Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz

Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz

Titel: Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Filip Muller
Vom Netzwerk:
serrant contre leurs parents. La terreur et la résignation se lisaient maintenant sur tous les visages. Il fallait bien se soumettre aux exigences des S.S., se laisser conduire à la salle de douches comme on le leur demandait avec tant d’obstination puisqu’on leur donnait l’assurance que leur vie n’était pas menacée…
    Sûr de lui désormais, le regard dur, Hössler déclara alors en termes nets et énergiques : « Maintenant, je vous le demande pour la dernière fois : voulez-vous vivre et travailler ou bien préférez-vous refuser de vous déshabiller ? » Les groupes de gens auxquels il s’adressait directement se turent. On entendait encore, ici et là, aboyer un chien et pleurer un enfant. Des hommes et des femmes désespérés, au seuil de la crise de nerfs, se mirent à sangloter. « Du calme, du calme ! cria Hössler d’un air bourru, soyez raisonnables, c’est votre intérêt à tous. »
    Dans pareille conjoncture, ne convenait-il pas d’encourager ces hommes à la résistance afin de mettre un terme, dans l’honneur, à leur existence ? Perplexe, je demandai à Alex Errera ce qu’il en pensait. C’était un officier de l’armée grecque qui avait fait partie d’un groupe de résistance. Homme sensé, il pouvait me donner un avis judicieux. Selon lui, mon projet était entièrement absurde ; il risquait de nous entraîner dans une situation chaotique sans issue. Mieux valait pour le moment faire preuve de patience et gagner du temps.
    Ses conseils freinèrent ma fièvre d’action et je compris la folie de mon projet. J’étais manifestement victime du sentiment de culpabilité que j’éprouvais en tant qu’observateur passif de tels événements.
    La simple vue des sentinelles S.S. armées, avec leurs chiens dressés à l’attaque, me ramena rapidement à la réalité. Nulle part au monde, tentative de sauver des vies humaines n’était plus insensée. Cependant, les déportés qui avaient été refoulés dans la salle de déshabillage hésitaient encore. Devaient-ils se ruer sur leurs tortionnaires ? Mais l’aspect des sentinelles S.S. armées jusqu’aux dents et la présence des chiens policiers qui avaient recommencé à hurler eurent vite fait de dissuader les plus courageux et les plus téméraires de toute idée de résistance. Il ne leur restait plus qu’à se soumettre aux exigences de leurs bourreaux.
    Les uns après les autres, tous recommencèrent à se dévêtir. Peut-être espéraient-ils encore un miracle, tant il est contraire à la nature humaine de regarder la mort en face.
    Quelques instants plus tard, cependant, tout espoir devait être définitivement abandonné. La porte de la chambre à gaz se referma inexorablement sur eux. Seule la femme qui avait prévenu ses compagnons bénéficia d’un sursis. On la relégua dans une petite salle voisine où elle fut soumise à un pénible interrogatoire. Pour des S.S. familiarisés avec cette pratique, il ne fut pas difficile de la faire parler. Tous les détenus du secteur du crématoire furent confrontés avec elle, et il ne fallut pas longtemps pour l’amener à reconnaître que c’était Jizhak Derensky qui lui avait révélé le sort qui attendait tous les détenus.
    La femme fut fusillée et Derensky ligoté par les S.S., traîné dans un four et brûlé vif. Pour l’exemple, nous dûmes assister à cette abominable exécution. Quelques mois plus tard, mon ami Léo Stein, de Tabor, subissait le même sort pour avoir prévenu dans les mêmes conditions quelques déportés du camp de Westerbock de la fin qui les attendait.
    Il y avait également parmi nous à Auschwitz des juifs dont le pays natal était si éloigné de notre camp qu’ils n’avaient pas la moindre idée du traitement que l’on imposait ici à leurs compatriotes. Ce fut notamment le cas de ceux qui arrivèrent un jour de Salonique. Ils avaient voyagé plus de sept jours, parqués dans des wagons à bestiaux, sans nourriture, et surtout sans eau en quantité suffisante. Un grand nombre avait d’ailleurs péri au cours du transport et les survivants étaient exténués.
    Bien qu’elles fussent presque déshydratées en raison du manque d’eau, les mères s’efforçaient encore d’allaiter leur petit. Quant aux vieillards et aux malades, ils étaient visiblement à bout de forces. L’Obersturmführer Hössler leur avait préparé une mise en scène particulièrement mensongère. Rassemblés dans le crématoire V, ces pauvres

Weitere Kostenlose Bücher