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A l'écoute du temps

A l'écoute du temps

Titel: A l'écoute du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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la table, du réfrigérateur et du gros poêle à
huile.
     
    — Ça fait combien
de temps que je suis venue vous voir? demanda-t-elle à son fils.
     
    — Il me semble
que c'est le printemps passé.
     
    — Ah! si longtemps
que ça? Je me souvenais plus combien c'était petit chez vous. J'ai bien peur
que vous me trouviez pas mal encombrante, ajouta-t-elle en faisant un effort
évident pour se montrer aimable.
     
    — C'est pas ben
grand, madame Morin, intervint Laurette, mais on est capables de se tasser un
peu pour recevoir de la parenté.
     
    — Et les enfants?
Où est-ce qu'ils sont passés? s'informa la grand-mère.
     
    — Jean-Louis,
Gilles et Denise travaillent le samedi.
     
    Richard est parti
jouer dehors avec des amis. Carole est chez son amie Mireille, à côté. Elle est
à la veille de revenir.
     
    — Votre Gilles
est rendu assez vieux pour travailler?
     
    — Il a quatorze
ans, m'man, répondit Gérard. Il va encore à l'école, mais il porte des
commandes la fin de semaine.
     
    — Est-ce qu'il y
a un de vos enfants qui va faire des études?
     
    — C'est mal parti
pour ça, reconnut son fils. Jean- Louis a eu toutes les misères du monde à
faire sa septième 349 année. Richard et Gilles ont pas l'air de trop aimer
l'école.
     
    Denise a lâché,
elle aussi, en huitième année. Pour Carole, on le sait pas encore.
     
    — On le sait pas
encore, madame Morin, intervint Laurette en foudroyant son mari du regard. Même
s'ils aiment pas ben gros l'école, Gilles et Richard ont des bonnes notes. Au
dernier bulletin, Gilles a eu 76 dans son bulletin et les notes de Richard sont
pas mal non plus, précisa-t-elle avec une fierté non déguisée.
     
    — Vous avez
jamais pensé faire apprendre le piano à vos filles?
     
    — Avec quel
argent on aurait pu payer ça? demanda sa bru que cette enquête commençait à
énerver.
     
    — Il aurait aussi
fallu être capable de lui trouver une place dans la maison, fit remarquer
Gérard sur un ton uni.
     
    — On aurait été
obligés de l'attacher au plafond, ajouta Laurette, pince-sans-rire. On n'a pas
de place pour rien.
     
    — Je trouve ça
bien de valeur, déplora Lucille. Une vraie demoiselle distinguée doit apprendre
la musique.
     
     
     
    — Ben moi, j'ai
jamais appris ça, et ça m'a pas empêché de vivre, déclara tout net Laurette qui
avait senti un blâme dans la remarque de sa belle-mère. Je suis peut-être pas
ben distinguée, comme vous dites, mais je suis capable de faire l'ouvrage que
j'ai à faire.
     
    — Bien sûr, ma
fille. Je disais pas ça pour vous faire de la peine... Évidemment, on peut être
une très bonne femme sans aimer la musique.
     
    La porte d'entrée
claqua soudain et Laurette leva la tête pour voir qui venait d'entrer dans
l'appartement.
     
    — Laisse pas
traîner tes bottes dans l'entrée, dit-elle à Carole.
     
    — Est-ce que
mémère est arrivée? demanda l'adolescente en train de retirer ses bottes.
     
    35° L'ARRIVÉE DE
GRAND-MÈRE
     
    — Oui. Elle est
dans la cuisine avec nous autres.
     
    Carole enleva son
manteau qu'elle suspendit à l'un des crochets installés près de la porte et
vint rejoindre ses parents dans la cuisine.
     
    — Mon Dieu!
s'exclama Lucille en apercevant sa petite-fille qui se dirigea vers elle pour
l'embrasser sur une joue. Mais t'as bien grandi depuis le printemps passé. T'es
devenue une grande fille.
     
    — Pour pousser,
elle pousse, reconnut Laurette en se levant pour jeter les pelures de pomme de
terre dans la poubelle.
     
    — C'est certain,
confirma Lucille Morin. Et m'appelle plus «mémère», ma belle fille,
ajouta-t-elle à l'intention de sa petite-fille. Ce mot-là, c'est bon pour les
gens sans éducation. Appelle-moi «grand-mère».
     
    A la fin de
l'après-midi, Richard rentra à la maison en même temps que Gilles, de retour de
son travail. Les deux garçons eurent droit, l'un et l'autre, à la même leçon et
se le tinrent pour dit. Par contre, la grand-mère ne témoigna qu'un intérêt
poli à Jean-Louis et à Denise lorsqu'ils arrivèrent un peu avant l'heure du
repas.
     
    Au souper, on dut
s'entasser à huit autour de la table en bois blanc. Il fallut approcher une
chaise berçante au bout de la table et l'utiliser comme huitième siège. Au
moment de servir le repas, Lucille Morin exigea d'avoir un tablier pour aider
sa bru à servir, malgré les protestations de Denise.
     
    — Je suis
vieille, protesta la septuagénaire, mais je suis

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