Will
dit-il en en proposant une au comte le plus
proche, nous sommes satisfaits de nos arrangements. Vous pouvez partir. »
Bonne-Âme inclina sa vieille tête blanche et se retira en
fermant la porte. « Je vous laisse vous reposer.
— Mon frère prépare quelque mauvais tour, remarqua le
roi, qui plongea le nez dans sa coupe pour ingurgiter une bonne rasade de vin.
Je le sens dans mes os.
— Connaissez-vous le Bellay ? lui demanda le comte
de Leicester.
— Je connais mon frère…
— S’il doit y avoir du grabuge…», commença le jeune
lord Warwick.
Le roi l’interrompit d’un geste impatient de la main.
« Nous n’en arriverons pas là, je pense, lui dit William en lui tendant
une coupe. Pas encore, du moins. » Il but de nouveau, et ajouta :
« J’aimerais quand même savoir ce que lui et ses flagorneurs manigancent.
— Ces hommes, là-bas, dit Leicester. Qui
étaient-ils ?
— Dieu seul le sait, répondit le roi. Je n’avais jamais
vu ces coquins auparavant. Et vous ?
— J’en ai peut-être déjà rencontré un ou deux.
Difficile à dire. » Il replaça sa coupe sur la table puis ajouta :
« Je crois que je vais aller voir si je peux découvrir quelque chose.
— Pas d’inquiétude », dit le roi. Il s’écroula
lourdement sur une chaise puis en poussa une autre en direction du comte.
« Venez. Asseyez-vous. Vous devez être aussi fatigué que moi. Nous allons
boire et nous reposer un peu.
— Avec tout mon respect, sire, je me reposerais plus
facilement si je savais qui sont ces hommes et ce qu’ils font ici. »
Le roi haussa les épaules. « Alors allez-y, mais
hâtez-vous de revenir. Et dites au chambellan que nous avons besoin de viande
pour accompagner ce pain et ce fromage.
— Bien sûr, mon seigneur », dit le comte de
Leicester en se précipitant vers la porte. Il espérait attraper l’archevêque
pour lui dire quelques mots en privé avant que le vieil homme disparaisse dans
la caverne de son palais.
« Et plus de vin ! » lui cria le roi.
William se pencha en arrière dans sa chaise et ferma les
yeux.
« Sire ? » s’enquit le comte de Warwick en
écartant sa coupe. Il vint se poster devant le roi. « Si vous le
permettez, proposa-t-il en indiquant les pieds du monarque, je crois que nous
pourrions faire sécher un peu ces bottes. »
William hocha la tête puis, avec un soupir, leva un pied
pour que le jeune homme puisse enlever la chaussure trempée. Tandis que le
comte s’occupait de la deuxième botte, il avala une nouvelle goulée.
« Et voilà, dit Warwick quand il en eut fini. C’est
mieux, non ?
— Mmmm, murmura William dans sa coupe. Beaucoup
mieux. »
Le comte porta les bottes mouillées devant le foyer, puis
revint s’asseoir à la table. Tous deux sirotèrent leur vin en silence un
certain temps, laissant le liquide doux et sombre atténuer les tensions du
voyage.
« Tout est la faute de mon père, songea William à voix
haute au bout d’un moment. S’il n’avait pas promis le trône d’Angleterre à mon
imbécile de frère, tout irait bien. Il a nourri les espoirs de Robert, et cet
idiot y a accordé une trop grande valeur – beaucoup plus que ce que ça
vaut. » Il vida sa coupe et la remplit derechef. « La vérité,
poursuivit-il, c’est que cette fichue île coûte plus que je ne pourrai jamais
en tirer.
— Ça n’a jamais été autrement, remarqua Warwick. Le roi
Harold n’avait jamais deux pennies à astiquer en même temps, ainsi que mon père
avait coutume de dire. Et Aelred a eu des dettes depuis le jour de son
couronnement jusqu’à celui de sa mise en terre.
— C’est censé me réconforter, Warwick ?
— Je vous rappelle simplement que votre situation est
ni plus ni moins celle que tous les souverains anglais ont endurée. Dieu sait
que c’est déjà assez difficile pour un comte, sans parler d’un duc ou d’un roi.
— Le duc Robert s’en sort plutôt bien », fit
observer William. Il prit une tranche de pain, la rompit et en fourra la moitié
dans sa bouche. Il mâcha bruyamment un moment. « Évidemment, c’est moi qui
lui ai donné presque tout ce qu’il possède.
— Coupez-lui les vivres, sire, suggéra Warwick. Ou
faites-lui signer un traité en échange de sa promesse de ne jamais soulever de
nouvelle rébellion contre vous. Forcez-le à mettre son nom dessus.
— Robert ne serait rien s’il ne pouvait compter sur mon
soutien, gronda William, son pain à
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