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Alias Caracalla

Alias Caracalla

Titel: Alias Caracalla Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Daniel Cordier
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J’émerge
du récit des tentatives amoureuses des protagonistes
pour me replonger dans la réalité des conciliabules à
voix basse, portes et fenêtres closes.

    Sur le plan de Lyon confié par Schmidt, * Claudine
nous désigne le lieu de notre nouvel hébergement.
Il est situé sur la rive opposée du Rhône, à hauteur
du parc de la Tête-d’Or, à la périphérie de la ville.
Pour s’y rendre, il faut traverser Lyon dans sa longueur.

    Pour les marcheurs aguerris que nous sommes,
c’est un court trajet, même chargé de lourdes valises.
Notre problème est leur contenu : courrier codé, énormes liasses de francs et de dollars, postes émetteurs,
revolvers… Afin d’assurer notre sécurité, nous glissons les armes dans nos poches, en dépit des protestations de * Claudine. Nous estimons qu’en cas
de contrôle, mieux vaut tirer dans le tas et tenter le
tout pour le tout plutôt que de nous laisser arrêter.
Après tout, si les policiers ne sont pas trop nombreux, nous avons une chance d’en réchapper.

    Après avoir quitté l’appartement, nous longeons
les quais déserts et traversons le Rhône. Au loin, nous
apercevons les tramways passer les ponts à grand
bruit. Comme à Montluçon, il y a très peu d’automobiles. En approchant du centre, nous observons la
foule des piétons qui se presse aux arrêts de trams.

    Même sur les quais, au bord de l’eau, la chaleur
est suffocante. Nos valises deviennent de plomb.
Après un moment, le parc de la Tête-d’Or apparaît
au loin, sur la rive opposée, avec ses hautes frondaisons. Parvenus à sa hauteur, nous quittons les quais
et nous engageons dans une suite de larges escaliers, au sommet desquels nous obliquons dans une
ruelle déserte, la rue Philippeville.

    Au numéro 7, nous sonnons à une porte encastrée dans un mur délabré. Une très belle jeune fille
au regard ardent nous ouvre  : « J’espère que vous avez
fait bon voyage et que vous n’êtes pas trop fatigués
pour commencer vos vacances.

    — Merci, oui, euh non… C’est juste qu’il fait un
peu chaud. »

    Nous montons quelques marches et entrons dans
l’appartement. Elle ferme la porte, se retourne vers
nous et met un doigt sur ses lèvres. Nous la suivons
au salon, qu’une grande table au milieu transforme
en salle à manger.

    Un lit à deux places occupe l’alcôve. Les boiseriesanciennes sont peintes en gris, et un Mirus masque
le rideau de la cheminée. Deux hautes fenêtres
s’ouvrent sur un petit jardin en contrebas, dont un
figuier centenaire bouche en partie la vue. La jeune
fille nous explique à voix basse que la propriétaire
habite l’appartement du dessous et que des locataires occupent l’autre côté du palier : « Dans la cage
d’escalier, on entend tout. »

    À cet instant entre une dame de grande allure :
« J’ai demandé à ma fille de vous accueillir comme
si vous étiez des camarades. C’est plus naturel. »
Elle nous désigne le lit : « Voici le lit de ma fille.
Vous dormirez ici tous les deux. Suzette couchera
dans la cuisine, où nous avons mis un matelas. »

    Saisit-elle mon regard errant sur le mobilier hétéroclite et les rideaux défraîchis ? « Nous sommes
des réfugiés parisiens. Mon mari dirige le service
étranger de la Société générale. Depuis l’armistice,
nous sommes installés ici parce que la banque s’est
repliée à Lyon. Il est très difficile de s’y loger. » En
dépit de ce cadre modeste, l’accueil de ces deux femmes rayonne d’une douceur familiale. J’ai l’impression de rentrer à la maison.

    Dans ce logis provisoire, nous devons, selon le
règlement, camoufler aux regards de tous postes et
revolvers. Nous demandons la permission d’effectuer
le démontage du manteau de la cheminée. Ce travail
nous permet de faire la connaissance de M. Moret,
notre hôte. Petit homme au regard déformé par de
grosses lunettes, il nous révèle ses dons de bricoleur.

    Je cache provisoirement les instructions et l’argent
destinés à * Rex derrière des livres rangés en haut
d’une bibliothèque murale. Je suis bien conscient
de l’inefficacité de ce camouflage en cas de perquisition, mais je m’efforce de me conformer aux consignes du BCRA.

    L’appartement n’est pas dénué de ressources pour
des clandestins. Nos hôtes nous montrent un escalier descendant directement au jardin, au fond duquel
une porte ouvre sur une impasse inaccessible à partir de la rue Philippeville. On ne saurait

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