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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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bien compris, ramènent-ils des biens quelconques, obtenus en échange du
précieux sel qu’ils ont livré ?
    — Oh, eh, Saio Thorn ! s’écria-t-il
jovialement. Vous essayez de m’avoir, en me faisant avouer qu’on fait la
sieste, pas vrai ?
    Toujours aussi conciliant, il reprit une gorgée de vin.
    — Non, non. Toutes les mules qui repassent ici sont
totalement à vide. Ce que ces transporteurs ont obtenu pour leur sel, ma foi je
l’ignore : des traites réglables ultérieurement, j’imagine. Mais ils n’ont
rien acheté d’autre, je peux vous le certifier. D’ailleurs comment le
pourraient-ils ? S’ils rentraient d’Ariminum porteurs de marchandises, mon
homologue chargé de la ligne de siège au sud aurait tôt fait de les arrêter
pour les en délester. Il n’aurait garde de les laisser entrer dans Ravenne,
qu’ils refilent ces denrées à Odoacre et ses alliés. Rendez-vous compte ;
ça créerait une brèche dans le siège, un tel apport de provisions à
l’ennemi ! Mais bon, puisque ces convois arrivent vides jusqu’ici, ça
prouve que là-bas comme ici, les ordres du général Herduic ont été
scrupuleusement respectés.
    Lentinus et moi-même échangions des regards désespérés,
reportant nos yeux consternés sur ce balourd mal dégrossi, ce pitoyable nauthing sans une once de jugeote qui par ses rodomontades pontifiantes, avait si
ingénument ruiné le siège.
    — Juste une petite chose, ajoutai-je, d’avance édifié
par ce qu’il allait me répondre. Vous est-il arrivé, centurion, d’inspecter le
contenu de ces ballots de sel, avant de les laisser franchir vos lignes ?
    Il ouvrit les mains et sourit.
    — La première fois, maréchal, oui… et les deux ou trois
premiers sacs… Vous savez, le sel, c’est du sel, hein ! Et c’est lourd,
j’aime autant vous le dire. Une pitié pour ces pauvres mules, obligées de
tituber sur de si longs trajets, ployant douloureusement sous de telles
charges. Après les deux ou trois premières, vous avez pitié d’elles, de devoir
ainsi les délester de leurs fardeaux pour les inspecter avant de les en
accabler à nouveau. Sur le dos de ces pauvres bêtes, c’est aussi lourd que…
    —  Benigne, centurion, merci. Thags izvis pour ce vin, ce fromage et votre édifiant exposé sur le commerce du sel.
    Je me levai et, d’une perche de la tente où elle était
pendue, décrochai sa ceinture d’épée, emblème de son office.
    — Vous êtes relevé de votre commandement et mis aux
arrêts.
    Occupé d’avaler une gorgée de vin, il se mit à tousser et à
recracher.
    Avancé sur le seuil de la tente, je convoquai en hurlant le
commandant en second. C’était un optio nommé Landerit. Il réagit
promptement quand je lui ordonnai de s’assurer de la personne de Gudahals puis
de mettre sur pied un corps d’armée prêt à arrêter et à retenir le prochain
convoi de mules qui se présenterait sur la Via Popilia, de quelque direction
qu’il vienne.
    — Je mériterais autant que lui d’être arrêté et démis
de mes fonctions, grogna Lentinus, écœuré de lui-même.
    — Que faudrait-il dire de moi ? répliquai-je.
Pouvions-nous cependant prévoir un maillon aussi faible dans la chaîne ?
    Dans un piteux accès d’humour, j’ajoutai :
    — Vous n’êtes ici qu’un observateur neutre, vous vous souvenez ?
Nous n’avons donc aucune autorité légale pour nous arrêter l’un l’autre.
    Il cracha un juron.
    — Faut-il que nous nous jetions chacun sur notre
épée ?
    — Tâchons plutôt de tirer le meilleur parti de ce coup
de dés que la Fortune vient de jeter. Voici ce que je propose…
     
    *
     
    Deux jours plus tard :
    — Qui a envoyé ces choses ? demandai-je
impérieusement au chef du convoi.
    Je frappai du pied une pile de victuailles –
principalement de la viande macérée dans le vinaigre et des outres
d’huile – que l’ optio Landerit et ses gardes avaient trouvées
dissimulées dans les ballots de sel. Le muletier était pâle comme la mort et
tremblait, mais il répondit néanmoins d’une voix forte :
    — Le directeur de la mine de sel d’Haustaths.
    Je m’en étais à moitié douté, mais je n’aurais pas su qui
était l’homme que j’avais devant moi s’il n’avait ajouté :
    — Mon père.
    — J’aurais cru Georgius Honoratus trop vieux, fis-je
remarquer, pour se livrer à des jeux aussi dangereux.
    Le jeune homme sembla plus que surpris de m’entendre prononcer
ce

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