1943-Le souffle de la victoire
et plein de
repères. Les chemins que nous devons prendre pour aller occuper nos tranchées
et nos abris sont jalonnés. »
Ordre est donné aux unités d’artillerie antichars de n’ouvrir
le feu qu’au dernier moment.
« Au début de la guerre, souligne un officier russe, c’était
la bousculade générale, on n’avait jamais le temps… Aujourd’hui, on va au feu
posément. »
Dans la nuit du 3 au 4 juillet, les guetteurs russes
voient se dresser devant eux une silhouette, bras levés. C’est un déserteur
tchèque d’un bataillon du génie.
Il raconte que l’on a distribué à chaque soldat une ration
spéciale de schnaps et cinq jours de vivres. L’attaque serait donc imminente, et
ce renseignement confirme les informations dont dispose la Stavka – le
comité militaire que préside Staline – selon lesquelles les Allemands
déclencheraient leur attaque entre le 3 et le 6 juillet.
Dans la nuit du 4, les Russes décident d’ouvrir le feu avec
leur artillerie de moyenne portée qui doit viser les premières lignes
allemandes et les zones de rassemblement. Mais les pièces antichars ne se
dévoileront pas.
Les soldats allemands comprennent qu’ils ne bénéficieront
pas de l’effet de surprise. Les officiers les rassemblent et leur lisent le
message personnel que le Führer adresse à ses troupes :
« Soldats du Reich !
« Vous participez aujourd’hui à une offensive d’une
importance considérable. De son résultat peut dépendre tout le sort de la
guerre.
« Mieux que n’importe quoi, votre victoire montrera au
monde entier que toute résistance à la puissance de l’armée allemande est vaine. »
Au même moment, L’Étoile rouge – le journal de l’armée
Rouge – en appelle au patriotisme russe, face à cette attaque allemande
qui menace le cœur même de la Russie, la région natale de l’écrivain
Tourgueniev, le chantre de la Russie.
« Nos pères et nos ancêtres ont fait tous les
sacrifices pour sauver leur Russie, leur patrie, écrit L’Étoile rouge. Nous
n’oublierons jamais Minine et Pojarski, Souvorov et Koutousov et les partisans
russes de 1812.
« Nous nous sentons fiers à la pensée que le sang de
nos glorieux ancêtres coule dans nos veines et que nous nous montrerons dignes
d’eux. »
À 14 heures, ce 4 juillet 1943, les 2 000 chars
allemands de la première vague se hissent hors de leurs abris dans les creux du
terrain et s’engagent, hublots et volets fermés, au milieu des blés.
Et tout à coup, des milliers de pièces antichars russes
ouvrent le feu.
« Nous avons l’impression d’avancer dans un cercle de
feu », note l’opérateur radio d’un char Tigre !
L’artillerie allemande n’a pas été capable de repérer et d’écraser
les canons russes. Et les champs de mines n’ont pas été nettoyés.
« Les premiers rapports, disent les officiers d’état-major
russes, établissent que 586 tanks ennemis ont été endommagés ou détruits »,
dès les premiers cent mètres.
Les consignes allemandes sont implacables et condamnent à
mort les équipages dont les chars immobilisés deviennent une cible offerte aux
canons antichars et aux fantassins russes enfouis dans des tranchées étroites
ou des trous individuels creusés au milieu des champs de mines.
Mais les équipages allemands obéissent aux ordres :
« Si un char se trouve immobilisé mais que son canon
est encore en état de tirer, l’équipage continuera sur place à appuyer l’échelon
de combat avec le feu de sa pièce… En aucune circonstance, les chars ne s’arrêteront
pour prêter assistance à ceux qui seraient en difficulté. »
Après vingt-quatre heures de combats, le front russe n’a
cédé – sur quatre kilomètres – que dans le sud du saillant sous la
poussée des panzers et des fantassins SS.
Mais les Russes ont fortifié des petits villages situés le
long d’une rivière que des rafales de pluie, dans la nuit du 5 au 6 juillet,
grossissent, rendant son passage difficile.
Et les SS découvrent que ces Russes qu’ils méprisent, qui
sont à leurs yeux des Untermenschen, sont de rudes et tenaces
combattants aussi bien armés qu’eux. Impitoyables aussi avec tout combattant
allemand qui porte une tête de mort comme emblème, et qu’ils abattent aussitôt
se serait-il rendu. Les SS se battent donc jusqu’à la mort.
Le 12 juillet, la IV e armée allemande
lance ses 600 chars
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