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Abdallah le cruel

Abdallah le cruel

Titel: Abdallah le cruel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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j’aurais pu lui
infliger la plus cinglante des défaites. Je n’ai rien contre le prince. Vos
querelles ne sont pas les miennes. Je me félicite cependant d’avoir l’occasion
de me venger de l’affront que tu m’as jadis infligé en éveillant ta fourberie.
Voilà qui est fait.
    — Tu mens ! tonna le
général.
    — Je l’ai dit, je suis prêt,
mes officiers aussi, à jurer sur le saint Coran que j’ai dit la vérité.
    — Que vaut la parole d’un
rebelle ?
    — Plus que celle d’un traître.
    — Tu n’as aucune preuve de ce
que tu affirmes.
    — Détrompe-toi, j’ai un témoin,
le messager que tu m’as envoyé.
    — Qu’il vienne afin que je
puisse le confondre.
    Un homme qui se tenait dans l’ombre
s’avança. Abd al-Malik Ibn Abdallah Ibn Umaiya le reconnut. C’était l’un de ses
anciens officiers. Omar Ibn Abd al-Rahman al-Thalaba avait toujours été à ses
côtés et lui était totalement dévoué. Jamais ils ne s’étaient querellés sauf…
Le général se souvint soudain de la violente dispute qui les avait opposés
après la prise de la forteresse de Baliy et l’exécution de tous les prisonniers
Chrétiens, y compris du malheureux qui avait accepté de se convertir à l’islam pour
sauver sa vie. C’est à lui qu’Abdallah avait ordonné de tuer le renégat. Omar
Ibn Abd al-Rahman al-Thalaba avait reproché au cadi de l’armée et à son
supérieur de n’être pas intervenus en faveur du jeune homme. Sur le moment, Abd
al-Malik Ibn Abdallah Ibn Umaiya n’avait pas compris les raisons de cette
colère. Il s’était renseigné. La victime appartenait à une riche famille
Chrétienne de Malaka et sa sœur avait naguère apostasié, au grand scandale des
siens, pour épouser son officier, rencontré alors qu’il était en garnison dans
cette ville. Discipliné, Omar avait refusé de faire état de cette parenté
auprès du monarque, estimant que la parole du cadi et celle du général
pèseraient plus lourd que la sienne. Ils avaient l’impérieux devoir
d’intervenir auprès du souverain et de lui rappeler qu’il devait épargner le
prisonnier. Aucun n’avait eu ce courage et le malheureux avait décidé de se
venger.
    Alors que l’armée cheminait de
Kurtuba à Ishbiliyah, Omar Ibn Abd al-Rahman al-Thalaba avait raconté son histoire
au prince Mutarrif et celui-ci, devinant le parti qu’il pouvait en tirer, avait
fait mine de le plaindre et lui avait fait comprendre qu’ils avaient un ennemi
commun : Abd al-Malik Ibn Abdallah Ibn Umaiya. Il se pourrait bien qu’un
jour ou l’autre, le prince ait besoin de lui pour compromettre ce dernier.
L’officier avait attendu patiemment, craignant même d’avoir été victime d’une
machination ourdie par le rusé fils du souverain. Quand Mutarrif l’avait fait
appeler, son cœur avait tressailli de joie et il avait accepté de témoigner
contre son chef sans se poser la moindre question. La haine avait depuis
longtemps balayé ses scrupules. C’est donc d’une voix assurée qu’il raconta à
l’assistance la mission dont l’avait chargé le général et sa rencontre avec
Awsat Ibn Tarik, insistant sur le fait que son interlocuteur avait
dédaigneusement rejeté la proposition qui lui était faite. Perfide, il
ajouta :
    — J’ai bien cru qu’il allait me
faire exécuter ou me livrer à Mutarrif. Il n’en a rien fait. Il avait accepté
de me recevoir et a scrupuleusement respecté les règles de l’hospitalité. La
noblesse de son comportement m’a convaincu d’informer le prince du complot qui
se tramait contre lui. Lui aussi aurait pu me châtier.
    — Il s’est contenté d’acheter
ton témoignage ! rétorqua Abd al-Malik Ibn Abdallah Ibn Umaiya, indigné.
    — Je comprends ta colère. Tu as
été démasqué et tu ne sais pas comment te tirer de ce mauvais pas. Tu m’accuses
de t’avoir trahi pour de l’argent. Tu prêtes aux autres tes propres sentiments
et tes propres comportements. Tu ferais mieux de te préparer à mourir
dignement.
    Mutarrif ordonna à ses gardes
d’arrêter le général et réunit le lendemain une cour de justice extraordinaire.
Suivant en cela la suggestion de Kuraib Ibn Khaldun, le prince avait décidé
qu’elle serait composée à moitié d’officiers de l’accusé. Redoutant d’être
entraînés dans la chute de leur protecteur, ses soldats devinèrent que leur
sort dépendrait de leur docilité et ils ne furent pas les derniers à accabler
leur ancien chef.

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