1940-De l'abîme a l'espérance
Picards et des Champenois, la détention abominable de deux millions de jeunes Français, l’assassinat des étudiants de Paris, ont renseigné tout le monde. »
Ici, ce n’est point la soumission qu’on prêche aux Français mais « la passion salutaire d’où sortira leur délivrance ».
Et martèle de Gaulle : « Cette passion, c’est la fureur, la bonne fureur, la féconde fureur, à l’égard de l’ennemi et de ses collaborateurs… Solide fureur… puissante fureur… noble fureur qui anime nos Forces Libres servant sous les trois couleurs et la croix de Lorraine… C’est cette sainte fureur française, celle de Jeanne d’Arc, celle de Danton, celle de Clemenceau, qui nous rend l’espérance, qui nous fait retrouver des armes.
« Cultivons cette fureur sacrée pour hâter le jour où la force aura fait justice de nos ennemis et de leurs amis de Vichy. »
À Vichy même, la déception de ceux qui autour de Loustaunau-Lacau espéraient voir le maréchal Pétain favoriser leur Croisade , leur réseau Alliance antiallemands, est si grande qu’ils prennent contact avec la France Libre.
Le commandant Loustaunau-Lacau a été camarade de De Gaulle à l’École de guerre, il lui écrit :
« Bravo, continuez. Ici, nous faisons ce que nous pouvons avec le Maréchal. Nous montons notre résistance. Nous essayons de tirer parti de la situation comme nous le pouvons. »
De Gaulle répond, avec vivacité. Le temps est à la clarté, à l’engagement, sans ambiguïté et sans illusions.
« Toutes les finasseries, tergiversations sont pour nous odieuses et condamnables.
« Ce que Philippe (Pétain) a été autrefois ne change rien à la façon dont nous jugeons ce qu’est Philippe dans le présent.
« Nous aiderons tous ceux qui voudront faire ce qu’ils doivent faire. Nous laissons tomber (et ils tombent très bas) ceux qui ne font pas ce qu’ils doivent.
« Mes meilleurs souvenirs. »
« La France Libre c’est la France. » « On est avec moi ou on est contre moi. »
Voilà ce que pense de Gaulle.
« C’est la terrible logique de la guerre. »
Elle fait surgir à Marseille, à Brive, à Toulouse, à Grenoble, à Montpellier, à Clermont-Ferrand, à Lyon, en cent autres lieux – et naturellement à Paris –, des groupes qui se constituent autour de quelques hommes et par affinités de pensée.
Là, des démocrates-chrétiens, ailleurs des socialistes, et tout simplement des « patriotes ». Ici, l’historien Marc Bloch, là, le philosophe Jean Cavaillès, ailleurs d’Astier de La Vigerie – officier de marine et journaliste –, le professeur Lucie Aubrac, le pilote Corniglion-Molinier, l’ami de Malraux.
Et ces « fondateurs », Henri Frenay et Edmond Michelet, Germaine Tillion au musée de l’Homme, poursuivent leurs efforts.
Ces initiatives foisonnantes – et celles des communistes – ne conduisent pas immédiatement à de Gaulle, mais leurs auteurs regardent vers lui, et l’écoutent.
Ils sont d’autant plus attentifs à l’action et aux prises de position du chef de la France Libre qu’en ce mois de novembre 1940, chacun de ces hommes engagés dans la résistance sent bien que la guerre approche d’un tournant majeur.
L’Angleterre non seulement n’est pas vaincue mais ses bombardiers attaquent presque chaque nuit Berlin.
Ses avions torpilleurs détruisent une bonne partie de la flotte italienne à Tarente. Et les troupes du Duce connaissent défaite sur défaite en Cyrénaïque, en Grèce. Les troupes anglaises ont pris pied en Crète.
L’élargissement du conflit est prévisible.
Roosevelt, le lundi 4 novembre, a été réélu pour un troisième mandat à la présidence et il renforce aussitôt ses liens avec Londres.
Les Anglais sont assurés de se voir approvisionnés, en armes et en matériel, malgré les « meutes » de sous-marins allemands.
En Europe de l’Est, des tensions de plus en plus vives aigrissent les rapports entre le Reich et l’URSS de Staline.
Hongrie, Roumanie, Tchécoslovaquie, Slovaquie sont sous influence allemande et négocient leur entrée dans le Pacte tripartite (Italie, Allemagne, Japon).
Les Russes savent désormais que la question n’est plus d’éviter la guerre avec l’Allemagne de Hitler, mais d’en retarder le plus longtemps possible le déclenchement. Dans ce but, Molotov, l’homme de Staline, le « commissaire » aux Affaires étrangères, se rend
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