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Vikings

Vikings

Titel: Vikings Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Weber
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néanmoins d’un gros morceau qu’elle plongea sans attendre dans sa bouche.
    — Je me souviens que lorsque j’étais enfant, expliqua Le Bihan, ma mère m’avait conduit auprès de Léonie. J’avais souvent mal aux oreilles et le médecin de famille avait fini par avouer son impuissance. La réputation de guérisseuse de la vieille dame en avait fait notre dernier recours. Et le plus extraordinaire dans cette histoire, c’est qu’elle m’a soigné ! Je n’ai plus jamais eu mal.
    — Pour sûr qu’elle est forte, la Léonie, répondit la femme avec la même fierté que si elle parlait d’elle-même. Mais tout le monde ne l’aime pas dans la région. Certains continuent même à dire que c’est une sorcière, comme si nous étions encore au Moyen Âge... Mais moi je sais que c’est une bonne vieille. Aujourd’hui, elle a perdu la vue, mais elle continue à voir beaucoup mieux que pas mal de fanfarons qui courent les vallées.
    Le Bihan soupira avec satisfaction. Le chocolat et ses confidences d’enfant avaient achevé d’amadouer le cerbère. La femme ne semblait même plus vouloir s’arrêter et poursuivit :
    — Dans ma famille, on lui est toujours venu en aide. On lui apporte régulièrement du bois pour se chauffer, des fruits, des légumes et même de la viande quand c’est possible. Et on ne regarde pas ce qu’elle trafique, ce ne sont pas nos affaires !
    Le jeune homme se demanda ce que voulait dire la dernière phrase. La vieille Léonie aurait-elle d’autres secrets ? Il fit semblant de ne pas se préoccuper des révélations de la femme et reprit fermement en main le guidon de sa bicyclette.
    — Alors, lui dit-il gaiement, êtes-vous prête à me conduire chez notre amie ?
    — Mmmh, grimaça la femme dans une expression à première vue intraduisible, mais qui devait signifier l’acquiescement.
    Elle l’invita à le suivre vers un petit fourré feuillu où elle écarta les branches. Le Bihan éprouva quelque difficulté à pousser sa bicyclette endommagée dans cet enchevêtrement végétal, mais il finit par y arriver. Au passage, il dérangea un bouvreuil qui avait élu domicile sur une branche non loin de l’eau. La petite rivière de son enfance se dévoila devant ses yeux. La femme marchait d’un bon pas sur le sentier de terre que l’humidité rendait glissant.
    — Ainsi, vous êtes historien ? lui demanda-t-elle. Ça sert à quoi un historien ? À raconter des histoires ?
    — En quelque sorte, sourit Le Bihan, on peut dire cela. Mettons que je raconte de véritables histoires. J’essaie de retracer le cours des choses, telles qu’elles se sont vraiment passées.
    Tout en poursuivant son chemin, la femme prit le temps de la réflexion. Le Bihan l’observa alors qu’il ne l’avait pas encore fait depuis leur rencontre. Il était difficile de lui donner un âge précis, comme à toutes ces femmes de la campagne qui ne se préoccupaient pas de la dernière mode de Paris ou des artifices du maquillage. Mais probablement était-elle plus jeune qu’elle ne paraissait. Il se prit à songer à Joséphine et se dit que les deux femmes ne devaient pas avoir grand-chose en commun. Il alla même jusqu’à se demander ce que Joséphine pourrait se dire en le voyant comme ça, marcher derrière une inconnue le long d’une rivière à l’abri des regards. Il aurait aimé qu’elle soit jalouse. Mais rien ne lui permettait de l’affirmer.
    — Ils disent tous ça, reprit la femme qui tira Le Bihan de ses rêveries. Raconter la vérité. La belle affaire ! Mais tout le monde possède sa propre vérité et l’une n’est pas nécessairement plus belle ou plus vraie que l’autre. Pas vrai ?
    — Oui, probablement. Vous vous appelez comment ? demanda Le Bihan. Moi, c’est Pierre.
    — Moi, c’est Jeanne, répondit-elle tout en continuant à marcher et à réfléchir à l’utilité d’un historien.
    Bientôt, les branches se firent moins nombreuses et le chemin plus facile. Jeanne avait ramassé un bâton avec lequel elle s’amusait à fouetter des animaux imaginaires. Pour sa part, Pierre continuait vaillamment à pousser son engin.
    — En fait, reprit-elle, un historien, c’est comme un métayer. Ça ne sert à rien, mais ça fait semblant d’être important. Ce n’est pas d’historien dont nous avons besoin aujourd’hui en France. Ce qu’il nous faut, ce sont de bons soldats, des types courageux. Comme mon frère, tiens...
    Jeanne se tut

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