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Une tombe en Toscane

Une tombe en Toscane

Titel: Une tombe en Toscane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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saint libertin, qui ne veut pour temple que les jardins et pour prière que des chansons.
     
    Jean-Louis, qui venait de décider qu'il rendrait le matin même visite aux Batesti, ne put s'arracher au sortilège printanier. Il mit un costume gris et une cravate bleue qui lui parurent tout de suite affreusement tristes, car dans le soleil, les teintes graves et sérieuses devenaient pauvres.
     
    Il se souvint alors que son père portait parfois une cravate de soie dont les couleurs à la fois vives et fatiguées l'avaient toujours étonné. En fouillant la chambre paternelle, il avait vu qu'elle venait de Florence. C'était peut-être, pour Louis Malterre, le souvenir d'un jour de printemps semblable à celui qui commençait, vécu au côté d'Anna.
     
    En traversant le hall du Palazzo, il croisa la comtesse et se souvint qu'il ne l'avait pas revue depuis que, dans son salon, elle lui avait conté l'histoire de la famille Batesti.
     
    - Comment allez-vous ce matin ? dit-elle.
     
    Jean-Louis dut reconnaître que le printemps influençait toutes choses, puis il annonça :
     
    – J'ai l'intention de rendre visite aux Batesti, comme s'il désirait obtenir l'assurance que cela pouvait se faire.
     
    - Vous pouvez, dit la vieille dame. J'ai rencontré Carlo hier. Je lui ai dit que vous étiez à Sienne. Il vous attend. Le jour de primavera est le mieux choisi pour faire connaissance.
     

2.
     
    Le grand portail à clous du palais Batesti était ouvert à deux battants, de huit heures du matin à la nuit tombante. Une énorme lampe de fer forgé descendant de la voûte au bout d'une chaîne et dissimulant dans ses arabesques rouillées une ampoule trop faible, mettait une pénombre jaune dans le hall d'entrée. On avait l'impression de pénétrer dans un couvent ou dans une Trappe et Jean-Louis n'aurait pas été étonné si des moines à capuche rabattue s'étaient profilés derrière les grilles qui séparaient le hall d'une courette dallée d'où émergeait la margelle d'un puits.
     
    La clarté du jour provenant de la courette rivalisait sous la voûte du hall avec celle de la lampe. C'était un mélange de lumières qui ne servait qu'à déconcerter le regard et empêchait de deviner, autrement que sous l'aspect de masses, situées de part et d'autre du hall, deux statues mutilées venues de l'ancienne villa que les Batesti avaient jadis possédée au flanc du Monte Amiata.
     
    À gauche du hall, Jean-Louis découvrit une porte vitrée au sommet de trois marches. Il tira une sonnette qui déclencha, à travers de lointains couloirs, un relais d'échos. Enfin, un vieil homme glissant sur des pantoufles et portant une veste de toile rayée vint ouvrir.
     
    – Je suis Jean-Louis Malterre, je voudrais parler à M. Carlo Batesti.
     
    Sans dire un mot le vieillard lui fit signe d'entrer en s'inclinant gravement. Puis d'un petit geste de la main il invita Jean-Louis à le suivre. Par d'interminables couloirs nus, mais rendus luxueux par les mosaïques de marbre, les fresques pompéiennes des plafonds, les boiseries des murs, Jean-Louis derrière son guide parvint au pied d'un escalier monumental, défendu par deux animaux étonnants, à la fois chiens et lions, sculptés dans une pierre jaune comme de l'agate.
     
    Tandis que Jean-Louis gravissait les marches sur un étroit tapis usé jusqu'à la corde et dont la pauvreté tranchait sur l'inaltérable splendeur du marbre blanc, il observait le vieillard qui le guidait à travers cette maison, comme autrefois peut-être il avait conduit son père. Le domestique, bien que montant l'escalier sans peine, paraissait maintenu par la seule rigidité de son col officier, serré sur une sorte de collier très large de toile blanche.
     
    Au palier du deuxième étage, meublé de deux commodes anciennes et d'un coffre, le domestique eut un nouveau geste de la main, pour inviter Jean-Louis à attendre. Debout, appuyé à la balustrade, le jeune homme vit s'éloigner le vieillard.
     
    Il put alors, comme il en avait le désir depuis qu'il avait commencé à gravir l'escalier, lever les yeux vers les étages supérieurs pour essayer de deviner la hauteur de la chute d'Anna et de son père. Mais le palais était trop sombre pour qu'il puisse voir plus haut que le palier de marbre du troisième étage et, déjà, le domestique revenait. Toujours silencieux – Jean-Louis pensa qu'il était peut-être muet – le vieil homme s'inclina une nouvelle fois pour l'inviter à

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