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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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silence. Le temps d’une seconde, la colère et l’amour se livrèrent
bataille dans son cœur. Le visage immobile, le regard fixe, Merthin avait cette
expression de concentration absolue qu’elle lui connaissait bien. Courbé sur
son travail, il faisait de délicats ajustements de ses mains solides et
adroites, immergé dans un état plus profond que le bonheur. Il avait la grâce
parfaite d’un jeune cerf pliant le col pour boire l’eau d’un ruisseau,
l’apparence exacte de l’homme qui s’adonne à la tâche pour laquelle il est né.
Oui, se dit-elle, en cet instant il accomplit son destin.
    Pourtant, elle éclata : « Pourquoi m’as-tu
menti ?
    Merthin poussa un cri de douleur. Son burin avait dérapé.
    « Ventrebleu ! s’écria-t-il en portant son doigt à
sa bouche.
    — Oh, pardon ! Tu t’es fait mal ?
    — Ce n’est rien. Quand est-ce que je t’ai menti ?
    — Tu m’as fait entendre que Griselda t’avait séduit une
seule fois alors qu’en vérité, vous êtes ensemble depuis des mois.
    — Mais pas du tout ! » Il suça le sang de son
doigt.
    « Elle est enceinte de trois mois.
    — C’est impossible ! Cela remonte à deux
semaines !
    — Si ! Ça se voit à sa silhouette.
    — Ah bon ?
    — C’est Mattie la Sage qui me l’a dit. Pourquoi m’as-tu
menti ? »
    Il la regarda droit dans les yeux. « Je n’ai pas menti.
Ça s’est passé le dimanche de la semaine de la foire, et juste une seule fois.
Ça ne s’est jamais reproduit.
    — Comment peut-elle affirmer alors qu’elle est enceinte,
après deux semaines seulement ?
    — Je ne sais pas. Au bout de combien de temps une femme
s’aperçoit-elle qu’elle est enceinte ?
    — Tu ne le sais pas ?
    — Non, je ne me suis jamais intéressé à la question.
Quoi qu’il en soit, il y a trois mois, Griselda était...
    — Mais oui ! Avec Thurstan ! l’interrompit
Caris tandis qu’un fol espoir embrasait son cœur. C’est lui, le père. Pas
toi ! »
    D’étincelle, son espoir se muait déjà en flamme.
    « C’est vrai ? demanda Merthin, osant à peine y
croire.
    — Naturellement ! Et ça explique tout ! Si
elle était subitement tombée amoureuse de toi, elle ne te lâcherait pas d’une
semelle. Or elle t’adresse à peine la parole.
    — J’ai cru que c’était parce que je ne voulais pas
l’épouser.
    — Non, elle n’a jamais pu te supporter. Elle a juste
besoin d’un père pour son enfant. Thurstan a dû prendre ses jambes à son cou en
apprenant qu’elle était enceinte. Et toi, qui vis dans la même maison, tu étais
la proie idéale, et tu as été assez bête pour tomber dans le panneau. Béni soit
le ciel !
    — Et Mattie la Sage ! » ajouta Merthin.
    Voyant le sang sur sa main gauche, Caris s’écria :
« Et tu t’es blessé à cause de moi ! » Elle examina son doigt.
La coupure était petite, mais profonde. « Pardonne-moi, je t’en prie.
    — Ce n’est pas si grave.
    — Mais si, c’est grave ! » insista-t-elle
sans véritablement savoir si elle parlait de la coupure ou du reste. Elle posa
les lèvres sur la main de Merthin. Son sang chaud avait un goût particulier.
Prenant son doigt dans sa bouche, elle aspira pour nettoyer la blessure.
L’instant était d’une telle intimité qu’il lui évoqua l’acte sexuel et elle
ferma les yeux, se laissant aller à une sorte d’extase. Elle déglutit. Ce goût
de sang la faisait frissonner de plaisir.
    *
    Une semaine après la tragédie, un bac reliait Kingsbridge au
faubourg de Villeneuve, sur la rive opposée. Achevé à temps pour le marché du
samedi, il était en service dès l’aube. Merthin avait travaillé à sa
construction toute la nuit de vendredi à la lumière de lampes à huile. Il ne
devait pas avoir eu le temps de parler à Griselda, se dit Caris en descendant à
la rivière avec son père.
    Celui-ci voulait voir la réaction des vendeurs du marché –
les paysannes des villages voisins avec leurs paniers d’œufs, les fermiers avec
leurs charrettes chargées de beurre et de fromage et les bergers avec leurs
troupeaux de moutons.
    Caris admira le travail de Merthin. Le bac pouvait
accueillir une charrette et son cheval, sans que son museau ne dépasse du bord.
De plus, il était entouré d’une solide balustrade en bois qui empêchait les
moutons de tomber par-dessus bord. Sur les deux berges, des appontements en
bois avaient été installés pour faciliter l’embarquement. Ce bac

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