4 000 ans de mystifications historiques
d’un complot des conservateurs républicains, évoqué maintes fois, ne peut disparaître de l’horizon. Celle d’une manipulation d’Oswald et de Ruby par des émissaires de la police demeure. Bien des acteurs auraient pu participer à l’attentat. Certains ont pu laisser des témoignages à divulguer plus tard.
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Comme si le dossier n’était pas assez touffu, en 2003, deux auteurs américains, Brad O’Leary et L. E. Seymour, introduisaient dans un livre « à sensation (90) » un nouveau personnage qu’ils accusaient d’être l’assassin de Kennedy : Jean-Michel Souetre. Le titre complet du livre est saisissant : « Triangle de mort : la choquante vérité sur le rôle du Sud-Vietnam et de la mafia française dans l’assassinat de JFK. » Selon eux, Souetre, en provenance de Fort Worth, aurait été présent à Dallas dans l’après-midi du 22 novembre et il aurait été expulsé dans les quarante-huit heures suivant l’assassinat. Guère à court d’imagination, ces deux auteurs en auraient déduit que Souetre, soldat de fortune recherché par le SDECE, était l’assassin de la butte de Dealey Plaza. Nous ferons grâce au lecteur de l’intrigue tarabiscotée par laquelle ils reliaient le Sud-Vietnam à l’attentat de Dallas pour en venir au point crucial.
Plus troublante – à première vue – que le texte était la photocopie d’une note estampillée « secret » du CIA Historical Review Program, portant la date manuscrite « 1 er avril 64 ». C’était donc bien un document authentique de la CIA ; l’imagination romanesque ne s’autorise pas, en effet, sous peine de lourdes sanctions, à fabriquer des documents d’État. Or, voici la transcription exacte de cette note (les ajouts manuscrits sont soulignés) :
Jean SOUETRE alias Michel R OUX alias Michel M ERTZ – Le 5 mars 1964, M. Papich a informé que les Français avaient contacté l’attaché juridique à Paris et aussi que le SDECE avait interrogé le Bureau à New York concernant le sujet et déclarant qu’il avait été expulsé des États-Unis à partir de Fort Worth ou de Dallas après l’assassinat du président Kennedy. Il se trouvait à Fort Worth le 22 novembre au matin et à Dallas dans l’après-midi. Les Français pensent qu’il a été expulsé vers le Mexique ou le Canada. En janvier, il a reçu un courrier d’un dentiste du nom d’Alderson, domicilié au 5803 Birmingham à Houston, Texas. On pense que le sujet est un capitaine déserteur de l’armée française et un membre actif de l’OAS . Les Français s’inquiètent en raison du projet de visite de De Gaulle au Mexique. Ils aimeraient savoir les raisons de son expulsion des E.-U. et sa destination. Ses dossiers ne contenant rien sur lui, le Bureau fait des vérifications avec le Texas et l’INS. Ils souhaiteraient que nous consultions nos dossiers et que nous désignions ce qui peut être communiqué aux Français. Une copie des documents CSCI-3/776. 742 et CSDB 3/655. 207, ainsi qu’une photo du capitaine Souetre ont été remises à M. Papich.
Pour mémoire, le Bureau mentionné dans le document est le Fédéral Bureau of Investigation, le SDECE, français, est le service de documentation extérieure et de contre-espionnage, et l’INS est l’Immigration and Naturalisation Service. Ce document porte le n° 632-796. Il est confondant à plus d’un égard.
En premier lieu, il n’explique pas pourquoi Jean Souetre aurait été expulsé des États-Unis. C’est là une mesure grave, qui exclut dans la plupart des cas une possibilité de retour sur le sol américain. S’il avait commis un délit, il aurait été incarcéré sur place ; sinon, il n’aurait pu être expulsé que pour entrée clandestine ou pour avoir outrepassé la durée de séjour permise par son visa, généralement de trois mois. Dans les deux cas, le consulat de France le plus proche aurait été informé et l’intéressé n’aurait certes pas eu le loisir de circuler librement de Fort Worth à Dallas. Le SDECE ne pouvait ignorer ces faits. Une troisième possibilité est que Souetre aurait été officieusement prié de quitter le pays. Par qui ? Pas par les Français, de toute évidence.
Mais ni le FBI ni la CIA ni l’INS ne sont informés, selon ce document, d’une expulsion ou d’une reconduite à la frontière d’un nommé Souetre. Étrange.
Ensuite, et plus étrange encore, Jean Souetre, Michel Roux et Michel Mertz sont trois personnes
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