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A l'écoute du temps

A l'écoute du temps

Titel: A l'écoute du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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l'objet et découvrit, un peu
surprise, le grossier coffret en bois fabriqué par son fils.
     
    Feignant le
ravissement, elle le tourna dans tous les sens.
     
    — Mais c'est ben
beau, cette affaire-là! s'exclama-t-elle.
     
    — Je l'ai fait en
menuiserie, à l'école, expliqua inutilement Gilles.
     
    — C'est un coffre
à bijoux, non?
     
    — Aie! Elle est
bonne, m'man, elle l'a deviné, dit Richard à son frère pour le faire enrager.
Moi, j'aurais pas su ce que c'était.
     
    En guise de
réponse, Gilles lui adressa un solide coup de pied sous la table.
     
    — Merci, Gilles,
dit la mère en embrassant son fils sur une joue. Tu peux être certain que je
vais m'en servir.
     
    Chapitre 20 Des
lunettes La seconde semaine de mars fut marquée par la pire tempête de neige de
l'hiver. Le mercredi matin, les enfants se dirigèrent vers leur école sous un
ciel couleur d'encre au point qu'on aurait juré que le jour refusait de se lever.
     
    Puis, vers dix
heures, le vent se leva et de gros flocons se mirent à tomber si serrés qu'on
avait peine à voir à quelques pieds devant soi. En quelques minutes, la rue
Emmett et les trottoirs disparurent sous une épaisse parure blanche.
     
    Quand les jeunes,
couverts de neige, rentrèrent dîner, il suffisait de jeter un coup d'oeil par
la fenêtre de la cuisine pour se rendre compte à quel point le paysage avait
changé. La neige grisâtre qui couvrait tout depuis quelques semaines avait cédé
sa place à une blancheur extraordinaire.
     
    Plusieurs pouces
de neige s'étaient déjà déposés sur le balcon et sur le toit du hangar.
     
    — Maudit hiver,
il finira donc jamais! se plaignit Laurette en s'assurant du coin de l'oeil
qu'aucun de ses enfants ne mettait de la neige sur le linoléum du couloir.
     
    On dirait la fin
du monde, bonyeu! Si ça a de l'allure de neiger comme ça! On est obligé de
garder les lumières allumées toute la journée.
     
    La tempête en
cours n'était pas la seule responsable des idées noires de la mère de famille.
Gérard n'était pas 475 encore parvenu à vaincre sa grippe et cela l'inquiétait.
Il toussait encore à fendre l'âme et il avait souvent des poussées de fièvre
inexplicables. Il semblait même perdre du poids, lui qui n'en avait pas en trop.
     
    — Il va finir par
avoir l'air d'une vraie chenille à poil s'il continue à fondre de même,
s'était-elle dit le matin même en le voyant partir au travail.
     
    Son mari avait de
moins en moins d'appétit et ce n'était pas bon signe. Il fallait vraiment qu'elle
trouve un moyen de le décider à aller voir le médecin, même si, comme beaucoup
d'hommes, Gérard croyait que les médecins n'existaient que pour les femmes et
qu'aller les consulter était une dépense inutile.
     
    Ce matin-là,
Richard et Gilles se levèrent quelques minutes à peine après le départ de leur
père pour son travail. Les deux adolescents vinrent s'attabler, déjà prêts à
déjeuner.
     
    — Vous êtes ben
de bonne heure, vous deux, leur reprocha leur mère.
     
    — P'pa arrête pas
de tousser, ça nous a réveillés, expliqua Gilles en plaçant deux tranches de
pain dans le grille-pain.
     
     
     
    — Comment ça se
fait que le sirop l'empêche pas de tousser? demanda Richard, qui avait du mal à
dissimuler une certaine inquiétude.
     
    — Comment veux-tu
que je le sache? rétorqua sa mère en déposant sur la table deux bols du gruau
qu'elle avait inutilement préparé pour son mari.
     
    — Laurier, dans
ma classe, m'a dit que son père arrêtait pas pantoute de tousser l'année
passée, reprit Richard.
     
    — Puis?
     
    — Ben, son père a
été obligé d'arrêter de travailler et il m'a dit qu'il est dans un hôpital
spécial où il a même pas le droit d'aller le voir, ajouta l'adolescent.
     
    476 DES LUNETTES
     
    — Énerve-toi pas
avec ça, lui ordonna sa mère. Ton père est pas malade à ce point-là. Lui, c'est
juste une mauvaise grippe qu'il a. Aussitôt qu'il va se mettre à faire chaud,
ça va s'arranger.
     
    Pendant que ses
fils mangeaient, Laurette ne put s'empêcher de se sentir submergée par une
profonde inquiétude. Elle ne croyait guère aux paroles rassurantes qu'elle
venait de prononcer.
     
    «Il manquerait
plus que ce soit pire qu'une grippe, pensa-t-elle.» Une heure plus tard, au
moment de quitter la maison, Gilles annonça à sa mère:
     
    — On va avoir nos
bulletins cet après-midi.
     
    — J'ai ben hâte
de voir ça, dit sa mère sans

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