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Une veuve romaine

Une veuve romaine

Titel: Une veuve romaine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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t’ennuierait pas de t’arrêter un peu pour me parler ?
    — C’est toi qui vas parler. (Sa bouche se crispait de colère, mais elle parvenait à maîtriser sa voix.) Tu as beaucoup d’explications à me fournir. Tu surveilles ma maison depuis une semaine, et tu me suis ouvertement partout. Un de mes locataires m’a même dit que tu étais allé lui poser des questions impertinentes sur ma vie privée…
    — Tu devrais commencer à y être habituée ! l’interrompis-je. De toute façon, il est faux de dire que je te suis partout. J’ai évité la pantomime. Je l’avais déjà vue. L’orchestre jouait un ton en dessous, l’intrigue était bête au point d’en être insultante, et le vieux mime chauve aux yeux globuleux était handicapé par son arthrite !
    — Moi, ça m’a bien plu. J’ai l’habitude de me forger mes opinions moi-même. Tu as un nom ?
    — Didius Falco.
    — Détective ?
    — Exact.
    — Et c’est toi qui me méprises ! (Je n’avais rien à voir avec ces vers de terre qui épient les sénateurs pour vendre leurs sordides indiscrétions à Anacrites au palais, ou à leurs femmes frustrées, mais je laissai passer l’insulte.) Alors, Falco, qui te paye pour m’espionner ?
    — Certains membres de la famille de ton fiancé. Tu ne peux pas les blâmer.
    — Je ne les blâme pas, rétorqua-t-elle sèchement. Dis-toi bien que nous parviendrons à un accord en temps voulu. Elles prennent soi-disant ses intérêts à cœur… Moi aussi, figure-toi.
    — Tu es amoureuse ? demandai-je sur un ton caustique.
    — Qu’est-ce que tu en penses ?
    — Aucune chance ! Et lui ?
    — J’en doute.
    — Voilà une réponse honnête !
    — Novus et moi savons faire preuve de bon sens. L’amour romantique dure rarement longtemps.
    Je me demandai alors si Hortensius Novus n’était pas plus épris qu’elle. Un homme qui a su rester célibataire si longtemps a certainement besoin d’une bonne raison pour abandonner sa liberté. La fille s’adressait à moi avec une froide lucidité, qu’elle masquait sans doute quand elle se trouvait en sa compagnie. Il était tout à fait probable que le pauvre vieux Novus se faisait des illusions sur la modestie affectée de sa bien-aimée.
    Plongeant la main dans un panier pour y prendre un nouvel écheveau de laine, Severina redressa la tête. Elle resta un moment à me fixer. Pendant ce temps-là, j’essayais de comprendre pourquoi elle avait osé prendre cette initiative. Et pourquoi aujourd’hui. Il pouvait s’agir d’un simple énervement, à force de se voir suivie. Mais j’étais sûr, néanmoins, qu’elle aimait jouer avec le feu.
    Elle se redressa sur son siège, laissant reposer son menton pointu sur ses doigts blancs fuselés.
    — Tu ferais mieux de m’exposer les craintes de certains membres de la famille, suggéra-t-elle. Je n’ai rien à cacher.
    — Leurs craintes sont celles que n’importe qui éprouverait, jeune dame : ton passé sordide, tes mobiles actuels, et tes projets pour le futur.
    — Je suis certaine que tu n’ignores pas, rétorqua-t-elle (toujours détendue en apparence, mais avec certaine lueur dans le regard qui me réjouissait), qu’une enquête poussée a déjà été faite sur mon passé.
    — Par une vieille enflure prétorienne qui n’a même pas eu assez de bon sens pour prêter l’oreille à son commis. (Le regard qu’elle me jeta pouvait s’interpréter au choix comme une soudaine marque de respect, ou une antipathie croissante.) Commis qui te porte un grand intérêt – il n’en fait pas secret. Qu’as-tu pensé de lui ?
    La question parut amuser Severina, mais elle pesa sa réponse.
    — À vrai dire, rien.
    — Mensonges, Zotica ! Eh bien, je suis le nouveau pion dans cette partie. Strictement neutre. Pourquoi ne me murmurerais-tu pas à l’oreille ce qui s’est vraiment passé ? Commençons par ta première manœuvre. On retrouve ta trace enfant sur le marché aux esclaves de Délos ; puis tu as fini par débarquer à Rome, où tu as épousé ton maître. Comment as-tu réussi à te débrouiller ?
    — Tout s’est fait naturellement. Moscus m’a achetée parce que j’avais l’air éveillé. Il cherchait quelqu’un pour gérer ses stocks et…
    — Et ton don pour les chiffres t’a mise en bonne place pour devenir son héritière.
    Je la vis prendre une longue inspiration, mais elle ne se mit pas en colère, comme je l’avais espéré. Pour une

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