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A l'écoute du temps

A l'écoute du temps

Titel: A l'écoute du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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les jeter, lui suggéra son
mari.
     
    — Aie! m'man,
protesta Gilles. Moi, je suis prêt à risquer d'en manger. Si vous êtes pour les
jeter...
     
    263
     
    — Whow! On va
prendre une chance, répliqua sa mère sur un ton tranchant. Après tout, pourquoi
elle chercherait à nous empoisonner? Lorsque ses deux jeunes frères eurent
quitté la maison pour aller porter les commandes chez Tougas et Charland,
Denise, qui n'avait pratiquement pas prononcé un mot durant tout le repas, dit
à ses parents:
     
    — Un gars m'a demandé
d'aller aux vues avec lui dimanche soir.
     
    — C'est qui ce
gars-là? demanda son père en baissant le son de la radio qu'il venait
d'allumer.
     
    — C'est un client
du magasin, p'pa.
     
    — Comment il
s'appelle? demanda sa mère.
     
    — Serge Dubuc. Il
est caissier à la banque, au coin de Dufresne. Ça fait plusieurs fois qu'il me
demande d'aller aux vues avec lui. Il a l'air ben correct.
     
    — Est-ce qu'il
reste dans le coin? reprit son père.
     
    — Non. Il reste
avec son père et sa mère à Tétreaultville.
     
    — Et vous iriez
aux vues tout seuls? demanda Laurette.
     
    — Ben, m'man,
protesta Denise. On va juste au Bijou.
     
    C'est pas au bout
du monde.
     
    — On sait jamais,
ma petite fille. C'est pas mal dangereux pour une fille de sortir avec
quelqu'un qu'elle connaît pas.
     
    — Je le connais,
m'man.
     
    — Peut-être, mais
nous autres, on le connaît pas pantoute.
     
    — Ben, m'man!
protesta la jeune fille.
     
    — Il y a pas de
«ben, m'man». On veut le voir, ce gars-là, avant de le laisser t'amener aux
vues.
     
    — C'est sûr, admit
Denise. C'est ce que je lui ai dit quand il m'a invitée. Il est supposé venir
me chercher 264 DÉCEMBRE après le souper, dimanche, conclut-elle en endossant
son manteau pour aller travailler.
     
    — C'est correct
comme ça, dit son père, satisfait.
     
    — En tout cas,
j'ai assez hâte que le temps des fêtes finisse pour plus avoir à aller
travailler le soir, ajouta la jeune fille en se penchant pour chausser ses
bottes.
     
    — Prends
patience, ce sera plus ben long, l'encouragea sa mère.
     
    Quand sa soeur
fut partie, Jean-Louis ne put s'empêcher de faire remarquer à ses parents
encore attablés:
     
    — Ce que je
comprends pas, c'est pourquoi un gars va payer pour une fille durant toute une
soirée. Je suppose que son Dubuc va payer les p'tits chars, les vues et même le
restaurant après. Moi, je trouve que c'est du gaspillage.
     
    — Quand tu
tomberas en amour avec une fille, tu vas comprendre, lui dit sa mère.
     
    — Ce que tu
comprends pas, c'est que c'est là que tu commences à prendre l'habitude de
payer pour une fille, intervint son père, sarcastique. Après ça, t'es poigne
pour le faire jusqu'à la fin de tes jours.
     
    — Que t'es donc
fin, toi î s'exclama sa femme. Comme si t'avais jamais rien en échange de cet
argent-là! Le lendemain, dernier jour de classes, Richard ne se tenait plus
d'impatience. Durant tout l'après-midi, il n'avait cessé de toucher à la petite
boîte bleue au fond de sa poche de pantalon. C'était le cadeau qu'il destinait
à Monique.
     
    La veille, en
quittant la maison après le souper pour aller porter des commandes de la
pharmacie, il s'était empressé d'entrer chez Woolworth, situé quelques portes
plus loin, avant le retour au travail de sa soeur. Il avait alors acheté un
cadeau à son amie de coeur.
     
    265 L'adolescent
n'avait mis que cinq minutes pour repérer un petit coeur au bout d'une
chaînette qui reposait sur un lit de ouate dans une boîte bleue. Quand le
gérant lui avait dit qu'il valait un dollar, il avait tiré la somme de l'une de
ses poches et avait payé sans sourciller, même si cela représentait tous les
pourboires qu'il avait eus durant les quatre derniers soirs. Depuis, il avait
accordé une attention spéciale à la boîte pour ne pas l'abîmer. Il aurait aimé
pouvoir l'emballer dans du papier coloré et orner le tout d'une belle boucle de
ruban rouge, mais cela avait été impossible. Le papier et le ruban étaient
dissimulés dans la chambre de ses parents. Il avait donc déposé son cadeau au
fond de son sac d'école en prenant bien soin de ne pas l'écraser.
     
    Dès qu'il mit le
pied à l'extérieur de l'école cet après-midi- là, il se dépêcha d'aller
attendre Monique devant l'église, comme chaque après-midi. Les menaces de sa
mère ne pesaient pas lourd comparées au plaisir de tenir la main de son amie

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