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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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lui avaient écrit aussitôt en lui demandant la raison d’une folie qui les arrêtait en pleine offensive victorieuse.
    Avec ses dispositions colériques, Carnot prit très mal les remontrances de Saint-Just. À l’indignation du jeune homme, il prétendit justifier son plan, maintenir ses directives. Alors Saint-Just, furieux : « Je ne te croyais qu’incapable ; ton obstination montre clairement que tu as lié partie avec les ennemis de la république ! » C’eût été à croire, car Cobourg en personne n’aurait pu inspirer une manœuvre plus apte à le sauver, lui et la coalition. Mais Claude savait Carnot insoupçonnable. Il s’était laissé séduire par ce vaste plan d’opérations combinées, et l’orgueil l’enfonçait dans cette erreur. Claude intervint, avec Prieur et Lindet. Ils apaisèrent un peu les antagonistes. Carnot, raisonné, consentit à révoquer ses ordres. Seulement, Saint-Just parti, il continua de vitupérer avec rancune « ce morveux » qui osait insulter à son patriotisme.
    Le bureau de police ayant été, à l’origine, placé entre les mains de Saint-Just, Robespierre dut lui en rendre la direction. Saint-Just aurait voulu la partager avec d’autres membres du Comité, et ramener ce bureau à sa destination primitive : la surveillance des fonctionnaires. Claude refusa la proposition, tous les autres également. Billaud-Varenne déclara : « Robespierre, abusant de la confiance qu’il a usurpée, a dénaturé secrètement cette institution. On ne saurait la ramener à sa forme première. Ce n’est pas avec les agents d’Herman que nous pourrions surveiller Herman, entre autres. » Un peu plus tard, il confiait à Claude, amèrement : « Robespierre a tout pourri, on ne rétablira point les choses sans une action énergique. » Chacun sentait la nécessité d’une pareille action, et nul n’osait en prendre l’initiative : ni les adversaires de Robespierre ni lui-même. Personne ne savait plus trop sur qui compter. Saint-Just avait eu cette phrase effrayante, car elle menaçait tout le monde : « Tant d’hommes, utiles pendant quelque temps, ont succombé par ambition. Il en sera de même de ceux qui voudraient les imiter. Soyons ingrats si nous voulons sauver la patrie. »
    Tout pouvait se produire. La défiance empoisonnait pour eux ces brûlantes journées de messidor, où dans un vertige sanguinaire le Tribunal révolutionnaire faisait tomber les têtes par centaines sur la place du Trône. Les cadavres remplissaient les charniers de Picpus, tandis qu’à l’autre extrémité de la ville, les oisifs de toute sorte – sous un régime qui proscrivait l’oisiveté – cherchaient le frais sous les ombrages du Jardin national, et qu’en dépit de la misère, des lois égalitaires, un flot de voitures emportait par les Champs-Élysées vers le bois de Boulogne les élégantes en mousselines, abritées sous des parasols de couleurs vives, et escortées par des muscadins.
    Plus maigre, plus bilieux que jamais, Maximilien cherchait lui aussi la paix de la campagne. Avec Brount, son grand danois, il parcourait les bois de Saint-Cloud, de Ville-d’Avray, les coteaux de Suresnes, en compagnie d’un des fidèles ou d’Éléonore. Un jour, ainsi, au coin d’une vigne, à Puteaux, il se trouva soudain en face de Bosc, l’ami des Roland, le tuteur de la jeune Eudora, qui se cachait depuis près d’un an et ne sortait que déguisé. Maximilien le reconnut et dit avec étonnement à Didié : « Je le croyais mort ! » Mais il n’entreprit rien contre lui. Il allait aussi à Choisy, chez Vaugeois, avec les Duplay, le jeune ménage Le Bas. Fleuriot-Lescot, Payan, Dumas, Herman, Hanriot et ses aides de camp y venaient dîner ou souper. D’après les informateurs de Vadier et d’Amar, il se rendait également, avec ses amis, à Vanves, chez M me  de Chalabre, une de ses premières admiratrices et la plus fidèle, qui, à Paris, pour être proche de lui, logeait chez l’imprimeur Nicolas.
    Vadier profita de ces absences pour proposer à la Convention un décret mettant automatiquement en liberté provisoire les laboureurs, manouvriers, moissonneurs, brassiers et artisans de profession détenus dans les prisons de village. Les deux Comités avaient approuvé cette proposition. Elle répondait aux intentions de Saint-Just, exprimées dans son discours du 26 germinal : « Les juges rendront compte de la justice refusée aux pauvres des

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