Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
Vom Netzwerk:
envie
envers moi-même ? »
    Au même instant, une de nos patrouilles passait par là, en
formation impeccable. De la façon la plus réglementaire, les hommes saluèrent
mon armure de maréchal, mais cela ne les empêcha pas de jeter un étrange regard
à celui qui la portait. Quand ils se furent éloignés, je me mis à rire de mes
égarements aussi contradictoires que lunatiques et me dis en mon for
intérieur : « Après tout, à quoi bon évoquer un futur aussi
incertain ? La déesse Fortune, Tykhe ou une autre divinité de la destinée
ont peut-être déjà décidé que Thorn, Théodoric et Veleda tomberaient à la
prochaine bataille. »
     
    *
     
    Bien entendu cela n’arriva pas, ni dans la bataille
suivante, ni dans celles qui eurent lieu plus tard. En vérité, celles-ci furent
presque des formalités et ne s’éternisèrent pas, faisant aussi peu de dégâts
d’un côté que de l’autre. Les légions romaines, privées de leur général en chef
et abandonnées par leur roi, étaient bien évidemment contrariées et
découragées. Aucune ne vint nous affronter durant notre progression vers le sud
de la Péninsule. Lorsque nous atteignîmes leurs positions de défense et leur
adressâmes notre hautaine mise en demeure : « le tribut ou la
guerre », elles n’opposèrent que la résistance nécessaire pour pouvoir
arguer par la suite qu’elles ne s’étaient pas inclinées sans combattre. En
réalité, elles s’étaient bel et bien rendues.
    À la fin août de cette même année, nous nous trouvâmes
effectivement maîtres de la totalité de l’Italie – à l’exception de
Ravenne, asile d’Odoacre –, bien que Théodoric ait choisi de stopper notre
avance sur la ligne est-ouest constituée par la Via Aemilia, à mi-distance
entre la frontière orientale de Vénétie et la cité formant le cœur de l’Italie,
Rome. Il entendait séjourner là pour l’hiver afin de faciliter les allées et
venues de ses messagers, les questions d’ordre administratif primant désormais
sur la conquête. Dans les principales cités que nous avions soumises, Théodoric
avait laissé des détachements de nos forces ; il en envoyait à présent
d’autres s’assurer des villes plus petites et devait ménager entre celles-ci
une communication efficace et rapide.
    Zénon était toujours au plus mal – entre la vie et la
mort, disaient les rapports en provenance de Constantinople –, mais nul
successeur impérial ou régent n’avait été mis en place. Théodoric ne pouvant
être officiellement proclamé roi de Rome, il refusait vertueusement de
s’arroger les pouvoirs de cette charge et ne pouvait donc promulguer les lois
ni exercer l’autorité nécessaire pour gouverner correctement ses conquêtes. Il
pouvait cependant imposer le jus belli [108] . Il le
fit, édictant un certain nombre de règles destinées à maintenir l’ordre et à
permettre la conduite des affaires civiles. Les principes qu’il instaura
n’avaient rien de rigoureux ; à ce titre, ils surprirent agréablement ses
« sujets nouvellement conquis », préfigurant le despotisme éclairé
qui caractériserait plus tard la gouvernance de Théodoric.
    Pour ce qu’ont pu m’en apprendre mes lectures relatives à
l’histoire du monde, tous les grands conquérants qui avaient précédé Théodoric
(Cyrus Alexandre, César et bien d’autres) avaient écrasé de leur mépris les
peuples soumis. Ces vainqueurs n’avaient eu de cesse d’imposer aux vaincus
leurs propres idées sur ce qui était bon et ce qui ne l’était pas, non
seulement en matière de lois et de gouvernement, mais aussi sur tout ce qui
pouvait concerner leur conduite, leurs croyances, leur culture, leurs coutumes
et leurs goûts. Théodoric s’en garda bien. Loin de prendre de haut les
habitants de ce qui avait été le puissant Empire romain d’Occident, il honora
et admira leur héritage culturel et fit savoir à tous, dès le début qu’il
entendait restaurer leur grandeur passée.
    Ainsi, il aurait pu sembler légitime, de la part du
conquérant, qu’il révoquât tous ceux qui avaient servi son prédécesseur vaincu.
Théodoric n’en fit rien. Pour la période qui s’ouvrait, au moins, il décida de
laisser en place dans toutes les provinces et les villes occupées les légats et
préfets romains qui avaient officié sous Odoacre, partant du principe qu’un
gouvernant nanti d’une certaine expérience assurerait toujours un service de
meilleure

Weitere Kostenlose Bücher