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Un Dimanche à La Piscine à Kigali

Un Dimanche à La Piscine à Kigali

Titel: Un Dimanche à La Piscine à Kigali Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gil Courtemanche
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à nourrir et craignaient de manquer de nourriture.
    — Prenez des photos, monsieur Lamarre. Ne soyez pas timide. Et ça leur fera plaisir. Chaque fois qu’ils sont photographiés ou filmés naît un petit espoir d’aide prochaine. De toute manière, ils meurent avant de se rendre compte qu’aucune capitale ne se soucie d’eux.
    Le jeune diplomate transpirait plus que ses vêtements ne pouvaient le prendre. Il avait une envie irrésistible de vomir, ce qu’il fit, rempli de honte, devant des gamins hilares, dès qu’il sortit du pavillon B. Sa visite à la morgue dont le système de climatisation ne fonctionnait pas ne fit rien pour calmer ses entrailles. Ce n’était pas encore l’odeur de la mort qui se dégageait de la dizaine de cadavres, mais plutôt celle de la vie qui commence à pourrir. Il demanda à Valcourt de prendre les photos pour lui et sortit pour vomir de nouveau. Le frère Cardinal reposait sur une civière, complètement nu. Une balle avait troué le front, deux autres étaient logées près du cœur. Les tueurs, qui savaient tirer, l’avaient assassiné calmement, sans gaspiller leurs munitions. L’homme ne portait aucun autre signe de violence. De petits voleurs ou des ouvriers mécontents l’auraient massacré. Il prit trois photos comme Lamarre l’avait demandé. Une pour l’ambassade, une pour la police rwandaise et une autre pour les services secrets français. C’est ce que la consule, rejointe au dixième trou du Kigali Golf Club, avait ordonné à Lamarre. L’enquête serait confiée aux Français, car on ne pouvait se fier à la police rwandaise. Et surtout, avait-elle précisé, ne rien dire à quiconque serait susceptible d’ébruiter la nouvelle.
     
    Valcourt retrouva madame Lamarre sous le ficus pendant que son mari changeait de vêtements. Gentille se baignait avec leur nouvelle fille. La femme du diplomate paraissait particulièrement intéressée par les mœurs sexuelles qu’on prêtait aux Africains. Valcourt la rassura. Elle ne courait aucun danger, surtout dans son état. Mais oui, la femme blanche exerçait un attrait certain sur l’homme noir, tout comme l’inverse, lui avait-on dit, était vrai. Si lui avait une femme noire, c’était le fruit des hasards de la vie plutôt que d’une passion pour l’autre couleur. Quant à savoir si ces Noires au cul si ferme et aux seins si pointus étaient « meilleures » (c’est le terme qu’elle avait employé) que les Blanches, il n’en savait rien. Et les prostituées ? Il expliqua qu’ici, si on tenait le moindrement à la vie, la masturbation était préférable. Et l’enfant ?
    — Vous croyez en l’Immaculée Conception ?
    Valcourt appela Justin, le garçon de piscine, qui portait glorieusement son anatomie de jeune Apollon et sa peau lustrée comme d’autres portent leurs vêtements. Cette jeune dame, expliqua Valcourt, dans l’état délicat où elle était, avait besoin d’attentions particulières, non seulement de compagnie, car son mari travaillait énormément, mais aussi de relaxation physique, peut-être même de quelques vigoureux massages, dont on lui avait dit qu’il possédait le secret. Justin se mettait au service de madame, qui fut parcourue d’un grand frisson. Elle haïssait cet énorme ventre qui la séparait du corps fluide et musclé qui se dandinait devant elle. Un fleuve de transpiration mouillait ses cuisses. Ses seins déjà lourds frémissaient et se hérissaient, durcissaient au point de faire mal. Valcourt s’excusa. Il avait donné rendez-vous à Lamarre dans le hall de l’hôtel. Ils devaient se rendre dans le village de François Cardinal. Justin, dont le sexe raide sortait presque de son petit maillot, savourait déjà sa vengeance. Un peu soûl de soleil et de bière, il s’était confié un jour à Valcourt. Chaque fois qu’il baisait une Blanche, et il y en avait tellement qui promenaient leur corps incertain, leurs envies dissimulées, leurs fascinations pour le nègre barbare et puissant, chaque fois, il se vengeait du fait d’être garçon de piscine et simple objet de convoitise sexuelle de la part des maîtresses. Il se vengeait aussi du fait d’être noir. Il se comportait avec les Blanches comme elles rêvaient qu’il le fasse, en brute animale, puisqu’il n’était pas vraiment un humain. Elles hurlaient comme des bêtes, enfin à son niveau, et elles en redemandaient, comme si elles souhaitaient qu’il les humilie encore davantage,

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