Un vent d'acier
eux, sous les ordres d’un nommé Guérin remettaient chaque jour à Héron des rapports de ce genre :
« Le 4 messidor , an II de la République : Le citoyen L. (Legendre) était hier matin sous l’arcade du théâtre de la République, rue de la Loi, environ dix heures du matin. Il était avec le général Pareni en grande conversation qui a duré plus d’une demi-heure. Ils se sont quittés à environ onze heures. Le citoyen L. a traversé le jardin Égalité et est entré à la Trésorerie nationale où il s’est arrêté une demi-heure. De là il est revenu aux Tuileries où il est resté jusqu’à une heure et est entré ensuite à la Convention où il est demeuré jusqu’à la fin de la séance…»
« Le citoyen Ta (Tallien) est resté, le 6 messidor au soir, aux Jacobins jusqu’à la fin de la séance. Il a attendu son homme au gros bâton, rue Honoré, devant une porte cochère ; nous avons remarqué qu’il avait beaucoup d’impatience. Enfin ce garde est arrivé. Il n’y a pas de doute qu’il était dans les tribunes. Ils ont remonté la rue Honoré, celle de la Loi, les baraques, la galerie à droite du Palais-Égalité, se sont assis dans le bas du jardin, ont pris chacun une bavaroise, ont remonté sous les galeries de bois, se parlant toujours mystérieusement et se tenant sous le bras. À onze heures du soir, ils ont traversé la cour du palais et ont gagné la place Égalité. Le garde a arrêté un fiacre, a salué Ta., et ils se sont qualifiés réciproquement d’amis en disant : « À demain, mon ami. » Nous nous sommes approchés de la voiture. Ta. a dit au cocher de le conduire rue de la Perle. L’autre s’en est allé par la rue de Chartres, à pied. Nous avons couru jusqu’au pont ci-devant Royal, nous n’avons pu rejoindre le quidam. Nous présumons qu’il est entré dans une allée, ou qu’il demeure sur la section des Tuileries, à laquelle nous l’avons signalé : une veste rouge et blanche, à grandes raies, culotte noire, un gilet, chapeau rond, cheveux blonds et en rond. »
« Hier, le citoyen Ta. est sorti de chez lui à une heure et demie après midi, a passé rue des Quatre-Fils, rue du Temple… s’est amusé plus d’une heure à marchander des livres, est entré au Palais-Égalité, toujours en regardant de côté et d’autre, d’un air inquiet. Il est entré à la Convention, a parlé avec un ou deux députés, est redescendu par le grand escalier, est allé comme pour sortir par les cours, mais il s’est ravisé, a pris par le Jardin national, a monté par le bas de la terrasse des Feuillants et est retourné sur ses pas, a remonté ladite terrasse par l’escalier qui fait face au café Hottot, s’est encore amusé à marchander des livres un grand quart d’heure ; de là a pris la porte du Manège et est entré chez Venua, restaurateur n o 75…»
« Du 13 messidor , an II de la République une et indivisible : B. D. L. (Bourdon de l’Oise) est entré à la Convention le 11 courant à midi et demi, en est sorti à la fin de la séance, a été rue Honoré n o 55 avec plusieurs citoyens, en est sorti deux heures après pour aller rue des Pères n o 143o, s’y est arrêté dix minutes, a descendu la rue, a parlé à deux jeunes citoyens, l’un d’environ quinze ans, l’autre de dix. Ensuite a parlé avec une citoyenne qui avait une petite fille, a continué son chemin pour aller rue du Roule chez le premier marchand de musique en entrant par la rue Honoré. Il s’y est assis environ deux heures ; nous avons remarqué qu’il y est entré plusieurs citoyens. Il en est sorti avec un citoyen le tenant par-dessous le bras, ils se sont quittés près du Louvre. Il est allé au Jardin national où il a parlé à quatre citoyens. Après les avoir quittés, il a rejoint une compagnie de six personnes, dont il y avait deux citoyennes. Après avoir conversé très longtemps, il a quitté la compagnie avec un citoyen d’environ quarante-cinq ans, en cheveux ronds, comme les ci-devant prêtres ; ils se sont promenés d’un bout à l’autre de la même allée, du côté des Feuillants, ont parlé à plusieurs citoyens en différentes fois et en ont salué plusieurs autres. Ne s’est séparé dudit citoyen qu’à neuf heures, et s’est promené seul dans la même allée, est entré au cabinet d’aisances, en est ressorti, s’est assis ensuite près d’un arbre, à la descente de la terrasse des Feuillants où il a resté
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