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A l'écoute du temps

A l'écoute du temps

Titel: A l'écoute du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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un
enfant, protesta son mari. T'as pas besoin de venir me reconduire là. Je
connais le chemin.
     
    — Je le sais,
mais je suis ta femme et je veux savoir ce que le docteur va dire.
     
    — Je suis capable
de te le répéter, si c'est tout ce que tu veux.
     
    — Non, j'aime
mieux être là, dit-elle d'une voix décidée en déposant devant lui une assiette
sur laquelle elle venait de déposer deux saucisses et un morceau de boudin avec
des pommes de terre.
     
    Les cinq enfants
du couple, assis autour de la table, se taisaient. Ils écoutaient l'échange
entre leur père et leur mère. Ils devinaient que leur père devait vraiment ne
pas se sentir très bien pour ne pas opposer une plus grande résistance à une
visite chez le médecin de la famille. A leur connaissance, ils ne se
souvenaient pas avoir vu leur père aller chez le vieux docteur Miron. Il les
avait bien accompagnés, l'un après l'autre, pour leur faire enlever leurs
amygdales avant de commencer l'école, mais ils ne l'avaient jamais vu malade.
     
    Après le repas,
Gérard alla changer de vêtements.
     
    Laurette le
suivit presque immédiatement après avoir confié à Denise et Carole le soin de
remettre de l'ordre dans la cuisine. Lorsque son mari et elle furent prêts à
partir, elle laissa Gérard sortir le premier de l'appartement pour avoir le
temps de chuchoter à ses enfants: 506 UN MALHEUR
     
    — Faites une
prière pour que tout se passe ben, leur commanda-t-elle sans plus s'expliquer.
     
    Le bureau du
docteur Miron était situé coin De Montigny et Papineau, au rez-de-chaussée d'un
vieil immeuble en brique rouge. Une plaque en cuivre était fixée à droite d'une
porte à la peinture verte écaillée. En poussant cette dernière, le visiteur
était obligé de convenir que la salle d'attente aux murs craquelés meublée
d'une douzaine de chaises en bois inconfortables aurait eu grandement besoin
des soins d'un décorateur. Une secrétaire à la figure peu avenante officiait
derrière un bureau qui avait connu de meilleurs jours.
     
     
     
    — Assoyez-vous,
ordonna-t-elle aux Morin. Le docteur va vous recevoir tout à l'heure.
     
    Gérard et
Laurette enlevèrent leur manteau et prirent place à l'autre extrémité de la
petite salle où trois autres personnes patientaient déjà. Puis, les minutes
s'égrenèrent lentement. Une grosse dame sortit du bureau du médecin, aussitôt
remplacée par un vieillard, et l'attente se poursuivit.
     
    Le silence des
lieux n'était rompu que par la sonnerie du téléphone et la voix feutrée de la
secrétaire.
     
    Finalement, un
peu après huit heures, cette dernière appela Gérard Morin qui disparut derrière
la porte du bureau du médecin. Et l'attente de Laurette reprit. Elle avait
entrepris de réciter des Ave depuis son arrivée dans la place et elle continua
de plus belle dès que son mari eut disparu derrière la porte du médecin.
     
    Après une
vingtaine de minutes, la porte du bureau s'ouvrit sur Albert Miron.
     
    — Madame Morin,
l'appela-t-il. Voulez-vous entrer une minute? Les jambes un peu molles,
Laurette se leva, prit son manteau et celui de son mari et pénétra dans la
pièce.
     
    507 Gérard, le
visage défait, était assis devant le bureau du praticien.
     
    — Assoyez-vous,
madame, dit Albert Miron, un mince sexagénaire à qui il ne restait qu'une
étroite couronne de cheveux gris.
     
    Laurette lança un
regard interrogateur à son mari qui ne broncha pas.
     
    — Je vous ai fait
entrer parce que votre mari m'a dit que vous vouliez absolument savoir de dont
il souffrait.
     
    C'est normal. Je
l'ai examiné et, comme je le lui ai dit, ce n'est pas très brillant. A mon
avis, il a trop attendu avant de venir me voir et j'aime pas beaucoup ce que
j'entends quand je l'ausculte.
     
    Gérard se
contenta de fixer la pointe de ses souliers sans rien dire.
     
    — Là, je l'envoie
passer une radiographie des poumons à l'Institut Bruchési demain avant-midi
parce qu'il y a quelque chose de pas normal de ce côté-là. Je veux qu'il
rencontre le docteur Laramée au dispensaire de l'institut.
     
    Je lui ai écrit
un mot d'introduction.
     
    — C'est correct,
docteur.
     
    — A ce que j'ai
cru comprendre, votre mari fait des poussées de fièvre de temps à autre?
     
    — Presque tous
les soirs, précisa Laurette.
     
    — Ah bon! dit le
médecin comme s'il venait d'apprendre un nouveau fait.
     
    — Il a pas mal
maigri cet hiver et il crache le sang, ajouta

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