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Victoria

Victoria

Titel: Victoria Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Joanny Moulin
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veut, et ils se comportent tout à fait comme au temps de la vieille Révolution du siècle dernier, quoiqu’ils n’aient pas encore tout à fait commis toutes les mêmes horreurs. Cependant, ils jettent les prêtres en prison, etc. Ils ont brûlé la guillotine et fusillent les gens à la place. Je suis bien contente d’avoir revu Paris une dernière fois, mais je ne tiendrais pas à y retourner. »
    Le 21 mars, dans ce climat quelque peu tendu, le mariage de la princesse Louise et du marquis de Lorne est célébré à Windsor. Les tories de la Haute Église ont trouvé à redire à ce que cette célébration ait lieu pendant le carême. Nul ne s’en soucie moins que la princesse Béatrice, fille cadette de Victoria, qui est arrivée en robe de satin rose, ses cheveux blonds défaits, flottant librement dans son dos. La belle Louise est conduite à l’autel par Sa Majesté. Le jeune marquis de Lorne est un peu pâle, sa longue chevelure de feu rehaussant son uniforme écossais de colonel des Volontaires artilleurs d’Argyllshire. Après un convivial breakfast dans la galerie Waterloo du château de Windsor, les nouveaux mariés partent pour leur lune de miel à Claremont, sous une avalanche de chaussons de satin blanc, sans oublier le balai neuf porte-bonheur jeté in extremis à l’arrière de la calèche.
    Quelques jours plus tard, à Kensington, Sa Majesté inaugure le Royal Albert Hall. Les travaux ont pris un peu de retard. Victoria est venue les inspecter quelque temps auparavant. « Cela ressemble à la Constitution britannique », a-t-elle fait remarquer en trouvant l’édifice inachevé. C’est un grand auditorium circulaire en brique rouge, décoré de moulures en terre cuite beige. La frise extérieure consiste en une large mosaïque allégorique, représentant le « Triomphe des Arts et des Sciences ». Le prince de Galles prononce le discours inaugural, dans cette immense salle de spectacle dont l’acoustique se révèle décevante. Victoria, bouleversée par ce monumental hommage au souvenir d’Albert, se trouve trop émue pour articuler un mot. Au terme d’un respectueux silence, Bertie s’exclame : « La reine déclare ce Hall dorénavant ouvert ! »
    Le lendemain, 27 mars 1871, Victoria descend le grand escalier du château de Windsor, accompagnée de ses enfants et de sa suite. Un petit homme assez corpulent, à la mine grise, les moustaches tombantes, attend à la porte. Elle l’embrasse sur les deux joues, « comme de rigueur ». Il s’efforce visiblement de contenir son émotion, des larmes dans les yeux.
    « Il y a bien longtemps que je n’ai vu Votre Majesté », lui dit en français l’empereur Napoléon.

52
    « La reine a bien supporté son voyage vers le Nord, mais est toujours indisposée. » Le Court Circular , bulletin officiel de la cour publié quotidiennement dans les principaux journaux, émet des nouvelles laconiques. Le 4 août, Victoria s’est réveillée en pensant avoir été piquée par un insecte sous le bras droit. La crise de rhumatismes qui est survenue dans les jours suivants étant particulièrement éprouvante, elle est partie pour Balmoral. L’érythème à l’aisselle suppure et les douleurs musculaires s’amplifient au point de l’immobiliser tout à fait. À la fin du mois, un abcès aux amygdales s’est formé sur la gauche de son cou. L’infection lui occasionne une très forte fièvre et de graves maux de tête. Ne dormant plus, incapable de se nourrir, Victoria a perdu douze kilos. Le Dr Jenner craint que Sa Majesté ne succombe d’un jour à l’autre à la septicémie.
    Victoria exige le plus grand secret et ne laisse paraître que des bulletins vaguement anodins. Elle tient à l’écart son secrétaire particulier, Sir Henry Ponsonby, dont elle sait pertinemment qu’il informe ses amis libéraux des moindres détails de son existence. Le bruit court que la reine prend une fois de plus prétexte de sa santé pour se soustraire à ses obligations officielles. Le Dr Jenner tente de dissiper ce malentendu en publiant un article anonyme dans le journal médical Lancet . Mal lui en prend, car les spéculations redoublent et laissent supposer que Victoria est sur le point d’abdiquer. Sir William Jenner est convaincu que Gladstone et son gouvernement sont à la source de la rumeur.
    « Si elle était un homme, dit-il à Ponsonby, ils n’oseraient pas la traiter de manière si indécente.
    — Non, rétorque le

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