque je m’apprêtai à jeter les gros morceaux de
graisse jaunâtre que j’avais extraits des cuisses et du ventre, Shirin, mon
assistante, me regarda d’un air effaré.
    —  Vái, Veleda, mais c’est ce qu’il y a de
meilleur ! La chair rouge est dure et filandreuse, alors que cette graisse
va venir rembourrer nos corps. Roshan aurait été ravie que son gras profite à
ses sœurs.
    Un instant plus tard, Shirin me réprimanda de nouveau :
    —  Ta, ta, ta ! Ne nous jette pas non plus
ces morceaux-là, malheureuse. Bien cuits, ils seront délicieux à mâcher.
    Je renonce à préciser la nature de ces morceaux. L’on
m’autorisa tout de même à ôter les morceaux irrémédiablement inconsommables
tels que les ongles d’orteils, les touffes de poils poussant sous les aisselles
et les entrailles les plus nauséabondes. Puis Shirin me montra le trou dans lequel
la tribu gardait ses maigres réserves de légumes et de hanaf séché.
J’ajoutai à la viande hachée et découpée un peu d’oignon sauvage et de cresson,
et la parfumai de feuilles de laurier. Je n’avais bien sûr pas la moindre
intention de partager cette écœurante collation, non seulement en raison de sa
nature même, mais aussi et surtout à cause de ce que j’y ajoutai lorsque les
chaudrons furent prêts à bouillir sur les braises, dès que Shirin m’eut laissée
seule avec pour mission de touiller la préparation.
    Je pris soin d’émietter et d’éparpiller dans les marmites
bouillonnantes les plantes que j’avais ramassées sur la berge, et que j’avais
mises à sécher. Je connaissais de longue date les effets de stupéfiant de la
buglosse, et comme le vieux Wyrd m’avait un jour expliqué que la jacobée
pouvait rendre fou un cheval, j’utilisai les deux, sans restriction. En
présence de palais plus raffinés, j’eusse probablement hésité à employer ces
mauvaises herbes au goût amer assez prononcé, mais j’étais persuadée que ces
omnivores n’y verraient que du feu.
    D’ailleurs, ces dames arpentaient déjà la clairière
assombrie en se pourléchant les lèvres par anticipation, et les plus jeunes
filles en bavaient littéralement. Certaines, tout en humant voluptueusement le
fumet montant des chaudrons, échangeaient des remarques spirituelles et
pouffaient de rire, faisant remarquer entre autres que leur sœur Roshan,
récemment flétrie de la délicate appellation de « truie », fleurait
désormais aussi bon qu’un sanglier en pleine cuisson.
    Lorsque le repas fut presque prêt, Ghashang vint avertir
Mère Amour que le nouvel esclave

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