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Un collier pour le diable

Un collier pour le diable

Titel: Un collier pour le diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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présentait une certaine ressemblance avec le Roi.
    Le profil était semblable et aussi le haut front intelligent mais, nettement plus petit que son frère, le comte de Provence était aussi beaucoup plus gros. À cause de son amour immodéré de la bonne chère et des vins généreux son corps, vêtu d’un taffetas du même bleu que ses yeux, brodé, avec un art infini, de fleurs étranges au cœur d’argent, était si lourd, malgré sa jeunesse 3 , que ses petites jambes courtes et déjà envahies par la graisse semblaient avoir peine à le porter.
    — Eh bien ? chuchota Ulrich. Vous venez ?
    — Encore un instant, je vous prie ! répondit-il les yeux rivés au miroir.
    À voir cet homme au teint vermeil, au visage aimable et souriant et qui jetait autour de lui des regards pleins de satisfaction, un doute lui venait. Était-ce bien celui qu’il avait laissé inanimé dans un fourré de Trianon, la nuit précédente ? Sa victime lui avait paru plus grande, moins étoffée aussi… Mais le prince se mit à parler et les derniers doutes désertèrent l’esprit du jeune homme : c’était bien lui !
    — Messieurs, disait Provence, je viens comme le bon badaud parisien que je suis contempler vos trésors. On dit tant de merveilles de votre fameux collier que l’envie m’est venue de le contempler à mon tour. Montrez-le-moi donc !
    — Rien de plus facile, Monseigneur. Nous l’avions justement sorti de son coffre afin de procéder à l’examen de l’un des fermaux dont l’émaillage nous avait paru un peu faible. Votre Altesse Royale n’aura même pas à patienter un instant : le voici.
    Quelle que pût être l’envie de Tournemine de demeurer plus longtemps et d’entendre tout ce que le prince avait à dire, il se résigna cependant à abandonner la place pour ne pas se donner aux yeux de Winkleried les couleurs déplaisantes d’un espion.
    Sur la pointe des pieds, évitant de faire le moindre bruit, les deux jeunes gens suivirent le couloir qui était heureusement habillé de tapis, descendirent un petit escalier pris dans l’épaisseur du mur et, après avoir soulevé une portière, se retrouvèrent en effet dans une petite antichambre assez obscure qui, par une petite porte simplement fermée d’un gros verrou, les fit passer dans la cour.
    — Vous me direz si je me trompe, fit Winkleried en se hissant sur le vigoureux mecklembourgeois qui semblait supporter si aisément sa pesante carcasse, mais j’ai eu l’impression que vous n’aimiez pas beaucoup le comte de Provence ?
    — Qu’est-ce qui peut bien vous faire penser une chose pareille ?
    — L’expression de votre visage quand vous le regardiez, tout à l’heure… et puis cette grande sympathie qui m’est venue pour vous. Monsieur Mesmer, l’homme au baquet…
    — Au baquet ?
    — Oui, au baquet… la grande cuve autour de laquelle il fait asseoir les gens pour les guérir. Jamais entendu parler du docteur Mesmer ?
    — Jamais… ou si vaguement !
    — Je vous expliquerai ! C’est un grand homme !… Eh bien, Monsieur Mesmer prétend que, si l’on a de la sympathie pour quelqu’un, on éprouve tout ce qu’il ressent.
    — Mais le comte de Provence dans tout cela ?
    — C’est très simple : je ne peux pas le voir en peinture ! C’est un homme faux et dissimulé. Voilà pourquoi j’ai si bien deviné que vous ne l’aimiez pas !
    Gilles se mit à rire.
    — Winkleried, mon camarade, j’ai l’impression que nous allons être de grands amis tous les deux ! Je vous ai déjà bien des obligations.
    — Rien du tout ! Vous rentrez à Versailles avec moi ?
    — Pas ce soir. J’ai encore à faire à Paris et dans ce quartier justement.
    — Alors, je vous laisse. Où habitez-vous à Versailles ?
    Tournemine lui expliqua alors qu’il était provisoirement campé à l’hôtel des Gardes du Corps mais qu’il avait chargé son domestique de lui trouver un logis capable de convenir à la fois à sa situation dans le monde et à une bourse modestement garnie.
    — J’ai ce qu’il vous faut, je crois ! En face de chez moi il y a un joli pavillon où il y a un appartement libre : je m’en occupe si vous voulez ?
    — Avec joie ! Nous serons voisins ! Et cela fait une obligation de plus !
    Tirant de sa poche un petit carnet, le baron griffonna quelques lignes dessus, arracha la page et la tendit à Gilles qui put lire dessus « Pavillon Marjon, rue de Noailles au Petit Montreuil »

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