Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Un collier pour le diable

Un collier pour le diable

Titel: Un collier pour le diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
semble ?
    — Celui du gerfaut, Sire…
    — C’est cela. J’avais même dit que je souhaitais vous revoir pour que vous m’appreniez la chasse à la manière des Iroquois, mais vous n’êtes pas venu.
    — Je n’ai pas osé, Sire.
    — Vous avez eu tort ! Plus grand tort encore d’aller chez mon cousin d’Espagne. Fort bien, Monsieur ! Puisque nous nous connaissons déjà je me trouve mieux disposé à vous entendre. Racontez-moi votre histoire que je voie ce que vous avez pu faire pour mériter la Bastille.
    Étranglé, soudain, Gilles jeta vers Rochambeau un regard lourd d’angoisse que celui-ci intercepta. Il avait suivi avec une visible inquiétude les débuts orageux de la conversation et pensait qu’il était peut-être temps pour lui d’intervenir. Il commença par toussoter légèrement.
    — Sire…, commença-t-il en s’efforçant d’adoucir sa voix au maximum, si le Roi le permettait…
    — Quoi donc ?
    — Je le mettrais moi-même au fait. C’est une affaire grave… délicate en tout cas, très délicate même et je crains que le chevalier, confronté à la majesté royale…
    Le poing du Roi s’abattit sur son bureau, faisant sauter les papiers.
    — Que me chantez-vous là, Rochambeau ? Essayez-vous de me faire croire que je puisse terrifier un garçon qui n’avait peur ni des sauvages ni des Anglais, qui sont parfois une manière de sauvages quand ils s’y mettent ? Vous ne vous en mêlerez pas. S’il a su se mettre dans un mauvais cas, il saura bien, j’imagine, me l’avouer lui-même. Quel est le chef d’accusation, d’abord ?
    — Euh !… lèse-majesté, Sire !
    — Comment ?
    Sous la poussée d’une brusque colère, Louis XVI devint rouge brique et Rochambeau se hâta d’ajouter :
    — Envers Son Altesse Royale Madame la princesse des Asturies, Sire ! Je dirai, si le Roi permet… lèse-majesté involontaire… mais obligatoire…
    — Ah !…
    Il y eut un silence chargé d’incertitude. Puis, avec un soupir, le Roi se laissa tomber dans son fauteuil.
    — Eh bien, chevalier, racontez-moi votre crime.
    Sans hésiter, Gilles s’exécuta. L’atmosphère, il le sentait, s’était légèrement détendue et il en profita. Il fit son récit avec une grande pudeur mais une totale franchise puis, quand il fut achevé, il plia le genou mais sans baisser la tête.
    — Que le Roi me permette encore de dire que je ne cherche pas à me défendre en accusant une femme. Je suis coupable, ne fût-ce que d’avoir pris quelque plaisir à ce que je viens de raconter. Si l’Espagne demande ma tête, que Votre Majesté n’hésite pas un instant à la lui donner mais qu’au moins elle sauvegarde mon honneur. Je suis breton, Sire, et je tiens à ma foi. Fidèle à mon Dieu autant qu’à mon Roi, je refuse d’être condamné pour sorcellerie et blasphème et s’il me faut mourir que ce soit par la hache, Sire, comme il convient à un gentilhomme, non par le feu comme le mériterait un adorateur du Diable !
    Louis XVI ne répondit rien. Après avoir regardé longuement le jeune homme il avait laissé tomber sa tête sur sa poitrine et semblait perdu dans une profonde méditation. Le silence qui s’établit dans la vaste pièce, troublé seulement par le tintement presque imperceptible de la grande pendule de Boulle posée sur la cheminée, était lourd de pensées inexprimées. Figé dans une attitude respectueuse, Gilles osait à peine respirer et, derrière lui, le général lui aussi retenait son souffle, attendant les paroles qui allaient tomber de cette bouche royale.
    Louis XVI, avec un nouveau soupir, releva enfin la tête.
    — Relevez-vous, Monsieur, dit-il doucement, et écoutez-moi…
    À cet instant, le gentilhomme de service qui avait introduit les visiteurs reparut, annonçant le comte de Vergennes, ministre des Affaires étrangères, qui parut aussitôt derrière lui en homme qui n’a pas le temps d’attendre et auquel d’ailleurs ses fonctions donnaient le droit d’entrer chez le Roi à toute heure.
    — Sire, fit-il de sa voix posée de diplomate teintée d’un léger accent bourguignon, je souhaiterais entretenir un instant Votre Majesté d’une affaire urgente…
    Apercevant Rochambeau qu’il connaissait bien, il s’arrêta, salua, considéra un instant le général puis le lieutenant des Dragons. Son regard accrocha la décoration neuve qui éclatait sur la poitrine du plus jeune et, enfin, il sourit, ce qui chez lui était

Weitere Kostenlose Bücher