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Voyage en Germanie

Voyage en Germanie

Titel: Voyage en Germanie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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romain qu’on lui livra ligoté dans sa tour pour qu’elle s’en serve d’esclave sexuel ou autre ! À ton avis, Justinus, qu’a-t-elle fait de Lupercus ?
    Camillus Justinus frissonna, refusant d’y songer.
    La tête me tournait. Le moment semblait venu de me mettre à bâiller tant et plus, tel un voyageur fatigué, puis d’aller me coucher.
    Les notes du buccin sonnant la relève de la garde de nuit me dérangèrent, et je rêvai que j’étais à nouveau une jeune recrue.

21
    Le lendemain, je réfléchis frénétiquement aux casse-tête que Vespasien m’avait chargé d’élucider. Difficile de se sentir soulevé d’enthousiasme à la perspective de cette liste abracadabrante. Je me rabattis donc sur l’étude de l’unique problème dont nul ne m’avait demandé de m’occuper : j’allai rendre visite à la femme du légat disparu. En traversant la partie du fort allouée à la XIV, je dois dire que je me sentais passablement convaincu qu’on finirait par découvrir que l’éminent Florius Gracilis n’avait pas disparu du tout.
    La maison du légat était rigoureusement telle qu’on se l’imaginait. Étant donné que Jules César, même lorsqu’il combattait en territoire hostile et tirait le parti maximum de ses ressources, acheminait par charrettes des panneaux de mosaïque destinés à daller sa tente afin de faire montre de la splendeur romaine aux tribus, il n’y avait guère de risque pour qu’une résidence diplomatique en bonne et due forme implantée à l’intérieur d’une forteresse manque du moindre confort. La demeure était aussi vaste que possible, et décorée à l’aide de somptueux matériaux. Pourquoi pas ? Les occupants successifs, dont les nobles épouses regorgeaient d’idées, réclamaient tous des améliorations. Tous les trois ans, la maison était mise à nu puis refaite de façon à flatter des goûts différents. Et les fantaisies les plus folles étaient réalisées aux frais de l’État.
    La résidence était construite autour d’une enfilade de jardins intérieurs ornés de longs bassins et de fontaines sculptées qui distillaient dans l’atmosphère une bruine fine et dense. En été, on devait y voir une abondance tapageuse de fleurs ; en octobre, les arbustes impeccablement taillés prenaient une solennité plus dépouillée. Mais il y avait des paons, des tortues. Au matin, quand j’arrivai, un sourire plein d’espoir aux lèvres, balayeurs de feuilles et jardiniers grouillaient alentour tels des pucerons. Les véritables pucerons, eux, n’avaient aucune chance. Moi non plus, probablement.
    À l’intérieur, c’était une kyrielle de salles de réception ornées de fresques. Le stuc blanc éclatant des plafonds éblouissait l’œil. Les sols se composaient de mosaïques aux somptueux effets tridimensionnels. Les lampes étaient dorées à la feuille – et scellées dans les murs –, les urnes immenses – trop lourdes pour qu’on s’enfuie avec. Des gardes discrets effectuaient leur ronde sous les colonnades ou étaient postés en retrait parmi les statues helléniques. À la vue des meubles du salon, mon directeur d’enchères de père se serait mangé les ongles et aurait entraîné le régisseur de la maisonnée derrière un pilier, histoire de discuter tranquillement.
    Le régisseur en question connaissait son affaire. Depuis longtemps, Florius Gracilis avait opéré une transition en douceur de l’état de célibataire relax, dans lequel vivait encore Camillus Justinus, à un monde d’incessantes distractions mondaines de la plus haute volée. Sa maison était tenue par des bataillons de laquais entreprenants, dont la plupart devaient être à son service depuis quasiment deux décennies d’une vie mondaine sénatoriale totalement débridée. Étant donné que la plupart des hauts dignitaires partent s’installer dans leur province de rattachement aux frais de l’État, le légat avait apporté non seulement ses têtes de lit en écaille de tortue et ses lampadaires Cupidon dorés à l’or fin, mais tant qu’à faire ses bagages, il y avait adjoint une femme. Toutefois, avant même de faire la connaissance de cette dernière, je compris qu’ajouter une jeune épouse à ce train bien huilé s’était sans doute révélé superflu.
    Mon enquête à Rome m’avait appris que Gracilis avait l’âge normal du commandant de légion. Il allait sur la quarantaine : pas encore d’arthrite, mais assez de maturité pour faire

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