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Toute l’histoire du monde

Titel: Toute l’histoire du monde Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Claude Barreau , Guillaume Bigot
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croisades. Mais, l’empire d’Orient étant affaibli par le « hold-up » de 1204, les Turcs avaient repris l’offensive. Le sultan Mahomet II réussit à prendre Constantinople ; le dernier empereur byzantin, Constantin XI, ayant trouvé une mort glorieuse lors de l’assaut.
    Curieusement, l’Occident, à part quelques secours vénitiens et génois, sembla se désintéresser de la chute de Byzance. Pourtant, les Ottomans ne se contentèrent pas de Constantinople, mais firent la conquête des Balkans, sous un successeur de Mahomet II, Soliman le Magnifique (1494-1566). Les Turcs ne seront arrêtés que
    devant Vienne, en 1529, par les Autrichiens. On les verra encore attaquer Vienne en 1683 ; et l’empire ottoman ne sera détruit qu’en 1918. On ne comprend rien aux problèmes actuels des Balkans si l’on oublie l’empire ottoman.
    La chute de Constantinople apparaît comme une grande victoire de l’Islam. Avec trois restrictions, cependant.
    D’abord, la chrétienté, avec Gênes et Venise, gardait l’hégémonie navale en Méditerranée. Les Turcs étaient des fantassins. Ils n’avaient comme marins que les corsaires barbaresques (Alger, Tunis), cruels pour leurs prisonniers et gênants pour les ports de pêche, mais pas vraiment dangereux. Gênes et Venise, d’ailleurs, s’accommodèrent assez bien de la domination ottomane dans les Balkans (Venise y conservant les îles, le Péloponnèse, la Crète et Chypre). Ces négociants faisaient peu de cas de la religion et, en dehors des crises, ils commercèrent avec la « Sublime Porte » (nom officiel du gouvernement sultanien), qui à leurs yeux remplaçait simplement l’empire romain d’Orient.
    Ensuite, les Byzantins, avant de perdre leur indépendance, avaient « transmis le flambeau » de leur culture et de l’orthodoxie à une nouvelle venue : la Russie. D’abord à Kiev, dont le roi Vladimir s’était converti au christianisme et avait épousé la sœur de Basile II en 988 ; puis, à partir du XIV e siècle, à Moscou, ou Ivan le Terrible (1530-1584) finit par prendre le titre impérial (tsar = César).
    Enfin et surtout, les Européens ont laissé faire les Turcs parce que les Occidentaux tournaient désormais le dos à l’Orient classique : ils étaient partis à la conquête de la Terre. Les musulmans ne s’aperçurent pas que leur monde sahélien était contourné et devenu, en quelque sorte, « provincial ».
    Paradoxalement, la chute de Constantinople déclencha ce qu’on appelle la « Renaissance ».
    Pendant le siège, des centaines d’intellectuels et de dirigeants grecs avaient en effet fui la ville pour gagner l’Italie. Beaucoup y réussirent ; l’un d’entre eux, Bessarion (1400-1472), devint même cardinal à Rome et fonda la bibliothèque de Venise.
    Ces intellectuels provoquèrent en Occident une vraie révolution.
    On pourrait dire que le trait distinctif de la « modernité », ce qui la distingue des civilisations « traditionnelles », est l’exaltation de l’individu, de l’esprit critique et du changement. Trois caractères qui ne s’étaient jamais trouvés réunis jusque-là.
    L’Antiquité en pratiquait deux : elle connut des individualités flamboyantes (Alexandre, Hannibal, César) et un sens critique poussé jusqu’au cynisme (Diogène), mais elle concevait mal le changement, sa vision du temps étant celle de l’« éternel retour » (que l’on retrouve jusque dans la Bible : « Rien de nouveau sous le soleil », écrit l’Ecclésiaste).
    Le Moyen Age, deux aussi : il fut propice aux individus (l’aventure extraordinaire de Jeanne d’Arc en témoigne) et aimait le changement. Nous avons vu combien d’inventions majeures (la boussole, le canon) purent s’épanouir à cette époque-là. Mais le Moyen Âge n’était pas très ouvert à l’esprit critique, à cause de l’influence de l’Église catholique.
    Lorsque des centaines d’intellectuels grecs, fuyant les Turcs, affluèrent en Italie, ils y amenèrent précisément ce sens critique qui manquait – et toute une part oubliée de l’Antiquité (Platon notamment, idole du cardinal Bessarion).
    Pour la première fois sur la Terre, les caractéristiques de la modernité se trouvèrent réunies : initiative individuelle, goût du changement et sens critique. Ce fut l’explosion.
    Cela confirme ce dont nous avons eu l’intuition dès le début : l’histoire dépend infiniment plus des facteurs idéologiques

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