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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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fois le double pont traversé, lorsque la
colonne des moines s’était retrouvée cheminant sur la route à la lumière de
torches enflammées.
    Pourtant, son anxiété ne l’avait pas quitté. Mille idées se
bousculaient dans sa tête et il se surprenait à vouloir s’en ouvrir à
Pétronille. Las, quand il se rappelait qu’il ne recevrait jamais plus aucun
conseil de sa mère, une peur panique remontait en lui du tréfonds de ses
entrailles, telle une nausée chargée de bile.
    Il fuyait la peste, ce qu’il aurait déjà dû le faire trois
mois plus tôt, quand Marc le Tisserand était mort. Aujourd’hui, n’était-il pas
trop tard ? Il refoula sa peur. Il ne se sentirait totalement rassuré que
lorsqu’il serait derrière les murs de l’ermitage, à l’abri du monde.
    Il ramena ses pensées à l’instant présent. En cette période
de l’année, les champs étaient déserts. En revanche, devant le bâtiment, une
poignée de moines s’affairaient sur une petite étendue de terre battue :
l’un était occupé à ferrer un cheval, un autre à réparer une charrue ;
plus loin, un petit groupe faisait tourner le levier d’une presse à cidre.
    Ils interrompirent tous leur occupation pour regarder d’un
œil étonné la cohorte qui marchait vers eux : vingt moines, une
demi-douzaine de novices, quatre chariots et dix chevaux chargés. Godwyn avait
emmené tout le monde, sauf les serviteurs du prieuré.
    Un moine s’écarta du pressoir et s’avança vers les
visiteurs. Godwyn reconnut en lui le prieur de l’ermitage. Ils se rencontraient
tous les ans lorsque Saül Tête-Blanche venait à Kingsbridge. Pour la première
fois, Godwyn remarqua que la chevelure blond cendré qui lui avait valu son
surnom était parsemée de mèches grises.
    Ils avaient fait leurs humanités ensemble à Oxford. Saül
était un élève brillant, vif d’esprit et habile à argumenter. Surtout, c’était
le plus dévot de tous les étudiants. S’il avait été moins religieux, s’il avait
réfléchi à sa carrière au lieu de s’en remettre à Dieu, il aurait pu devenir
prieur de Kingsbridge. À la mort du prieur Anthony, Godwyn l’avait évincé
aisément.
    Cependant, Saül n’était pas un faible, mais un homme mû par
une vertu obstinée et ce trait de caractère ne laissait pas d’inquiéter Godwyn
aujourd’hui, incapable qu’il était de prédire si Saül se rangerait à ses vues
ou soulèverait toutes sortes de difficultés. Surmontant un nouvel accès de
panique, il s’efforça de montrer un visage serein.
    Il scruta attentivement les traits de Saül. Celui-ci, étonné
de le voir et, à l’évidence, mécontent, affichait une cordialité limitée à la
plus stricte politesse. Aucun sourire ne l’égayait.
    À l’époque de l’élection du prieur, Godwyn avait clamé haut
et fort qu’il ne briguait pas cette fonction, tout en s’attachant à éliminer
les autres candidats, y compris Saül. Celui-ci avait-il conscience d’avoir été
dupé ?
    « Le bonjour à vous, père prieur, disait-il maintenant.
Voilà une bénédiction à laquelle nous ne nous attendions pas ! »
    À tout prendre, son attitude n’était pas franchement
hostile, se dit Godwyn avec soulagement. Sans doute pensait-il que l’inverse
aurait été contraire à son vœu d’obéissance. « Que Dieu vous bénisse, mon
fils ! répondit-il. Cela faisait trop longtemps que je n’avais rendu
visite à mes ouailles de Saint : Jean. »
    Saül laissa errer son regard sur la congrégation de moines,
les chevaux, les chariots chargés de vivres. « Apparemment, il ne s’agit
pas là d’une simple visite. » Il ne proposa pas à Godwyn de l’aider à
mettre pied à terre, comme s’il attendait une explication avant de les laisser
entrer dans le monastère, comportement ridicule puisqu’il ne pouvait en aucun
cas renvoyer son supérieur.
    Néanmoins, Godwyn se sentit tenu de la lui fournir.
« Avez vous entendu parler de la peste ?
    — Peu de visiteurs nous informent de la marche du
monde, mais des rumeurs sont parvenues jusqu’à nous. »
    Godwyn s’en réjouit. Ce peu de visiteurs était justement ce
qui l’avait poussé à chercher refuge ici.
    « L’épidémie a tué des centaines de gens à Kingsbridge.
J’ai craint que le prieuré ne soit décimé. C’est pourquoi j’ai conduit les
moines ici. C’est peut-être le seul moyen pour nous d’assurer notre survie.
    — Vous êtes les bienvenus, naturellement,

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