A l'écoute du temps
pour admirer l'immeuble. Vous
avez pas de balcon?
— Ben oui, on en
a, dit Rosaire. Il y en a deux grands en arrière qui font toute la longueur de
la maison. Un pour mon locataire et un pour nous autres, en bas.
Sur ces mots, il
ouvrit la porte et fît signe à ses invités d'entrer.
— C'est nous!
cria-t-il à la cantonade en pénétrant derrière Gérard dans une grande entrée
éclairée par un beau lustre.
Aussitôt, Colombe
et sa mère apparurent pour accueillir les visiteurs. Les deux femmes ouvrirent
les portes d'une vaste penderie et leur tendirent des tringles. Chacun put
suspendre son manteau avant de retirer ses couvre chaussures.
— T'as toute une
belle maison, dit Laurette à sa belle-soeur en se relevant, un peu essoufflée
de s'être penchée pour enlever ses bottes.
— Attends, je
vais te faire faire le tour, lui promit Colombe qui entraîna d'abord tout le
monde dans un grand salon bien éclairé par une large baie vitrée. La moquette
brun foncé mettait en valeur le mobilier recouvert d'un 4J3 riche velours
beige. La bibliothèque en érable qui couvrait presque tout un mur côtoyait une
grosse radio RCA Victor qui trônait sur une table basse.
Rosaire et sa femme
firent ensuite visiter leur chambre à coucher de la même dimension que le
salon. Elle était si vaste qu'elle aurait pu contenir la chambre de Jean- Louis
et celle de ses frères sans aucune difficulté. Ensuite, chacun put admirer la
chambre de la grand-mère, le bureau de Rosaire, dont l'un des murs était
couvert de classeurs métalliques, ainsi que la magnifique salle de bain dotée
d'une baignoire moderne et de longues armoires en noyer. Finalement, les
propriétaires firent voir à leurs invités la grande salle à manger, voisine
d'une cuisine pourvue de toutes les commodités.
Laurette n'avait
pas ménagé ses exclamations de ravissement en pénétrant dans chacune des
pièces, même si elle mourait de jalousie. La présence d'une salle à manger
porta sa frustration à son comble. Que l'on puisse jouir d'une telle pièce en
plus d'une cuisine lui sembla le comble du luxe. À son avis, il y avait là un
gaspillage d'espace absolument extravagant. A quoi pouvait bien servir une
cuisine, si ce n'était pas pour y manger. De plus, les Nadeau avaient meublé
cette pièce avec un nouveau mobilier chromé rouge vin dont les chaises
coussinées et largement capitonnées auraient fait l'envie de toute ménagère.
Grâce à ses tournées hebdomadaires des grands magasins, Laurette connaissait
bien le prix de toutes ces belles choses qui appartenaient au couple.
— Mon Dieu! Il y
a pas à dire, s'exclama-t-elle, vous auriez en masse de la place pour élever
une grosse famille dans un appartement aussi grand.
— C'est vrai,
reconnut Colombe, un peu pincée.
— Tout est
tellement moderne que, moi, j'aurais peur de casser quelque chose, ajouta
Laurette, se réjouissant 414 ENTRE LA HONTE ET L'ENVIE secrètement d'avoir vu
le sourire de contentement s'effacer du visage de ses hôtes au rappel de leur
stérilité.
— On s'habitue
vite, répliqua Colombe, un rien acide.
Nos meubles sont
pas tous neufs, loin de là, précisât- elle.
— La plupart
étaient déjà dans notre appartement du boulevard Saint-Joseph, expliqua
Rosaire. On en avait presque assez pour meubler les six pièces.
— On va aller
s'asseoir dans le salon, reprit sa femme.
Pendant que le
souper achève de cuire, les jeunes peuvent s'installer dans la salle à manger
pour jouer aux cartes s'ils le veulent. Maman m'a dit qu'ils aimaient ça. Ça
dérangera rien. De toute façon, la table est pas encore mise.
— Et moi, je vais
vous servir de la liqueur. J'ai de la bière, du Coke et du créant soda, annonça
Rosaire.
Quelques instants
plus tard, le petit homme rondelet apporta de grands verres de boisson gazeuse
posés sur un plateau. Il en laissa aux jeunes dans la salle à manger avant de
poursuivre son chemin jusqu'au salon où les adultes l'attendaient. En voyant
Laurette déposer son verre sur une table en acajou, Colombe s'empressa de distribuer
des sous-verres. Sans dire un mot, elle en glissa un sous le verre de son
invitée.
Après avoir
abondamment parlé de tous les tracas causés par la construction et
l'aménagement de leur nouvelle maison, Colombe et son mari abordèrent le
problème de se trouver un locataire acceptable.
— En haut, c'est
aussi un beau
Weitere Kostenlose Bücher