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1944-1945-Le triomphe de la liberte

1944-1945-Le triomphe de la liberte

Titel: 1944-1945-Le triomphe de la liberte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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se laissera pas traiter comme la grande-duchesse de Luxembourg ou
la reine des Pays-Bas !
     
    On lui rapporte que Churchill, fou de rage, s’est
écrié :
    « Qu’on mette de Gaulle en avion et qu’on le renvoie à
Alger, enchaîné si nécessaire. Il ne faut pas le laisser rentrer en France.
Tant que le général de Gaulle restera à la tête des affaires, il n’y aura pas
de bonnes relations entre la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis. Le
général de Gaulle est un ennemi. »
    De Gaulle hausse les épaules. Puis il écoute le diplomate
Viénot présenter à nouveau les arguments d’Eden. Il faudrait, selon le
secrétaire d’État, que les officiers français de liaison administrative
puissent débarquer avec les Alliés, que de Gaulle s’y engage.
    Viénot ne comprend donc pas qu’il s’agit de notre
avenir !
     
    De Gaulle tempête. Il va et vient dans le salon de l’hôtel Connaught,
puis tout à coup il s’apaise.
    Cette nuit est celle où les premiers parachutistes vont
toucher la terre de France, et parmi eux les Français du 2 e  régiment
de parachutistes de l’air.
    Bientôt prendront pied avec la première vague d’assaut les
hommes du bataillon de choc du commandant Kieffer, qui vont se jeter hors des
barges de débarquement.
    Il retrouve le petit appartement de Seymour Place où
Philippe l’attend. Il veut passer cette nuit avec lui. Il observe son fils qui
a choisi, pour participer aux combats de la Libération, d’être versé dans un
régiment de fusiliers marins.
     
    Dîner en tête à tête. Prendre le temps de le regarder, de
lui parler en cette nuit décisive. Évoquer les héros : Moulin, torturé à
mort ; Fred Scamaroni, délégué de la France Libre en Corse, et l’un des
premiers résistants, Jacques Blingen, qui, il le sait maintenant, se sont
suicidés après avoir été arrêtés. Comme Brossolette.
    « Les Anglo-Saxons, dit-il d’une voix sourde,
s’apprêtent à traiter les Français comme des autochtones à
administrer ! »
    Ce n’est pas pour ce résultat-là que ces héros sont tombés.
     
    Il aime ce silence recueilli qui s’établit avec son fils,
puis cette évocation grave de leur famille, de ceux qui sont entre les mains
des nazis, Marie-Agnès, Alfred Caillau, Pierre de Gaulle et Geneviève de
Gaulle.
    Le temps passe. De Gaulle regarde la pendule.
    « Ça y est, dit-il. Maintenant, c’est le
débarquement. »
    Peu après, il reconduit son fils.
    « J’ai confiance en la réussite du débarquement,
dit-il. Les Alliés disposent de forces considérables. »
    Il s’interrompt. Si une première opération ne réussissait
pas, il y en aurait une seconde, une troisième…
    « Mais comme nous le pensions dès le début, les
Allemands perdront la guerre, quoi qu’il en soit. »
     
    C’est le matin du 6 juin.
    Les premières nouvelles sont encourageantes. De Gaulle
reçoit Charles Peake.
    « Tout le monde a parlé, dit le diplomate. Il faut vous
adresser au peuple français à votre tour », insiste-t-il.
    Maintenant qu’il sera seul à l’antenne, de Gaulle peut accepter.
Il enregistrera son émission vers midi. Il n’en communiquera pas le texte,
naturellement.
    Il mesure l’hésitation et les craintes de Peake et, au-delà
de lui, celles du Foreign Office et sans doute de Churchill. Mais ils vont
s’incliner parce que la France s’est rassemblée, parce que la Résistance montre
déjà son efficacité, paralysant les divisions allemandes.
    Parce que Pétain vient de déclarer que les Français doivent
s’abstenir de participer aux combats qui commencent.
     

     
    À 12 heures, il entre dans les studios de la BBC de
Bush House.
    Il marche lentement le long des couloirs. Une émotion
intense lui serre la gorge.
    Il se souvient de l’appel du 18 juin 1940 à partir duquel
tout a commencé. Ce qu’il va dire, ces phrases qui se pressent en lui, est issu
de ce jour-là.
    Il s’assied. On règle le micro. Il se remémore chaque mot.
Il doit appeler au combat au nom du gouvernement français, et il doit faire
comprendre que cette bataille sera dure.
    Lampe rouge. Geste du technicien derrière la vitre. Il
commence :
    « La bataille suprême est engagée… C’est la bataille de
France et c’est la bataille de la France. […] Pour les fils de France, le
devoir est simple et sacré : il s’agit de détruire l’ennemi, l’ennemi qui
écrase et souille la patrie… Cette bataille, la France va la mener avec

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