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Un paradis perdu

Un paradis perdu

Titel: Un paradis perdu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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joignirent pour la première fois les nouveaux membres de la flotte Cornfield, le lieutenant Andrew Cunnings, second du Phoenix II , le second lieutenant mécanicien Gil Artwood et l'écrivain de marine Joseph Balmer, successeur du défunt Michael Hocker. Après le dîner de gala, lord Simon, qui avait renoncé à la danse, demanda à son petit-fils d'ouvrir le bal à sa place avec la cavalière de son choix. Comme il se devait, Pacal invita lady Lamia, doyenne de l'assemblée. Il l'enleva avec tant de fougue qu'elle poussa un cri de surprise.
     
    – Ce que tu es fort ! Sais-tu que mes pieds ne touchent pas le parquet ? dit-elle en riant.
     
    Lamia, que l'âge desséchait, n'épargnant que son opulente toison bouclée, toujours incoiffable, se révéla si légère dans les bras du danseur qu'elle se trouvait portée plutôt que conduite.
     
    – Ton père valsait mieux que toi. Je devrais dire valse mieux, rectifia-t-elle en désignant, d'un signe de tête, Ottilia et Charles qui tournoyaient avec plus d'aisance et d'élégance que tous les autres couples.
     
    – Otti ne peut faire oublier ta mère bien sûr, mais elle aime ton père plus qu'aucune femme ne peut aimer un homme, dit Lamia.
     
    – Elle a eu l'intelligence de ne pas jouer les mères de remplacement. Elle est pour moi la grande amie incomparable et je crois qu'elle partage avec mon père un bonheur paisible et sûr, dit Pacal.
     
    La danse achevée, il accompagna Lamia jusqu'à un canapé, alla quérir au buffet deux coupes de champagne et, quand Pibia fit tinter le gong pour annoncer minuit et l'avènement de l'an neuf, ils échangèrent baisers et vœux.
     
    – Je souhaite que tu trouves une épouse digne d'un Cornfield et d'un Desteyrac, qui sont gens de la même noble trempe, dit-elle.
     
    – Moi, je souhaite vous garder longtemps, telle que vous êtes, pour ouvrir avec vous tous les bals que le destin nous accordera, dit-il.
     
    – Ah ! Je reconnais là ton galant sang français. Aucun Anglais ne trouverait à dire pareille chose à une vieille femme qui va compter soixante-six ans, dit-elle.
     
    D'un geste tendre, Pacal effleura du bout des doigts la crinière argentée de sa marraine.
     
    – M'as-tu assez tiré les cheveux quand tu étais enfant, soupira-t-elle, mélancolique.
     
    – Vos cheveux me fascinaient. Grand-père disait : « C'est coiffure de sorcière », alors que c'est toison de fée, dit Pacal en s'inclinant.
     
    Comme il s'éloignait pour répondre à un appel discret de lord Simon, Fish Lady le retint.
     
    – N'as-tu pas remarqué l'absence d'Anacona ?
     
    – Si, bien sûr. Elle n'a pas de vacances de fin d'année ?
     
    – Tu ne lui as pas écrit depuis longtemps, insista Lamia.
     
    – Deux ou trois fois pendant notre voyage en Europe, pour lui envoyer des timbres postaux qu'elle collectionne. Mais je n'y ai plus pensé depuis des mois. S'en est-elle plainte ?
     
    – Elle vient d'entrer en religion. Elle ne reviendra pas à Soledad. Les religieuses bénédictines de son collège de Nassau l'ont envoyée dans un couvent, au Québec. Elle veut se faire sœur de charité et retourner à Cuba, pour s'occuper des orphelins dont les Espagnols ont tué et tuent encore les parents, révéla Fish Lady.
     
    – Les nonnes de Nassau l'ont donc circonvenue ! dit Pacal, rageur.
     
    – Cette petite était amoureuse de toi. Et comme elle savait qu'elle ne pouvait rien espérer, elle a choisi le noviciat et le voile. Certaines femmes sont d'un seul amour, même inavoué, Pacal.
     
    – Dois-je considérer qu'Anacona, après Viola, est ma deuxième victime ? osa-t-il, sachant Lamia informée de l'affaire de Pittsburgh.
     
    – Ne dis pas de bêtises. Les femmes qui ne dominent pas leurs sens, ou vivent d'illusions, n'ont que ce qu'elles méritent. Va me chercher une autre coupe de champagne, répliqua Fish Lady, avec une caresse de ses longs doigts secs sur la joue de son filleul.
     

    En février 1881, on vit entrer, dans le port de Nassau, le Western Texas d'où débarquèrent une centaine de touristes américains de mauvaise humeur et un peu pâles pour avoir, sur une mer agitée, souffert du mal de mer. Depuis quelques semaines, les paquebots côtoyaient de nombreux yachts, en escale aux Bahamas. Parmi ces beaux bateaux de plaisance, l' America captait tous les regards.
     
    Trente ans plus tôt, le 21 juin 1851, à l'occasion de l'Exposition universelle de Londres, cette

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