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Toulouse-Lautrec en rit encore

Toulouse-Lautrec en rit encore

Titel: Toulouse-Lautrec en rit encore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Alaux
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l’argent ?…
    — … ou des tableaux ! avança Théo sur un ton mystérieux.
    — Vous imaginez ce sourd, un peu ollé, ollé, prendre le risque de… Non, vous avez raison, c’est plutôt une histoire de fesses… Notez, Théo, que les auteurs de cette lettre sont au moins deux. Ils écrivent « Nous… » dans leur ultime avertissement.
    — D’anciens amants de Dupuy ? avança Trélissac qui engloutissait ses radis chauds au foie salé avec un appétit proche de la goinfrerie.
    — Que faisons-nous de cette lettre ? C’est une pièce à conviction pour le moins capitale ! renchérit Cantarel.
    — À moins que ce ne soit un leurre échafaudé par Dupuy pour se disculper ?
    — Vous lisez trop de romans policiers, Théo !
    — L’historien de l’art que vous êtes m’a toujours appris : thèse, antithèse !
    — Avocat du diable, vicieux, audacieux et d’une incorrigible curiosité : j’aime vos défauts, Théo !
    — Pas autant que les radis chauds !
    Les clients de l’hostellerie Rieux – ainsi parlaient les gens d’Albi pour désigner l’ Hostellerie Saint-Antoine qui appartenait depuis des lustres à la famille Rieux dont le grand-père Jean avait été chansonnier dans les cabarets de Montmartre bien longtemps après que Toulouse-Lautrec eut disparu – semblaient manigancer, à coups de gaillac doux et de sourires entendus, un complot de la plus grande importance.
    — Il faut sonder Coustot. Ce sera du donnant-donnant. S’il nous informe de l’avancement de son enquête, nous n’avons aucune raison de faire cavaliers seuls.
    — Vous avez raison, Théo !
    Leur appétit guère mis à mal, les deux hommes ne se satisfirent pas des radis chauds au foie salé de la maison Rieux, ils s’octroyèrent deux belles tranches de roquefort avec le fond de gaillac vinifié l’année de naissance de Trélissac. L’alliance était parfaite. En guise de desserts, la maîtresse de maison leur recommanda chaudement les gimblettes d’Albi, sorte de gâteaux secs en forme d’anneaux qui accompagnèrent leurs cafés.
    — Très serré pour moi ! exigea Théo.
    Séraphin but son arabica d’un seul trait et se mit à contempler le fond de sa tasse comme s’il lisait dans le marc de café.
    Pour la première fois depuis le début du repas, les deux complices s’abandonnaient au silence de la réflexion.
    L’œil rieur et les cheveux en bataille, Théo était un peu pompette, victime des voluptés distillées par le gaillac doux. Séraphin, quant à lui, ne parvenait pas à s’extraire de ses cogitations. Soudain, il observa à nouveau sa tasse en porcelaine, la sonda et déclara tout de go :
    — J’y suis !
    — Quoi, vous y êtes ? s’exclama Théo.
    — J. et J. ! Et si c’étaient les fils Labatut ?
    — Quels rapports ?
    — L’un s’appelle Jules, l’autre Jean !
    — Quel serait le mobile ? renâcla Théodore.
    — Ce sont tous deux des fainéants qui aiment l’argent facile. Le chantage est une arme dont se servent les faibles. Pour entretenir leurs pépées, peut-être menaçaient-ils Dupuy de révéler son homosexualité ?
    — Ouais, plausible… remarqua Théo en esquissant néanmoins une moue dubitative.
    — Avouez que c’est une drôle de coïncidence ! souligna Séraphin.
    — La lettre, quoique tapée à la machine, n’est entachée d’aucune faute ! Pour des billes, je les trouve plutôt finauds, ces frangins Labatut !
    — Les corbeaux sont comme les pervers, ils font preuve d’une intelligence aiguë qui surprend toujours les magistrats !
    — Vous les avez déjà vus, ces zigotos ?
    — Ce matin, avant les obsèques… Enfin, si on peut parler d’obsèques. Il paraît que ce Labatut, on l’a enterré comme un chien galeux, sous une pluie battante. C’est ce que m’a dit Dorléac.
    — Quelle allure ?
    — Deux mafiosi de province ! L’un plutôt râblé, l’autre plus élancé. Ils portaient chacun un costume sombre mal taillé avec des souliers vernis et une gourmette, voyez le genre ! Ils faisaient pitié à voir en encadrant leur mère larmoyante.
    — C’est assez misérable ! Le pauvre Labatut ne méritait pas une telle sortie de scène ! conclut Trélissac.
    — Je partage votre avis, mon cher Théo. Du bureau de Dorléac, j’étais aux premières loges, même que l’ami Coustot, il n’en ratait pas une miette…
    — Celui-là, il faut que vous ayez une discussion très serrée avec lui cet

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