Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Thorn le prédateur

Thorn le prédateur

Titel: Thorn le prédateur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
Vom Netzwerk:
compris entre le
gémissement et le grognement, et du bruit d’une brève échauffourée. Je me mis à
courir et trouvai Wyrd debout tenant son poignard à la main, la lame
ensanglantée. Il contemplait d’un regard morose la forme sans vie, étendue à
ses pieds, d’une superbe louve qu’il venait de tuer.
    — Que se passe-t-il ? demandai-je. Je vous pensais
l’ami des loups.
    — Je le suis, rétorqua Wyrd sans quitter des yeux
l’animal. Celui-ci a tenté de m’attaquer.
    Il avait bondi, pour autant que je puisse en juger, avec
autant de férocité que de soudaineté, car je vis sur les jambières lacées de
Wyrd une sanglante éclaboussure qui ne lui ressemblait pas. En effet, il abattait
toujours ses proies de façon propre et nette, fut-ce un sanglier en train de
charger.
    — Je pensais également qu’un loup n’attaquait jamais
l’homme, ajoutai-je perplexe. Ne me l’avez-vous pas dit ?
    — Celui-ci était malade, expliqua-t-il d’une voix triste.
Cette louve était atteinte d’une maladie que je connais. Elle serait morte dans
d’horribles convulsions. En la tuant, je n’ai fait qu’abréger ses souffrances.
    Wyrd semblait si ému que je me gardai de l’interroger au
sujet de cette affliction, et me contentai de noter :
    — Au moins, vous l’avez tuée avant qu’elle ne s’attaque
aux chevaux.
    —  Ja , acquiesça-t-il d’un ton où perçait
toujours une grande mélancolie.
    Puis il ébouriffa d’un geste presque violent sa tignasse et
sa barbe, ajoutant.
    — Pendant que je vais rincer ma lame et me laver,
gamin, emporte le bois mort un peu plus loin le long du ruisseau, s’il te
plaît. Je n’aurai pas le cœur de passer la nuit si près de l’endroit où est
morte cette pauvre créature.
    Un peu plus tôt, j’avais abattu un lièvre à la fronde.
Tandis que nous le mangions, grillé à la broche et bien relevé de sel,
ingrédient particulièrement bon marché dans toute la région, je fis
remarquer :
    — Vous savez quoi, fráuja  ? Ce vieux
Winguric que nous avions tous deux rencontré cet hiver : il disait
vrai ! Il avait simplement interverti nos deux destins. Car c’est vous qui
avez tué un ami, et non moi.
    Cette réflexion ne suscita même pas un grognement. Pensant
qu’il était piqué d’avoir mésestimé les oracles et autres divinations, je le
taquinai :
    — Oh, vous avez bien dû lui troubler un peu les sens,
en éternuant de façon aussi extravagante…
    Il ne répliqua pas plus à cette saillie qu’à la précédente,
et je me rendis compte que je manquais de tact et de délicatesse. Il semblait que
Wyrd avait autant de peine pour cette louve que j’en avais eue pour mon juika-bloth. Je mis un terme à mes réflexions, et nous passâmes le reste du repas
silencieux. Le lendemain matin, Wyrd était pourtant redevenu lui-même :
bourru, sarcastique et mordant, et notre journée au sein de ces bois fabuleux
fut agréable et détendue.
    J’avais déjà vu de bien belles choses en cours de route,
mais tout cela pâlit soudain dans ma mémoire quand je découvris notre
destination. Un jour, vers midi, nous franchissions le col d’un assez haut
relief alpin quand Wyrd tira les rênes de son cheval pour s’arrêter et fit un
large geste vers ce qui s’étendait sous nos yeux, spectacle qui me coupa le
souffle.
    —  Haustaths, dit fièrement Wyrd. La Vallée aux
Échos.

 
24
    Au cours de ma vie, j’ai vu Roma Flora et Constantinople
Anthusa, dont les surnoms en latin et en grec signifient tous deux « la
florissante », et il est vrai que ce sont de somptueuses cités. J’ai vu
aussi Vindobona [80] , la seconde cité la plus ancienne de l’Empire
après Rome, et j’ai vu Ravenne, ainsi que d’autres villes historiques. J’ai
exploré les terres bordant le Danuvius, de la mer Noire à la Forêt-Noire, et
pris le bateau sur la Méditerranée comme sur l’océan Sarmatique [81] .
En somme, je connais davantage le monde que beaucoup n’en auront jamais
l’occasion. Mais je repense toujours à l’Haustaths comme à l’endroit le plus
ravissant et le plus beau que j’ai pu voir sur cette terre.
    Depuis la montagne d’où Wyrd et moi la découvrions, la
Vallée aux Échos avait l’air d’un bol oblong enchâssé dans les Alpes, et
contenant de l’eau en son creux. Cette eau était un lac, et il devait être très
profond, à en juger par la pente de ses flancs qui, plongeant quasiment à la
verticale dans sa surface, devaient

Weitere Kostenlose Bücher