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Toulouse-Lautrec en rit encore

Toulouse-Lautrec en rit encore

Titel: Toulouse-Lautrec en rit encore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Alaux
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répéter le peintre de celle qu’il coucha, à maintes reprises, sur sa toile. Jamais la ressemblance ne lui était apparue aussi flagrante. Quand Miss Combarieu eut quitté son bureau, à peine rassurée, Dorléac se trouva, tout à coup, trop à l’étroit dans son musée. Les rosiers du jardin de la Berbie lui tendaient leurs pétales odorants. Il ne lui restait plus qu’à s’abandonner à une petite promenade dans ses allées.
    En passant devant la conciergerie, un délicat fumet de navarin au mouton titilla ses narines. À ce sujet, il partageait le point de vue de sa secrétaire. La veuve Labatut était une cuisinière hors pair. Son nouveau galant devait aimer, lui aussi, la bonne chère. Qui pourrait songer à le lui reprocher ?
    Sous la tour clocheton dominant les jardins et qui faisait naguère la jonction entre les deux chemins de ronde, deux silhouettes tenaient conciliabule. Dorléac reconnut Coustot devisant avec Séraphin Cantarel. Par discrétion, le conservateur s’apprêtait à faire demi-tour quand le commissaire le héla.
    — Venez nous rejoindre, la vue est superbe et votre palais plein de surprises !
    L’ironie de Coustot n’était pas de bon augure.
    — Je voudrais vous entretenir de deux ou trois points qui certes vont gâcher cette belle journée de printemps, mais il est des réalités, monsieur le conservateur, qu’il vaut mieux voir en face.
    Cantarel se taisait. Il avait su faire de Coustot un complice et n’entendait pas, face à son confrère, jouer les redresseurs de torts :
    — … Nous avons désormais acquis la conviction que le système d’alarme n’avait pas été enclenché la nuit du cambriolage. Le fait connaissait des précédents depuis quelques jours déjà… Labatut avait pris cette décision avec, semble-t-il, la complicité du veilleur de nuit, le fameux Dupuy qui s’est évanoui dans la nature, car, paraît-il, le système se déclenchait de façon intempestive au passage de chauves-souris devant les détecteurs…
    — Bon Dieu ! s’écria Dorléac, furieux.
    — On peut légitimement penser que le suicide de Labatut est en lien direct avec cette faute professionnelle, ajouta Coustot. Mais ce n’est peut-être pas un motif suffisant…
    — Que voulez-vous dire ? demanda le conservateur albigeois.
    — Labatut était un homme régulièrement cocufié par une femme volage, vous étiez au courant ?
    — Pour tout vous dire, commissaire, je viens de l’apprendre de la bouche de ma secrétaire…
    — Vous manquez sacrément de curiosité, monsieur Dorléac, surtout quand il s’agit, en l’espèce, d’un concierge. Par définition, il sait tout sur tout. À vous d’en savoir autant que lui…
    — La connaissance par le trou de la serrure de la vie privée de chacun ne fait pas partie de mes attributions.
    — Je vous le concède, mais si vous aviez eu cette curiosité toute malsaine, vous sauriez que deux de vos gardiens couchaient ensemble.
    Décontenancé, Dorléac écoutait avec circonspection ce qu’il aurait considéré jusqu’alors comme des ragots malveillants. Dans la bouche du commissaire, cet inventaire à la Prévert des mauvaises mœurs avait une résonance autre.
    — Vous êtes en train de m’expliquer, commissaire, que Dorval et Dupuy partageaient le même lit ? Ça alors…
    — N’était-ce pas Paul Dupuy qui vous avait demandé d’engager le jeune Dorval ? insista le policier.
    — Si… Si… convint Dorléac, incrédule.
    — Jusqu’alors, rien de vraiment répréhensible si tout cela relevait d’une vraie histoire d’amour entre deux êtres, fussent-ils du même sexe, concéda l’homme de la PJ.
    Séraphin cilla comme pour approuver le raisonnement du policier.
    — Or je crois que les rapports entre votre veilleur de nuit et son collègue de jour, le séduisant Gérard, reposaient sur la vénalité du second.
    — J’ai du mal à…
    — Je sais, tout cela est un peu éloigné de vos valeurs, monsieur le conservateur, mais la vie est ainsi faite ! Aviez-vous remarqué un comportement curieux chez Dupuy ces dernières semaines ?
    — Il fallait parler moins fort quand on s’adressait à lui, mais davantage articuler. Sa surdité devenait un sérieux handicap.
    — Vous semblait-il tendu, anxieux ?
    — Nous ne faisions que nous croiser, commissaire. Quand il prenait son service, j’avais déjà quitté le musée.
    — À quelle heure prenait-il la relève ?
    — À 20 heures

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