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Un collier pour le diable

Un collier pour le diable

Titel: Un collier pour le diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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car s’il prononçait mal le français il l’écrivait bien.
    — Vous m’inviterez à dîner ! dit-il seulement avec un bon sourire.
    — Marché conclu ! Je vous promets des écrevisses !
    Là-dessus, le Suisse et le Breton se serrèrent la main à l’anglaise et se séparèrent, l’un pour remonter vers le boulevard Saint-Martin, l’autre pour continuer la rue de Vendôme, rejoindre la rue Saint-Louis 4 et atteindre enfin la rue Neuve-Saint-Gilles au Marais où habitait cette comtesse de La Motte-Valois qui osait ressembler à Judith.
    C’était une rue étroite et mal pavée mais tranquille et plutôt déserte. L’angle était orné d’une statue de saint Gilles, ce que le jeune homme considéra comme un heureux présage. Trois ou quatre hôtels particuliers retranchés derrière de massives portes cochères, les murs arrière du couvent des Minimes percés d’une porte basse et une échoppe de cordonnier occupaient toute cette rue qui n’était pas bien longue et rejoignait le boulevard planté d’arbres qui occupait les anciennes fortifications du roi Louis XIII 5 .
    Au pas de Merlin, Gilles parcourut la longueur de la petite artère, se donnant tout le loisir de bien regarder le n o  10, une maison haute et de peu de largeur, d’assez belle apparence d’ailleurs mais plus bourgeoise qu’aristocratique. Par les fenêtres élevées on pouvait apercevoir de grands rideaux de soie bleue et le reflet d’un lustre à cristaux dans un miroir.
    Cheval et cavalier venaient tout juste de dépasser la maison quand une voiture de louage arriva en sens inverse, venant du boulevard, et s’arrêta tout justement devant le n o  10. Le jeune homme n’eut qu’à se tourner sur sa selle, avec la mine indolente et intéressée d’un garçon cherchant fortune, pour apercevoir un pied charmant, élégamment chaussé de soie « ventre de puce » puis une cheville dans un bas ajouré, enfin le bas d’une robe de la couleur des violettes de Parme. Enfin, une jeune femme apparut, brune, élégante, coiffée d’un chapeau extravagant sous lequel l’observateur n’eut aucune peine à reconnaître le profil de la fausse Judith.
    À la lumière du jour et sous sa propre chevelure, la dame lui parut moins ressemblante. Il en éprouva quelque satisfaction, heureux de constater que le charme de sa bien-aimée était trop parfait pour être convenablement copié. La glorieuse chevelure rousse donnait à Judith un éclat que celle-ci n’avait pas. Et puis, les yeux de la comtesse semblaient bleus, ceux de Mlle de Saint-Mélaine étaient noirs et pailletés comme un diamant. Et puis…
    Tandis qu’il faisait ainsi le compte des différences, la comtesse avait payé son cocher et s’apprêtait à rentrer chez elle mais, apercevant ce beau cavalier qui s’éloignait comme à regret en la regardant, elle lui décocha le plus naturellement du monde un sourire tellement provocant qu’il pouvait passer pour une invite.
    « Je ne sais pas si elle a réellement le droit de s’appeler Valois, pensa le jeune homme, légèrement choqué, mais elle a d’étranges manières pour une grande dame… »
    Il eut envie, un instant de l’accoster mais, pensant qu’il était plus sage de ne pas entrer trop vite en relation avec elle, il se contenta d’ôter son chapeau pour un large salut accompagné d’un sourire puis continua son chemin tandis que la dame rentrait dans sa maison.
    Il n’alla pas loin. Peu avant le boulevard, la rue Saint-Gilles se dédoublait pour former une seconde ruelle rejoignant elle aussi le boulevard en formant un U. Gilles s’y engagea, trouva un renfoncement où il attacha son cheval et resta là, aux aguets, bien décidé à observer pendant un moment les allées et venues et, si possible, les habitudes de cette maison.
    Pendant un assez long temps, il ne se passa rien, ou si peu que rien : un gamin, qui s’en allait acheter de la moutarde en sautant d’un pied sur l’autre, vint regarder Gilles presque sous le nez et lui décocha en passant :
    — C’est pas un endroit pour faire le pied de grue, militaire. Y a pas beaucoup de belles filles par ici !
    — Mais des gamins qui se mêlent de ce qui ne les regarde pas on dirait que ça ne manque pas ! File si tu ne veux pas que mon pied fasse connaissance avec tes fesses !
    — Oh, ça va ! Ce que j’en disais, c’était manière de parler ! Bonne soirée, militaire !
    Gilles vit aussi passer une vieille femme qui, un missel

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