Un long chemin vers la liberte
régime de Batista. Dans Commando de Deneys Reitz, j ’ ai lu les tactiques de la guérilla non conventionnelle des généraux boers pendant la guerre des Boers . J ’ ai lu des livres de et sur Che Guevara, Mao Zedong, Fidel Castro. Dans le très beau Etoile rouge sur la Chine d ’ Edgar Snow, j ’ ai vu que c ’ était la détermination et la pensée non traditionnelle de Mao Zedong qui l ’ avaient conduit à la victoire. J ’ ai lu La Révolte de Menahem Begin et j ’ ai été encouragé en voyant que le leader israélien avait mené une guerre de guérilla dans un pays sans montagnes et sans forêts, ce qui était une situation semblable à la nôtre. J ’ avais envie d ’ en savoir plus sur la lutte armée du peuple d ’ Ethiopie contre Mussolini et sur les armées de guérilla du Kenya, d ’ Algérie et du Cameroun.
Je suis remonté dans le passé de l’Afrique du Sud. J’ai étudié notre histoire à la fois avant et après l’arrivée des Blancs. J’ai analysé les guerres des Africains contre les Africains, des Africains contre les Blancs et des Blancs contre les Blancs. J’ai fait un relevé des plus importantes régions industrielles du pays, du système national de transport, du réseau de communications. J’ai accumulé les cartes détaillées et j’ai systématiquement analysé le terrain des différentes régions du pays.
Le 26 juin 1961, le jour de la fête nationale, j’ai envoyé une lettre aux journaux sud-africains, dans laquelle je faisais l’éloge du peuple pour son courage pendant la récente grève à domicile et dans laquelle je demandais de nouveau la convocation d’une convention nationale constituante. J’y annonçais également qu’une campagne de non-coopération serait lancée à l’échelon du pays entier si l’Etat refusait de convoquer cette convention. Ma lettre disait en particulier :
Je suis informé qu’un mandat d’arrêt a été délivré contre moi et que la police me recherche. Le Conseil national d’action a réfléchi sérieusement à cette question et il m’a conseillé de ne pas me constituer prisonnier. J’ai suivi ce conseil et je ne me rendrai pas à un gouvernement que je ne reconnais pas. Tout homme politique sérieux comprendra que dans les conditions quotidiennes actuelles de notre pays, rechercher un martyre bon marché en me livrant à la police serait naïf et criminel […].
J’ai choisi cette voie qui est plus difficile et qui entraîne plus de risques et d’épreuves plutôt que d’être enfermé dans une prison. J’ai dû me séparer de ma chère femme et de mes enfants, de ma mère et de mes sœurs pour vivre comme un proscrit dans mon propre pays. J’ai dû décider de fermer mon cabinet d’avocat, d’abandonner mon métier, et de vivre dans la pauvreté comme le font tant de gens… Je combattrai le gouvernement à vos côtés, pas après pas, mètre après mètre, jusqu’à ce que nous remportions la victoire. Qu’allez-vous faire ? Allez- vous venir avec nous, ou allez-vous coopérer avec le gouvernement dans sa tentative de réprimer les revendications et les aspirations de votre propre peuple ? Allez-vous rester silencieux et neutres dans ce qui est une question de vie et de mort pour mon peuple, pour notre peuple ? En ce qui me concerne, j’ai déjà fait mon choix. Je ne quitterai pas l’Afrique du Sud et je ne me rendrai pas. Nous ne pourrons remporter la victoire que par les épreuves, le sacrifice et l’action militante. La lutte est ma vie. Je continuerai à combattre pour la liberté jusqu’à la fin de ma vie.
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Au cours de ces premiers mois de clandestinité, j ’ ai vécu pendant quelques semaines chez une famille dans Market Street, après quoi j ’ ai partagé l ’ appartement d ’ une pièce au rez-de-chaussée de Wolfie Kodesh, à Berea, une banlieue blanche et tranquille pas très loin, au nord du centre ville. Wolfie était membre du Congrès des démocrates et reporter à New Age. Il avait combattu en Afrique du Nord et en Italie pendant la Seconde Guerre mondiale. Sa connaissance de la guerre et son expérience personnelle du combat m ’ ont été extrêmement utiles. Sur son conseil, j ’ ai lu De la guerre du général prussien Carl von Clausewitz. La thèse centrale de Clausewitz, à savoir que la guerre est la continuation de la diplomatie par d ’ autres moyens, rejoignait ce que je pensais instinctivement. Je demandais à Wolfie de me fournir de
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