4 000 ans de mystifications historiques
rapportés après la mort de Kennedy et qui portent le nom médical de priapisme.
Ces effets s’ajoutent aux troubles neurologiques et psychiques qu’entraîne la maladie d’Addison – troubles de la mémoire et du sommeil et tendances schizophréniques.
De surcroît, lorsqu’il souffrait de baisses de tonus, Kennedy se faisait injecter des amphétamines par un médecin trop complaisant, le Dr Jacobson, qui y perdit bien plus tard sa licence d’exercer.
Le pouvoir suprême de la plus grande puissance militaire de la planète fut donc exercé pendant près de trois ans par un homme dont la santé physique était gravement délabrée et la santé psychique tout aussi dangereusement menacée.
Ces faits ne furent révélés – partiellement – qu’après sa mort, par Theodore Sorensen, son porte-parole, et Pierre Salinger, l’un de ses proches. Les opinions américaine et mondiale furent dupées sciemment par une coterie de parents et d’intimes. Le secret médical achevait de sceller la tromperie.
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Le même scénario se reproduisit en France, de 1969 à 1974, lors de la présidence de Georges Pompidou. Depuis la fin 1968, le tableau clinique de la santé de l’homme politique allait s’assombrissant. De la légère anémie, des infections à répétition et des anomalies sanguines, il évolua vers un désordre du sang plus grave, la macroglobulinémie, c’est-à-dire l’apparition dans le sang de globulines anormalement grosses ; celles-ci signalent un cancer et menacent le fonctionnement d’organes tels que le foie, la rate, les ganglions lymphatiques.
Le président accumulait les accès de fatigue et souffrait de pannes dans l’exercice de ses tâches. Conscients de la situation, les médecins exploraient le patient pour poser un diagnostic. En 1972, ils l’annoncèrent au malade, mais on ignore s’ils spécifièrent le nom des maux qu’ils soupçonnaient, maladie de Kahler ou maladie de Waldenström, toutes deux également graves. Ils ne révèlent la situation totale qu’à son épouse et à son fils, médecin. À partir de là, une succession de « grippes » douteuses commence à embarrasser ses collaborateurs et à alarmer l’opinion. L’homme d’État tente de tenir le coup et poursuit ses activités du mieux qu’il peut, mais son génie propre semble de plus en plus voilé par l’évolution de la maladie : il est lourdement vulnérable à la fatigue. Même s’il n’a pas de compétences médicales, il est assez intelligent pour comprendre qu’il est miné. Mais il refuse de dételer. Il accélère ainsi sa fin. Aucune autorité constitutionnelle ne peut le contraindre à se démettre et, là aussi, le secret médical verrouille sa décision.
Il faudra un jour décider de la conclusion qui s’impose : héroïsme ou irresponsabilité ?
Le même secret médical sera mis en cause une fois de plus après la mort de François Mitterrand. Le président était informé de son cancer depuis 1981, mais rien ne l’obligeait non plus à le déclarer : il eût alors dû renoncer à son mandat. Cette fois, le secret médical fut évoqué et invoqué avec une certaine virulence. Mais la même législation ne pouvait pas l’exiger des médecins et leur imposer de l’enfreindre en ce qui touchait aux chefs d’État.
Toutes les conditions étaient donc réunies pour que les mystifications se reproduisent.
Nous n’avons cité qu’un petit nombre d’exemples de détériorations physiques de chefs d’État, et il en est bien d’autres qui se pressent aux portes de la mémoire, de Hitler, bien évidemment – qui fut pendant les dernières années de sa vie justiciable de l’internement psychiatrique –, à Roosevelt qui, à Yalta où se décida le sort du monde d’après-guerre, se trouva dans un état quasi catatonique, il y faudrait un ouvrage de plus sur les rapports entre les mensonges médicaux et l’histoire.
Et encore n’a-t-on parlé que des pays qui se targuent d’être « développés ». Nous offrons ces pages aux hommes politiques en quête de grands thèmes…
1910
Boronali, maître de l’excessivisme
Les scandales, arnaques et mystifications du XX e siècle naissant sont rarement, sinon jamais plaisants. Lassé des querelles sur des sujets abstrus – que les partisans du fauvisme, du futurisme, du cubisme, du constructivisme, du suprématisme et autres ismes de l’art entretiennent de salon en galerie et qu’il soupçonne d’être
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