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Voyage en Germanie

Voyage en Germanie

Titel: Voyage en Germanie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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    En dépit des années que j’avais passées à observer les sénateurs, l’arrogance de celui-ci me coupa le souffle. D’une façon ou d’une autre, il allait falloir rentrer au bercail. J’étais prêt à marchander. Je me campai encore plus fermement sur mes positions et lançai au légat de but en blanc :
    — Si ce Gaulois fait partie de tes amis, tu ferais bien de te montrer plus prudent. Il va sans doute devoir répondre de la mort de deux hommes à Cavillonum. (Je lui laissai une échappatoire :) Les victimes étaient des habitants de la province que tu commandes. La collectivité de Moguntiacum attend de toi que tu t’en occupes.
    J’avais correctement jaugé l’homme.
    — On dirait que j’ai des choses à tirer au clair !
    Le légat prit imperceptiblement de la distance vis-à-vis de l’homme au menton fendu. Les rusés renards ont un chic consommé pour manger à tous les râteliers, en fin de compte.
    — Je n’ai aucune idée de la raison de ta présence ici, relança le légat du ton stylé, élégant, aristocratique de qui s’attend à s’en tirer avec tous les honneurs compte tenu de son origine stylée, élégante et aristocratique. Pour ma part, je suis en train d’effectuer une opération de reconnaissance politique.
    C’était une façon de décrire son détournement des fonds publics.
    — Ah oui ? (L’agacement que j’éprouvais à entendre son ton désinvolte me faisait la voix coupante.) Civilis, c’est ça ? L’Île ? Batavodurum ? Tu es resté longtemps à Vetera ?
    — Ce qui m’intéressait, c’était de me balader dans les environs…
    Un voyeur. Helvetius était agité de soubresauts convulsifs. Je perdais patience, moi aussi.
    — Constater les dégâts, humer la catastrophe, emporter une des pierres du rempart en guise de souvenir ? Quelques jours de répit par là-dessus pour la vraie chasse, et dommage pour le solide ancien combattant romain qui croise le chemin de tes lances… En fait, je pensais que tu avais sans doute traversé le fleuve pour aller négocier avec la prophétesse.
    — Veleda ? (Gracilis eut l’air véritablement choqué.) Vespasien n’enverrait personne affronter cette sorcière !
    Je décidai de ne pas le détromper.
    — Alors, tu as trouvé Civilis ?
    — Non, répondit-il.
    Oh, après tout, il était sénateur. Il finirait sans doute par décrocher une couronne de lauriers simplement pour avoir tenté de le faire.
    Après tout ce que nous venions d’endurer nous-mêmes, je dus m’énerver. Je n’étais pas naïf au point d’espérer que Vespasien allait déposer ce répugnant individu sans que je lui présente quelque scandale bien plus grave que le fait de truander sur les bénéfices des contrats de fournitures ou de partir chasser en territoire barbare. Les crimes du légat portaient sur des affaires de sexe, d’assassinats et d’argent… mais pas des affaires de sexe assez ignobles pour effaroucher Rome. Pas des pots-de-vin assez substantiels pour qu’on engage des avocats chargés de sévir. Et pas assez d’assassinats.
    — Tu as dépassé les frontières, légat. À tous égards.
    Cependant, Helvetius était en train de s’affaiblir à mes pieds.
    — Je suis accompagné d’un groupe d’hommes épuisés et à demi morts de faim, plus ce centurion gravement blessé. Nous sommes chargés d’une mission impériale dont je ne peux parler publiquement, et nous voilà plantés là sans moyen de locomotion, ni cuirasses, ni vivres. Puis-je te suggérer de sauver ta réputation en nous aidant à regagner notre camp d’affectation ?
    Je m’étais trompé dans mes estimations. Le Gaulois marmonna quelque chose. Le légat de la Quatorzième soupesa cyniquement notre situation désespérée en regard des preuves que nous détenions et qui risquaient de salir son nom.
    — Va donc rôtir aux Enfers ! jeta Gracilis.
    Il avait pourtant commis une erreur, lui aussi. Une erreur pire que la mienne.
    Plusieurs incidents se succédèrent très vite. Helvetius émit un pitoyable gémissement qui me précipita à genoux à côté de lui. Le Gaulois brandit sa javeline. Des éclats de voix suspendirent son geste. À l’autre bout du talus, Orosius surgit de buissons touffus, flanqué de Lentullus portant toujours son seau à crustacés, et du domestique du centurion. J’étreignis le poignet d’Helvetius pour lui signifier de garder son calme le temps que je m’occupe de tout.
    Un violent soubresaut le parcourut alors. Il me

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