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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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également l’arrestation de Westermann, soupçonné d’agiter les faubourgs. Il serait joint aux autres accusés.
    Il parut bon aussi de mettre sous les verrous tous les anciens meneurs des Enragés, que le comité révolutionnaire des Gravilliers signalait comme très suspects. Neuf mandats furent décernés, dont un contre Claire Lacombe qui avait demandé un passeport pour Dunkerque où l’appelait, prétendait-elle, un engagement théâtral – mais de Dunkerque on se rend sans peine en Angleterre – un contre Leclerc d’Oze devenu secrétaire du commandant de place à La Fère, et un contre sa femme Pauline Léon. Il n’était nullement question de les envoyer, les uns ou les autres, au Tribunal révolutionnaire, mais de les tenir sous clef jusqu’à la paix.
    Le lendemain, coup sur coup, le Comité récolta deux atouts inattendus. D’abord une pièce transmise par Deforgues : une lettre adressée de Londres par le comte d’André à Danton et prouvant la connivence de celui-ci avec l’Angleterre pour une restauration monarchique. Puis la Sûreté générale découvrit, parmi les rares papiers saisis chez Danton, une autre lettre par laquelle le cabinet de Saint-James notifiait au banquier Perregaux d’avancer à plusieurs personnes, désignées par des initiales, des sommes dont certaines allaient jusqu’à cent quatre-vingt mille francs. Tout d’abord, il parut invraisemblable à Claude que Danton ait pu conserver cette lettre accablante, car si ses propres initiales n’y figuraient pas, elle démontrait néanmoins qu’il se trouvait en liaison avec les agents royalistes en France. Puis tout s’expliqua : ce papier avait été découvert, dans le petit salon, entre la paroi du secrétaire et le fond d’un tiroir. Il était resté là, alors que Danton croyait assurément l’avoir brûlé.
    « Es-tu convaincue, cette fois ? demanda Claude à sa femme en lui rapportant le fait pendant le souper.
    — C’est incroyable. Le malheureux ! soupira-t-elle. Mais as-tu la certitude que la lettre a été vraiment trouvée chez lui ? Cet affreux Vadier me semble parfaitement capable…
    — Et celle d’André ? Deforgues ne l’a pas fabriquée, tu penses ! Il l’aurait plutôt détruite. Il nous l’a transmise parce qu’il n’a pu faire autrement. Il se sait lui aussi en mauvaise posture. Et ce papier-là porte bien le nom de Danton.
    — Tout cela est navrant, dit Lise. La pauvre Louise ! la pauvre Lucile ! »
    Claude retourna vivement au pavillon de Flore. Les autres commissaires qui, eux, n’habitaient point comme lui à deux pas, avaient soupé sur place. Ils examinaient à nouveau la question Herman et Fouquier. Couthon estimait impolitique de les arrêter présentement, ce serait ajouter au trouble des esprits. Fouquier et Herman n’ignoraient pas quelle menace pesait sur eux. Cela suffirait à les rendre raisonnables. D’ailleurs, le Comité de Sûreté générale n’aurait qu’à les surveiller. On s’accorda. Barère griffonna pour Hanriot un contre-ordre à l’arrestation de l’accusateur public et du président. En même temps, sur les instances de Saint-Just et de Barère, on résolut d’arrêter Deforgues. S’il se désolidarisait aujourd’hui des Dantonistes, il n’en avait pas moins favorisé leurs intrigues. Toutefois, il ne serait pas joint à eux, on ne l’enverrait pas au tribunal, jusqu’à plus ample informé.
    À une heure du matin, Claude retraversa le Carrousel pour rentrer se coucher. C’était le 13 germinal, autrement dit le 2 avril. Les odeurs printanières venant du Jardin national parfumaient la nuit. Claude songeait aux accusés que l’on allait transférer à la Conciergerie pour les faire comparaître ce matin même. Ils se dressaient en ennemis, on ne pouvait pas les plaindre, cependant il ressentait une tristesse profonde. Le chagrin l’étreignait, l’angoisse l’agitait, comme ils devaient, pensait-il, étreindre et agiter Robespierre à l’instant de cette bataille mortelle avec d’anciens amis. Pauvre Louise ! pauvre Lucile ! se lamentait Lise, avec son bon cœur. Elle ne se doutait pas qu’elle pourrait peut-être dire aussi justement : pauvre Lise ! Il fallait la laisser dans cette ignorance, mais en l’embrassant tout endormie quand il se glissa près d’elle, et au jour quand il la quitta, si blonde, si tendre, il se demandait anxieusement s’il la serrerait encore longtemps dans ses bras. Il se retint de

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