1940-De l'abîme a l'espérance
l’opinion à la mesure allemande – aux propriétaires juifs d’exposer une affiche, rédigée en allemand et en français, désignant leurs biens – ateliers ou boutiques – comme une entreprise juive.
L’ordonnance allemande définit comme juives les personnes appartenant à la religion juive ou ayant plus de deux grands-parents juifs.
L’avidité des antisémites, leur désir de s’emparer des biens juifs, boutiques, appartements, ateliers, ou bien de chasser les Juifs de leurs activités, se dévoilent.
« Qu’attend-on pour désenjuiver réellement la médecine et tant d’autres corporations françaises ? » lit-on.
Le journaliste et écrivain Lucien Rebatet expectore sa haine dans Le Cri du peuple :
« On ne se débarrasse pas des rats et des cancrelats en imprimant du papier, écrit-il. Les Juifs ne sont pas moins odieux que ces parasites et bien plus malfaisants… Nous les avons laissés trop longtemps libres et impunis menant sur tous les terrains leur besogne destructive. »
Ce texte est un appel à l’extermination de ces « parasites » dont on nie l’humanité, à la manière des nazis, pour qui les Juifs ne sont que des poux.
On les accuse d’écouter la radio anglaise, d’être les grands maîtres du « marché noir », ce commerce clandestin des denrées rationnées qui échappe aux contraintes des « cartes d’alimentation » et des queues devant les boucheries ou boulangeries.
Ceux qui signent ces textes antisémites sont, au sens précis du mot, à la solde des nazis qui financent les journaux et paient donc ceux qui y écrivent.
Pour permettre cette propagande, le gouvernement de Vichy a promulgué, dès le mardi 27 août, une loi supprimant l’interdiction de diffamer et d’injurier un groupe de personnes qui appartiennent par leur origine à une race ou à une religion déterminée.
La loi supprime ainsi le décret de loi pris par Daladier le 21 avril 1939. Et Vichy déclare que cette suppression rétablit… la liberté de la presse. C’est-à-dire le droit de représenter le Juif en souhaitant son exclusion, sa mort.
Alors les journaux ne se gênent pas. On peut lire dans La France au travail :
« Sur une France décadente
Le Juif tel un chancre rongeur
Aux relents d’humeur purulente
Exhalait sa mauvaise odeur
Il se montrait plein d’arrogance
Sa face blême était partout
Dans les journaux, dans la finance
Dans les arts, il corrompait tout. »
Et cela se chante sur l’air de La Chanson des blés d’or.
Ces fanatiques stipendiés qui prospèrent à Paris, sous la protection de la Kommandantur, s’en prennent au gouvernement de Vichy, trop modéré à leurs yeux. La France au travail s’indigne ainsi :
« Est-ce un cloaque, est-ce un taudis ?
Vichy, notre station thermale ?
Pour certains, c’est un paradis
Qui met à l’abri du scandale
Ils y sont entre renégats
On couvre leur ignominie
On y blanchit les scélérats
C’est la lessive en Pétainie. »
On dénonce cette zone libre où, assure-t-on, sur la Côte d’Azur, « le danger juif est très grand ».
« Le Juif errant est arrivé à… Kahn (Alpes-Maritimes) peut-on lire dans La Gerbe. Il est arrivé au terme de cette nouvelle étape fuyant devant le champion de la race blanche qui le poursuit sans trêve ni repos sur les terres de l’Occident. Il s’est arrêté sur cette Côte d’Azur qu’il enlaidissait de ses millions et de ses vices. »
Le maréchal Pétain connaît ces critiques, le mardi 1 er octobre, quand il préside le Conseil des ministres dans un grand salon de l’hôtel du Parc, à Vichy.
« Long Conseil des ministres de 17 heures à 19 h 45, note le ministre Paul Baudouin. Pendant deux heures, est étudié le statut des Israélites.
« C’est le Maréchal qui se montre le plus sévère. Il insiste en particulier pour que la Justice et l’Enseignement ne contiennent aucun Juif. »
Ce statut des Juifs discuté au Conseil sera adopté deux jours plus tard, le jeudi 3 octobre. Sa publication est prévue dans le Journal officiel le vendredi 18 octobre 1940.
Un exemplaire est remis à Abetz, ambassadeur du Reich à Paris, qui aussitôt avertit Ribbentrop, son ministre.
Le texte français, se félicite Abetz, considère comme juive toute personne ayant plus de deux grands-parents juifs. « Tout comme en Allemagne », souligne Abetz.
Vichy est allé plus loin que les
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